Une histoire de barbes

© PH. CORNET

Les plus fameux duettistes de l’art contemporain, Gilbert & George, installent 12 oeuvres récentes, ” The Beard Pictures “, dans une galerie ixelloise. Transgressif mais aussi mélancolique que provocateur.

Le jeudi 9 novembre sur le coup de 18h30, Gilbert & George sont arrivés au vernissage de leur expo à la Galerie Albert Baronian, sans tambour ni trompette. Leurs impeccables costumes de tweed sont jumeaux, tout comme les chaussures et cravates. Les deux septuagénaires affables posent simplement avec qui leur demande, par exemple une adolescente poussée par sa maman : la scène serait banale si malgré une politesse et une courtoisie réelles, les deux artistes n’étaient pas géniteurs d’une des oeuvres les plus corrosives et hautement ironiques de notre époque.

Les 12 pièces présentées cet automne à Bruxelles n’ont pas le côté transgressif de certaines élucubrations passées – la série Shit and Piss des années 1990 – mais l’espièglerie, la surprise plastique, l’imagination borderline, sont toujours là. Pour comprendre la démarche de Gilbert Prousch et George Passmore, il faut savoir que ce couple artistique et amoureux, collabore depuis une rencontre en septembre 1967 à ce qui était alors la St Martins School Of Art de Londres. Un ” coup de foudre ” réciproque nourrissant un procédé où Gilbert & George ne cessent de décliner leurs propres silhouettes dans des tableaux où l’image photographique est malaxée et photoshopée, détournée de sa réalité vers des intentions farfelues, oniriques et provocantes. La série The Beard Pictures actuellement à Bruxelles – où Bozar les honorait il y a sept ans – les montre ” barbus “, la pilosité étant ici réalisée à base de toile métallique, de mousse de bière ou encore de lapins ! Le surréalisme s’invite d’ailleurs naturellement dans les fresques qui portent évidemment la marque G & G, c’est-à-dire à chaque fois composées d’une série de damiers assemblés au final pour une image générique. Jamais très loin de l’absurde, comme si ces selfies ultra-sophistiqués n’étaient que la version arty d’une époque déboussolée qui ne cesse de se regarder le nombril via le smartphone. La vision a un prix : les pièces vendues chez Baronian, se chiffrent entre 77.000 et 175.000 euros.

The Beard Pictures jusqu’au 23 décembre, www.albertbaronian.be

Par Philippe Cornet

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