Sept péchés capiteux…

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Le travail de la vigne étant traditionnellement limité en cette période, les premiers mois de l’année voient les vignerons participer à quelques-uns des plus importants salons destinés aux professionnels. A l’approche du printemps, la grande distribution relance, elle, ses ventes avec une foire où de belles affaires sont toujours à faire pour qui sait où chercher.

Nos pérégrinations et dégustations ont débouché sur une sélection des pépites qui nous ont épatés ces dernières se- maines. En prenant soin aussi de dénicher des vignerons dont nous n’avions pas encore parlé. A vos tire-bouchons !

Un effervescent de Camargue

Oh, le joli coup que voilà ! Le groupe Vranken-Pommery Monopole sort une bulle élaborée en Camargue et a réussi à la faire appeler Brut de France ! Nul doute que la concurrence doit se mordre les doigts de ne pas y avoir pensé plus tôt. En Camargue, le vignoble des sables des Domaines Vranken s’étend sur près de 1.800 hectares, des Saintes-Maries-de-la-Mer à Aigues-Mortes et de Sète à Agde. Cela fait un bout de temps que Paul-François Vranken rêvait d’y produire une bulle. Avec l’aide de Thierry Gasco, l’ancien chef de cave de Vranken-Pommery aujourd’hui reconverti en international winemaker au sein du même groupe, le Liégeois a fait des essais sur plusieurs millésimes avant de sortir, pour la première fois en ce début d’année, son Brut de France. Il est élaboré évidemment selon la méthode traditionnelle avec un vieillissement de 12 mois sur latte. La cuvée fait la part belle au chardonnay (98 %) avec une petite pointe d’ugny blanc qui apporte de l’acidité supplémentaire dans une région dont ce n’est pas la caractéristique première. D’ailleurs, les raisins sont récoltés tôt au mois d’août pour gagner en acidité aux dépens de la maturité. A l’arrivée, ce Brut de France est, à nos yeux, une réussite. C’est une bulle efficace, sympathique et qui va plaire au plus grand nombre. Avec son faible taux de sucre résiduel (5 g/l) et sa haute minéralité, caractéristique de ce terroir de sable, il s’agit d’un effervescent net, d’une grande fraîcheur et qui n’encombre pas la bouche. Evidemment, vu leur partenariat de 40 ans, ce Brut de France est disponible chez Delhaize. Jusqu’à la fin des foires des vins (le 14 mars), le prix passe de 13,99 à 11,19 euros. Une affaire.

Sept péchés capiteux...

Une petite appellation à (re)découvrir

On ne quitte pas les foires des vins de nos enseignes belges. En plein pays des mousquetaires, dans le sud-ouest, entre Agen et Marmande, se loge une bien jolie appellation : l’AOC Buzet. La proximité avec son grand frère bordelais implique qu’on y travaille le même genre de cépages : le cabernet sauvignon, le cabernet franc, le merlot, le sauvignon, le sémillon. Mais aussi l’abouriou, un cépage typique du Lot-et-Garonne apparu pendant la crise du phylloxera (fin du 19e siècle). Il donne des vins sauvages, colorés et plein de caractère. D’une étendue de près de 2.000 hectares, l’appellation est dominée (97 %) par une coopérative appelée Les Vignerons de Buzet. Créée au début des années 1950, elle est responsable de l’attribution de l’AOC à des vins qui le méritent bien. En outre, la cave s’est engagée depuis des années dans une viticulture respectueuse de la nature qui n’utilise aucun engrais chimique, favorise les circuits courts et respecte les normes environnementales les plus strictes. Les vins des Vignerons de Buzet sont, depuis longtemps, présents dans les rayons de nos supermarchés. Notamment chez Colruyt qui possède l’une des stars de l’AOC : le Baron d’Ardeuil. Son rouge en vieilles vignes est typique de l’appellation : un vin rouge puissant et généreux à la belle structure tannique et qui fait la part belle aux épices et aux fruits rouges bien mûrs. Un vin de qualité disponible pour 6,46 euros (avec une réduction de 20 % par 6 bouteilles) ! Cora privilégie pour sa foire des vins le Domaine de la Sébastiane. Un assemblage de 84 % de merlot et 16 % de cabernet franc. Une nouveauté qui est un coup de coeur du guide Hachette avec deux étoiles. Ce Buzet-ci est plus subtil et moins boisé. Mais il présente la même ampleur et des notes semblables. Un autre beau produit à prix doux puisqu’il est proposé à 5,85 euros jusqu’au 31 mars.

Sept péchés capiteux...

Mister Bean fait du grand vin !

Au mois de janvier, nos pérégrinations nous ont conduit à passer trois jours en Savoie. Accompagné de collègues européens et de Frank Smulders, un master of wine néerlandais, nous avons parcouru l’ensemble de la région et dégusté pas moins de 130 vins. Nous en reparlerons. Un coup de coeur absolu s’est vite imposé : le domaine du Cellier des Cray à Chignin, en plein coeur de l’appellation AOC Vin-de-Savoie Chignin- Bergeron. Adrien Berlioz, qui a des allures de Mister Bean, fait à lui seul oublier que le vin de Savoie n’est pas un vin de sports d’hiver ou de raclette ! Enfin seul, ce serait oublier ses copains de la Cuma, la coopérative qui regroupe 15 vignerons du village de Chignin et des environs. Ici, pas de négoce, pas de coopérative mais un sens du métier poussé à l’extrême. Situé dans un géoparc, les vignes bénéficient à Chignin, au pied de la Savoyarde et du massif des Bauges, d’une belle exposition sud-sud-est qui permet à la roussanne (appelée ici bergeron) de bien mûrir. Jeune viticulteur qui prône la biodynamie, Adrien Berlioz propose d’incroyables cuvées, toutes bouchées à la cire, qui s’améliorent d’année en année. Comme l’Octavie, exclusivement constituée de persan, un vieux cépage oublié de la Savoie. Ou la Marie-Clothilde, une mondeuse (un autre cépage savoyard typique) tout en élégance, finesse et fraîcheur. Mais c’est la Cuvée Euphrasie 2015 qui nous a le plus séduit. Avec une bouche ample et savoureuse, voilà un vin bien juteux avec des notes marquées de poire mais aussi de noisettes et de brioche. Il est disponible chez Divine Wines (36 chaussée de Waterloo à Rhode-Saint-Genèse – 02 771 88 47) au prix de 26,95 euros.

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La haute gastronomie de Monsieur l’abbé

Chaque année, le salon Vinisud propose, à Montpellier, de partir à la rencontre des vignerons méditerranéens. Un rendez-vous immanquable qui, malheureusement, sera désormais organisé une année sur deux à Paris. L’édition 2018 fut un grand cru. Avec comme coup de coeur absolu, le Domaine de l’Abbé Dîne. Si la famille Reynaud exploite les terres depuis cinq générations, il a fallu l’arrivée de Nathalie en 2010 pour que le domaine s’émancipe de la coopérative qu’elle fournissait. Suivie par l’éminent oenologue Philippe Cambie, Nathalie Reynaud a commencé à sortir ses propres vins à partir de 2012. C’est bien simple, ce domaine de 18 hectares situé à Courthézon à un jet de galet roulé de Châteauneuf-du-Pape ne produit que des pépites, et le mot est faible. Toute la gamme est incroyable de justesse et de délicatesse. Les raisins sont cueillis manuellement avec tri sur la parcelle. Le Côtes du Rhône blanc 2017 en 100 % clairette est gourmand, juteux, ample avec de belles notes d’agrumes. Le Côtes du Rhône rouge 2016 provenant d’un terroir de sables est très impressonnant. C’est équilibré, puissant, gourmand, croquant et soyeux à la fois. Le Côtes du Rhône Villages 2015 est issu d’une parcelle de galets roulés sur terre rouge. Il exprime parfaitement le côté solaire du millésime avec une incroyable puissance enrobée dans un joli gant de velours. C’est épicé, ciselé et élégant. Le faire un peu attendre devrait encore l’améliorer. Et on ne vous parle même pas des châteauneuf-du-pape, dont le rouge est issu, en partie, d’une parcelle vieille de 120 ans. Voilà un domaine à posséder dans sa cave. Les différentes cuvées de Nathalie Reynaud sont disponibles à Namur chez Autrement Dit Vins (332, chaussée de Dinant – 081 20 00 20) ainsi que sur son site internet (livraison gratuite à partir de 300 euros). Les millésimes renseignés ci-dessus rentrent dans les tout prochains jours (les anciens sont toujours en vente). Pour vous donner une idée, le CDR rouge 2016 vaut 12,20 euros, le CDR Villages 2015, 15,80 euros.

Sept péchés capiteux...

Au sommet des Terrasses du Larzac

Voilà une jeune appellation (l’AOC date de 2014) qui monte. Au propre comme au figuré. Car qui s’est déjà aventuré à Arboras (et en haut de son causse), Montpeyroux ou Jonquières ne peut qu’apprécier la beauté du paysage. Pour beaucoup, cette appellation est le joyau du Languedoc. Et il vrai que des domaines comme le Mas Jullien, le Mas Cal Demoura ou le Clos des Serres de Béatrice Fillon ont fait beaucoup pour la renommée des vins de cet endroit pas comme les autres. Cap sur Arboras, une des parties les plus hautes et les plus froides de l’appellation, et le Domaine de la Réserve d’O dirigé par Frédéric et Marie Chauffray, présidente de l’appellation jusqu’en juin dernier. Les trois cuvées en rouge de ce domaine cultivé en biodynamie valent le détour. Le Bilbo, assemblage de grenache et de cinsault est un vrai ” glouglou ” de potes gourmand et croquant. La Réserve d’O, star du domaine, présente un bel équilibre entre tanins et alcool. Elevée pendant 16 mois, partiellement en amphore, cette cuvée fait la part belle à la syrah et au grenache. C’est un beau jus, bien savoureux, où le fruit domine. De préférence noir et bien mûr. C’est un must ! Nous avons moins aimé le Hissez O, un peu fermé au moment de la dégustation. Les vins de Frédéric et Marie, autodidactes, sont disponibles chez Mouchart (11 rue Cattoir à 1050 Bruxelles – Tél. 02 648 51 34). Les nouveaux millésimes viennent d’arriver. Le Bilbo 2016 est vendu 16 euros, la Réserve d’O 2016, 18,40 euros.

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Les faïsses de Montpeyroux

On ne quitte pas les Terrasses du Larzac pour se diriger vers le domaine familial Puech-Auger. Après 40 ans de travail de la vigne, Jean-Marie Crézégut a laissé sa place à son fils Didier et sa belle-fille Magali. Adossé au Mont Saint-Baudille, le domaine de 14 hectares produit différentes cuvées dans de nombreuses appellations : AOC Montpeyroux, AOC Terrasses du Larzac, AOC Languedoc ou IGP Mont Baudile. Parmi celles-ci, on a particulièrement aimé les Faïsses de Jean 2016. Une cuvée rouge qui donne l’impression de croquer dans des fruits rouges. Un vin de copains, friand, aux notes de garrigue et de réglisse et d’une belle fraîcheur. Nous avons aussi craqué pour la complexité et la densité de la cuvée Les Canques Terrasses du Larzac 2016 qui fait la belle part à un de nos cépages préférés, le mourvèdre. Un vin avec une belle matière sans trop d’extraction. Ça fleure bon le cassis, les olives et les épices. Les vins du domaine Puech-Auger sont disponibles à La Barrique à Nalinnes (5, rue des Ecoles – Tél. 071 21 80 25). Fait remarquable, ils sont vendus dans ce magasin/bar à vins au catalogue très étendu à des prix quasi identiques à ceux de la propriété. Les Faïsses de Jean valent 8,30 euros, Les Canques, 16,50 euros.

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Gloire au mourvèdre

On ne quitte pas le mourvèdre (appelé monastrell en Espagne), un cépage autrefois décrié à cause de sa fragilité et qui fait son retour en force en France dans les assemblages par sa capacité à fournir de la matière, de la maturité, des arômes d’épices et de fruits noirs. Il s’exprime le mieux dans les régions littorales et c’est ainsi qu’il est très présent à Bandol. On le retrouve très largement majoritaire (90 %) dans l’incroyable cuvée rouge du Château de Pibarnon, disponible, entre autres, chez Rob. Mais ce sont les Costières de Nîmes qui nous intéressent aujourd’hui. Et le Château de l’Ermitage, un vieux domaine de 80 ha situé sur leur versant méditerranéen. Jérôme Castillon y propose de nombreuses cuvées où le mourvèdre tient une place de choix. Comme Le Sainte Cécile rosé, un 100 % mourvèdre à la couleur groseille et au nez de bonbon. Etonnant ! Nous avouons un gros faible pour ses deux cuvées prestige. D’abord l’ Epicuria 2016, aussi un 100 % mourvèdre. C’est un vin de caractère, bien équilibré, très croquant en début de bouche et avec une belle fraîcheur. Le 2016 est encore un peu sauvage mais c’est la promesse d’un grand vin qui fera merveille sur le gibier. L’Edonist 2016 (50 % mourvèdre, 50 % syrah) est tout aussi bien. Avec un joli nez charmeur de syrah, c’est un vin ample, complexe et fin. Lui aussi mériterait de vieillir un peu pour assouplir une trame tannique un peu serrée. Voilà deux Costières de Nîmes pour épater vos copains. Les vins de Jérôme Castillon sont disponibles chez Cinoco-Palais du vin (Tél. 02 412 70 53). Les derniers millésimes doivent encore rentrer mais à titre d’exemple, l’Epicuria (2014), excellent, y est vendu 21,31 euros.

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