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“Par pitié, pas Zuckerberg président !”

Le risque de conflit d’intérêts est probablement encore plus grand avec Zuckerberg qu’avec Trump. C’est l’avis du journaliste du Trends néerlandophone Stijn Fockedey.

Récemment, le speech de Mark Zuckerberg à Harvard, son alma mater, a donné à certains l’espoir qu’il aspire à succéder à Donald Trump en 2021 en tant que président des Etats-Unis. Cela fait déjà des mois que des rumeurs circulent concernant les ambitions politiques du CEO de Facebook. Le ton politique de son speech a accéléré la machine à rumeur. Le milliardaire a invité les futurs diplômés de Harvard à prendre exemple sur la génération qui a envoyé l’homme sur la lune. C’était le Make America Great Again destiné à la génération Facebook. En même temps, le speech était une désapprobation complète de la manière dont Trump compte restaurer les Etats-Unis dans toute leur gloire. Zuckerberg a plaidé pour une augmentation des impôts pour les grandes fortunes comme lui-même, pour des investissements dans les énergies renouvelables dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques, et pour les flux migratoires. Trump désire notamment supprimer l’impôt sur l’héritage et faire subir un régime draconien à toutes les dépenses (excepté pour la défense et la sécurité), et il envisage une politique migratoire particulièrement stricte.

Losers

Avec Trump, c’est toujours un jeu à somme nulle, dans lequel il ne peut que gagner et où les autres sont forcément des losers. Les humoristes ont pu s’en donner à coeur joie, il y a quelques semaines, lorsque l’on a appris que Trump recevait deux boules de glace au dessert à la Maison Blanche, alors que les autres personnes présentes n’en ont reçu qu’une seule. Beaucoup moins innocent, Trump pense également de la sorte concernant le commerce international. Il est clairement toujours sous l’emprise de ses promesses électorales d’atomiser les accords internationaux et au besoin d’entamer une guerre commerciale. Sa menace, en marge du sommet du G7 des pays les plus riches, d’exclure les voitures allemandes du marché américain, était de mauvaise augure.

Préservez-nous de Zuckerberg président

Zuckerberg croit davantage dans la globalisation, mais lui aussi désire dominer le tout. L’orientation agressive de Zuckerberg en tant que CEO est au moins aussi dangereuse que le protectionnisme de Trump. Facebook est désormais tellement imbriqué dans la vie quotidienne de l’utilisateur moyen que celui-ci peut encore difficilement changer de réseau. Facebook risque de la sorte de mettre fin à la concurrence qui impose aux sociétés d’innover de telle manière à ce que la société s’améliore. Cette impulsion n’est pas uniquement importante dans le secteur des technologies. La Première ministre britannique Theresa May ne peut par exemple que se féliciter de la concurrence acharnée entre les supermarchés britanniques classiques et les hard-discounts comme Lidl et Aldi. L’incertitude concernant le Brexit a fait chuter la livre sterling britannique, les commerçants paient par conséquent davantage pour l’importation de nourriture et d’autres biens. Grâce à la lutte concurrentielle, les commerçants sont amenés à ne pas entièrement répercuter cette augmentation des coûts sur le consommateur. May voit à présent son avance se réduire dans les sondages. Mais à l’approche des élections, elle aurait encore de plus mauvais résultats si, pour les mêmes produits dans leur panier de courses, les Britanniques devaient sans cesse payer davantage.

Stratégie culottée

Aucune société n’aime faire face à une lourde concurrence, mais peu d’entre elles sont aussi puissantes que Facebook, à même d’éliminer la concurrence dans son secteur. Zuckerberg est particulièrement doué pour cela. Quand Instagram et WhatsApp, respectivement en 2012 et 2014, constituaient une menace, Zuckerberg les a tout simplement achetés. Suite au rejet de l’offre de plusieurs milliards, il met maintenant tout en oeuvre pour casser Snapchat. Facebook copie sans vergogne les fonctionnalités principales du nouveau rival dans ses propres services. Zuckerberg suit une stratégie au moins aussi culottée pour intégrer quelque 2 milliards d’utilisateurs internet dans les pays en développement. Facebook investit des millions dans des drones afin de pouvoir fournir de l’internet mobile bon marché même dans les régions les plus reculées ou les pays les moins bien équipés, ainsi que Facebook gratuitement. L’Inde a déjà refusé ce cadeau empoisonné. D’autres services devraient encore difficilement pouvoir offrir une concurrence sur un réseau en passe d’être complètement contrôlé par Facebook.

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