Quand le dépeçage de Fortis faisait tomber le Premier ministre…

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Le ministère public prononcera aujourd’hui son réquisitoire dans l’affaire du Fortisgate. Les magistrats en cause risquent de six mois à cinq ans d’emprisonnement. Sans oublier d’éventuelles sanctions disciplinaires.

Les débats au procès de quatre juges, inculpés de violation du secret professionnel ou de faux en écriture dans le cadre de l’arrêt Fortis rendu par la cour d’appel de Bruxelles le 12 décembre 2008, sont entamés aujourd’hui mercredi devant la cour d’appel de Gand.

Le ministère public requerra des peines à l’encontre des quatre prévenus : Ivan Verougstraete, l’ancien président de la Cour de cassation, ainsi que Christine Schurmans, Paul Blondeel et Mireille Salmon, les trois juges de la 18e chambre de la cour d’appel de Bruxelles. Rétroactes.

Fortisgate : l’opposition des magistrats se transforme en affaire de fuites politico-judiciaires

La 18e chambre de la cour d’appel de Bruxelles, qui siégeait fin 2008 en référé, s’est prononcée sur le démantèlement du groupe Fortis et la vente de Fortis Banque au français BNP Paribas. Le tribunal de commerce de Bruxelles ne s’était pas opposé à la vente et au démantèlement, contrairement à la cour d’appel.

Avant que l’arrêt soit rendu, une discussion est née entre les trois juges de la 18e chambre. Le président Paul Blondeel et la conseillère à la cour d’appel Mireille Salmon étaient diamétralement opposés à la conseillère Christine Schurmans, qui aurait bien approuvé la vente de Fortis.

L’opposition était si forte que la délibération du 10 décembre a été suspendue. Le lendemain, Christine Schurmans est restée à la maison pour cause de maladie. Paul Blondeel, Mireille Salmon et le greffier de la 18e chambre se sont rendus jusqu’au domicile de la conseillère absente pour qu’elle signe l’arrêt mais ont trouvé portes closes.

Christine Schurmans s’est rendue après cette visite chez Guy Delvoie, premier président de la cour d’appel de Bruxelles, et chez Ghislain Londers, premier président de la Cour de cassation, pour déposer plainte contre ses deux collègues. Elle a averti en même temps de la situation Ivan Verougstraete, ancien président de la Cour de cassation.

Le mari de Christine Schurmans a pris contact notamment avec le chef de cabinet du Premier ministre d’alors, Yves Leterme, ainsi qu’avec Jo Vandeurzen, ministre de la Justice à l’époque.

Ces deux éléments – les tensions entre les membres de la 18e chambre et les contacts avec des tierces personnes – ont été révélés les jours et semaines suivant l’arrêt et ont conduit, en plus d’une crise au sein de la magistrature, à la démission d’Yves Leterme.

Fortisgate : réquisitoire du ministère public aujourd’hui, arrêt pour la mi-2011

Le conseiller gantois Henry Heimans a été chargé d’enquêter sur les fuites au sujet de l’arrêt pendant que la Cour de cassation enquêtait au sujet de la plainte de Christine Schurmans contre ses collègues Paul Blondeel et Mireille Salmon. Ces deux derniers ont été renvoyés en janvier 2009 devant la cour d’appel de Gand pour faux en écriture. La conseillère Christine Schurmans et l’ancien président de la cour de cassation Ivan Verougstraete doivent répondre par ailleurs de violation du secret professionnel.

Lors de l’audience introductive en novembre dernier, 2.222 actionnaires de Fortis, représentés par le bureau d’avocats Modrikamen, s’étaient constitués parties civiles. Les débats avaient été reportés au 23 février pour permettre aux parties de préparer davantage leurs plaidoiries.

Le ministère public doit prononcer aujourd’hui son réquisitoire. Paul Blondeel et Mireille Salmon risquent jusqu’à cinq ans d’emprisonnement, contre six mois pour Christine Schurmans et Ivan Verougstraete. L’avocat de Mireille Salmon, Me Sven Mary, a déjà annoncé qu’il plaidera l’acquittement de sa cliente.

En cas de condamnation par la cour d’appel de Gand, les prévenus sont encore passibles, en leur qualité de magistrats, de sanctions disciplinaires. Mais Ivan Verougstraete a déjà pris, à sa demande, sa retraite anticipée.

L’audience de mercredi doit débuter à 14 h à la première chambre de la cour d’appel de Gand. L’arrêt est attendu pour le milieu de l’année 2011. En raison du privilège de juridiction, aucun appel ne sera possible contre cet arrêt. Seul un pourvoi en cassation pourra être envisagé.

Trends.be, avec Belga

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