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Panique à l’Acropole, alerte au Capitole

On imaginait aisément que la semaine serait difficile pour les obligations émises par l’Etat grec, dans le sillage d’un vendredi fort pénible. En fait, elle débuta par un véritable bain de sang !

On imaginait aisément que la semaine serait difficile pour les obligations émises par l’Etat grec, dans le sillage d’un vendredi fort pénible. En fait, elle débuta par un véritable bain de sang ! Lundi en effet, le rendement du papier hellène à 10 ans s’envola de 79 points de base, comme disent les professionnels, c’est-à-dire de 0,79 %. Après une hausse de 0,56 % à la veille du week-end. Ce n’est pas un record historique : au moment de la crise du début mai 2010, ce même taux à long terme enfla de 1,13 % deux jours d’affilée.

Il n’empêche : à plus de 14 %, le rendement que les investisseurs exigent de la Grèce dépasse celui demandé au Pakistan. C’est d’autant plus infâmant qu’Athènes emprunte en euro et Karachi en roupie, une devise qui présente évidemment un risque de change absent de la première. L’alerte est donc maximale sur la dette grecque et, à certains égards, plus encore qu’en mai 2010. Particulièrement sensible au sentiment à court terme du marché, le rendement des obligations à deux ans a, lundi, explosé à plus de 19 %, en hausse de 1,76 % sur la journée. Et ceci, c’est un record !

D’évidence, le week-end fut funestement propice à la réflexion et à la digestion des mauvaises nouvelles de la fin de semaine précédente. Quand il est apparu que les banques grecques étaient aux abois et prêtes à se délester de tout ce qui leur tombait sous la main pour faire face à leurs problèmes de liquidité. C’est que les dépôts de leurs clients, en recul de 14 % sur un an, continuent de se contracter de 3 milliards d’euros par mois. Résultat : elles doivent toujours se financer auprès de la Banque centrale européenne pour près de 100 milliards d’euros. Près du double des banques espagnoles, qui sont parvenues à réduire leurs besoins de deux tiers, après l’alerte de l’automne dernier.

Ces avatars seraient peut-être passés inaperçus, ou presque, si l’Allemagne n’avait au même moment jeté de l’huile sur le feu par l’entremise de son ministre des Finances, Wolfgang Schaübe, et surtout de son vice-ministre des Affaires étrangères, Werner Hoyer. Quand de telles personnalités évoquent la possibilité pour Athènes de restructurer sa dette, comment imaginer que les investisseurs puissent rester sereins ?

Ils ne le sont pas restés sur le marché obligataire où, en réaction à la débâcle grecque, ils ont cherché refuge dans le papier émis par les Etats réputés sûrs : Allemagne et Pays-Bas, mais aussi Danemark et Finlande ont vu leur rendement raboté d’un gros dixième de pour cent. Pas la Belgique, il faut bien le constater… Sur le marché boursier non plus, l’heure n’était pas à la sérénité, avec une Europe globalement en repli de 1,7 %. Wall Street, qui regardait la scène européenne avec un certain détachement, a également flanché en début d’après-midi, quand l’agence de notation Standard & Poors a osé placer le rating de Washington sous biais négatif !

Voilà le blason de Washington légèrement entaché. Préoccupant ? Pas vraiment : les Etats-Unis restent membre du club très fermé des pays pouvant se prévaloir du fameux AAA qui désigne les meilleurs débiteurs. Même en cas d’abaissement de son rating, sa situation n’aurait rien de comparable avec celle des maillons faibles du Vieux Continent. Pour une raison fort simple : le marché de la dette américaine est le seul qui soit vraiment à la mesure des achats de la Chine et autres tirelires géantes, qui ne peuvent donc s’en détourner. C’est l’équivalent souverain du too big to fail.

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