Certains expatriés seront plus lourdement taxés

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Un avant-projet de loi rabote les avantages fiscaux des expats. Les cadres supérieurs travaillant en Belgique pour des multinationales étrangères risquent de passer à la caisse… à moins que leur employeur ne règle la facture.

La sixième réforme de l’Etat produit des effets inattendus. Le texte réorganisant la Belgique fédérale, publié fin 2013 au Moniteur belge, cache une disposition concernant… les non-résidents. Avec cet avant-projet de loi, les expatriés séjournant en Belgique, mais qui n’y ont pas établi leur domicile légal, verront leur régime fiscal chamboulé. “Cela concerne environ 16.000 personnes, essentiellement des cadres supérieurs travaillant en Belgique pour des multinationales étrangères”, explique Fredericq Jacquet, tax director chez Deloitte. Son équipe a examiné à la loupe le texte déposé au Parlement. S’il est adopté tel quel, les non-résidents disposeront d’un calcul de l’impôt sur les revenus moins favorable qu’aujourd’hui.

“Actuellement, les cadres étrangers bénéficient d’un système attractif, qui a été créé en 1983 afin d’attirer en Belgique des sièges d’entreprises internationales”, pointe Fredericq Jacquet. Les non-résidents, qui potentiellement voyagent beaucoup pour leur travail, sont taxés uniquement sur la base du nombre de jours prestés sur le territoire belge. De plus, même s’ils ne sont pas domiciliés en Belgique, ils bénéficient de toutes les réductions fiscales applicables aux résidents, pour autant qu’ils aient un “foyer d’habitation durable” dans notre pays. Demain, ce ne sera plus le cas : la réforme de l’Etat vient torpiller cette mesure.

La barre des 75 %

L’avant-projet de loi fixe une règle unique, liée au montant des revenus perçus en Belgique. Seuls les expatriés qui gagnent au minimum 75 % de leurs revenus dans notre pays pourront bénéficier des réductions d’impôt applicables aux résidents belges. Dernière subtilité : seuls les expatriés résidents d’un pays de l’Espace économique européen (EEE) auront accès à l’ensemble des réductions, qu’elles soient fédérales (épargne-pension, quotient familial, enfants à charge, etc.) ou – demain – régionales (titres-services, emprunt hypothécaire).

Les expatriés domiciliés hors de l’EEE ne bénéficieront que des réductions fédérales. Ces mesures pourraient s’appliquer de façon rétroactive à tous les revenus perçus depuis le début de l’année : la date d’entrée en vigueur de la loi a été fixée au 1er janvier 2014.

Selon les estimations réalisées par les experts du cabinet de conseil Deloitte, la mesure pourrait coûter entre 2.000 et 9.000 euros nets par an à un expatrié qui passe sous la barre des 75 % de revenus perçus en Belgique (voir tableau). “Si son entreprise décide d’éponger la différence, cela coûtera à l’employeur environ 20.000 euros par an, voire davantage”, précise Fredericq Jacquet. Une fameuse ardoise.

Dans le contexte de concurrence fiscale que se livrent les Etats européens, les entreprises sont à l’affût du moindre impact des réglementations nationales sur les coûts salariaux. Si la mesure est entérinée, Fredericq Jacquet craint que certaines d’entre elles songent à quitter la Belgique : “Même en cas d’adoption de cet avant- projet, le dispositif belge en faveur des non-résidents resterait relativement attractif. Mais une telle mesure pourrait pousser certaines multinationales très mobiles à déplacer leur siège européen vers d’autres villes comme Dublin, Francfort, Luxembourg ou Amsterdam.”

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