Qui sera le 34e Manager de l’Année? Voici les 7e et 8e finalistes

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Ils sont 10 finalistes à concourir pour le prix du Manager de l’Année 2018 de “Trends-Tendances”. Nous vous présentons chaque semaine deux des dix personnalités sélectionnées par notre jury.

Le Manager de l’Année est une récompense décernée depuis 1985 par Trends- Tendances. Chaque année, le jury – composé de membres de la rédaction et de spécialistes des milieux économique et financiers – se réunit pour élaborer une liste de 10 finalistes. Les critères ? Etre depuis au moins deux ans dans une fonction dirigeante (administrateur délégué ou CEO) au sein d’une entreprise et faire preuve de compétences managériales remarquables se traduisant tant dans les performances financières de l’entreprise que dans sa renommée, son climat social et ses perspectives de développement. Avec les portraits de Jean-Paul Philippot (RTBF) et de Mohamed Takhim (Ecophos), que vous pourrez lire en pages suivantes, nous poursuivons la présentation de ces 10 personnalités, à raison de deux par semaine. Qui succédera donc à Jean-Pierre Lutgen (CEO d’Ice-Watch), vainqueur de l’édition 2017, et enrichira un palmarès comptant des personnalités telles qu’Albert Frère, Jean Stéphenne, François Fornieri, Paul François Vranken et Eric Domb ? Pour élire votre manager favori, rendez-vous du lundi 19 novembre au dimanche 2 décembre inclus sur le site www.managerdelannee.be.Le prix sera remis au lauréat lors d’une soirée de gala qui se tiendra le mercredi 9 janvier 2019 à Brussels Expo.

Jean-Paul Philippot, administrateur générale de la RTBF: “L’endurance est une qualité nécessaire du manager”

Qui sera le 34e Manager de l'Année? Voici les 7e et 8e finalistes
© Christophe Ketels – BELGAIMAGE

A 58 ans, Jean-Paul Philippot a réussi le pari d’une RTBF désormais concurrentielle sur le terrain numérique. Mieux : l’entreprise est saine, ses audiences sont performantes et le “paquebot Reyers” sert aujourd’hui de modèle à l’étranger.

Pour lui, c’est une réelle surprise car l’administrateur général de la RTBF ne s’attendait pas à cette nomination au titre de Manager de l’Année 2018 : ” Je suis étonné parce que nous sommes un opérateur public et qu’il y a une tendance, dans le monde qui nous entoure, à traiter public et privé de manière distincte. Or, j’ai fait Solvay et je ne me suis jamais senti autorisé, en matière de management, à avoir une attitude ou des règles qui seraient moins exigeantes que celles de mes collègues et amis qui travaillent dans le privé. “

A demi-mot, Jean-Paul Philippot vient de remettre les pendules à l’heure sur le terrain de la compétition. Privé-public, même combat : le sens du management ne se discute pas et l’homme met un point d’honneur à appliquer des principes de gestion équivalents à ceux que l’on retrouve dans n’importe quelle autre entreprise.

La RTBF a accompli, ces dernières années, des transformations remarquables

Résolument sportif, le patron de la RTBF pratique plusieurs disciplines – voile, jet-ski, vélo, etc. – et il insuffle volontiers cette énergie à son institution, tout comme ce goût du challenge qui lui est cher. ” Un manager est quelqu’un qui s’investit pleinement et c’est mon style de leadership, confesse-t-il. Le sport me donne aussi de l’appétit pour l’endurance. Quand je fais de la voile, c’est pour des longues distances et non pas des ‘parcours banane’ en régate. Je pense que l’endurance est une qualité nécessaire du manager. “

Avec 16 années complètes passées à la tête de la radio-télévision de service public, Jean-Paul Philippot en connaît un rayon sur l’endurance et il a su négocier les virages avec flegme et détermination. Déjà ” challengé ” par ses concurrents historiques, il a dû s’adapter, ces dernières années, à une profonde mutation du monde des médias où les notions de digitalisation et de ” délinéarisation ” ont émergé dans un univers désormais cadenassé par les Gafan (Google, Apple, Facebook, Amazon et Netflix), tant sur le plan des contenus qu’au niveau des revenus publicitaires.

Fin stratège, le patron de la RTBF ne s’est pas laissé impressionner et a pris le virage numérique à temps, en lançant déjà son service d’offre non linéaire Auvio en 2016, une plateforme digitale qui rassemble aujourd’hui plus de 2 millions d’utilisateurs. Habile et audacieux, le manager a également remis à plat toute la structure organisationnelle de son entreprise pour mieux répondre aux défis de la nouvelle consommation des médias. Un vaste chantier qui a bousculé – et qui bouscule toujours – les habitudes de travail des 2.000 salariés de l’entreprise, mais dont l’exécution s’avère indispensable pour imposer pleinement la RTBF dans le monde digital.

Beaucoup plus transversal, son nouvel organigramme a tapé dans l’oeil d’autres services publics européens dont France Télévisions qui s’inspire aujourd’hui du modèle de la RTBF pour réfléchir à son propre avenir. ” Débarrassons-nous un peu de notre complexe belge francophone qui nous pousse à ne jamais savoir reconnaître que l’on peut aussi, dans certains domaines, être à l’avant-garde et facteur de succès, conclut Jean-Paul Philippot. En 2018, dans les secteur des médias publics, la RTBF est considérée en Europe comme un acteur de référence. “

Trends Manager de l’année 2018

Pourquoi le jury l’a choisi

Dans un environnement audiovisuel de plus en plus concurrentiel, Jean-Paul Philippot a réussi à redynamiser la RTBF et à embrasser le virage numérique avec, notamment, la mise en place d’une nouvelle structure organisationnelle. Les résultats financiers de l’entreprise sont aussi très solides, tout comme les performances de la radio-télévision de service public en termes d’audience.

Les fait marquants de 2018

“La RTBF quitte le monde historique d’une organisation centrée sur les médias pour s’adapter aux nouveaux usages de consommation des différents publics. Il s’agit d’une transformation profonde, stratégique et nécessaire pour ancrer nos missions de service public dans une société digitale en pleine mutation.”

La réalisation dont il est le plus fier

“Je suis fier d’avoir aujourd’hui plus de 2 millions d’abonnés sur Auvio. Cela dépasse tous nos objectifs de croissance et cela inscrit cette plateforme audiovisuelle digitale comme la plateforme de référence belge francophone avec des contenus originaux.”

Le défi qui l’attend en 2019

“La RTBF, pleinement digitale, doit continuer à créer et à innover dans tous les formats. Elle doit être l’acteur de référence dans la production et la promotion de la création locale pour le rayonnement de la Wallonie et de Bruxelles à l’étranger.”

Un bon Manager de l’Année, selon lui

“C’est quelqu’un qui stimule et fédère des initiatives et de la créativité. Un bon manager doit incarner la vision de l’entreprise et faire vivre cette vision de manière déterminée. Il doit aussi créer un climat de confiance et faire de l’entreprise une structure apprenante.”

Mohamed Takhim, CEO d’Ecophos – Sur les traces d’Ernest Solvay

Qui sera le 34e Manager de l'Année? Voici les 7e et 8e finalistes
© Christophe Ketels – BELGAIMAGE

L’agriculture plus écologique, c’est possible grâce à Mohamed Takhim. Il a inventé un procédé propre et moins cher pour produire des phosphates, indispensables pour les cultures. Basé à Louvain-la-Neuve, il multiplie les usines à travers le monde, notamment en Chine.

C’est une belle histoire, digne d’Ernest Solvay, l’inventeur d’un procédé de fabrication de la soude, qui a rendu le patronyme célèbre en Belgique et développé un empire industriel. Mohamed Takhim, 42 ans, lui, a inventé un procédé pour fabriquer du phosphate, indispensable pour l’agriculture, au départ de minerai pauvre. Une invention très écologique, développée par sa société Ecophos, basée à Louvain-la-Neuve. La production classique, avec du minerai riche, peu abondant, est polluante. ” Elle génère six tonnes de déchets par tonne de soude produite, difficiles à traiter, explique-t-il. Notre procédé n’en produit que 30 kg, bien plus aisés à traiter. ” Il est également moins cher que la production traditionnelle de phosphate, qui utilise un minerai très concentré, rare, dont le cours est très élevé (plus de 150 dollars la tonne).

Comme Solvay, Mohamed Takhim multiplie les usines à l’étranger. Il possède une usine à Rotterdam, une autre en Bulgarie. En 2017, il a ouvert Dunkerque. L’an prochain, ce sera le tour de l’Inde, puis de huit usines en Chine à travers une joint-venture signée cette année.

Son procédé est moins cher que la production traditionnelle de phosphate.

Ce développement est l’aboutissement d’un long parcours qui a débuté au Maroc. C’est là que Mohamed Takhim, encore lycéen, a imaginé un procédé de purification du phosphate, dont son pays natal est grand producteur. Une petite révolution pour l’exploitation de cette matière précieuse et méconnue. ” Comme l’oxygène ou l’eau, elle est indispensable à la vie, dit-il. Il en faut pour faire pousser les plantes : 80 % des phosphates sont utilisés pour fertiliser les champs. ” Mohamed Takhim est venu présenter son invention au salon Eurêka, à Bruxelles, en 1995. Il avait à peine 19 ans. Il y a impressionné des investisseurs qui l’ont aidé à lancer Ecophos, alors qu’il poursuivait encore ses études (en ingénieur procédé chimique et MBA Skema Business School à Paris). Débute alors un long périple pour valider le processus et mettre au point la production industrielle.

Aujourd’hui, le temps de la récolte est arrivé. Avec ses premières usines, Ecophos peut montrer son savoir-faire et convaincre banquiers, investisseurs et partenaires pour s’exporter. ” L’an passé, j’ai passé 228 jours en voyage”, précise-t-il. Le groupe réalise un chiffre d’affaires consolidé de 151 millions d’euros en 2017 et occupe 350 personnes, dont une moitié en Belgique.

Les usines sont soit détenues en propre (Dunkerque), soit en joint-venture (Chine). Mais Ecophos vend également son procédé, en échange de royalties. Un groupe russe va ainsi ouvrir une immense usine au Kazakhstan pour exploiter du minerai de phosphate pauvre, abondant dans ce pays. Côté belge, il n’y a pas (encore) d’usine. ” Je cherche 5 à 10 ha à Anvers, mais le terrain manque “, précise Mohamed Takhim. L’étape suivante consistera à exploiter les boues des centrales d’épuration, incinérées, très riches en phosphate.

La succession semble assurée. L’inventeur est l’heureux père d’une petite fille, Sofia, sept ans en janvier. ” Elle a voulu avoir un petit labo de chimie, comme moi à son âge, dit-il, ému. Elle adore les cristaux. Je lui ai dit que ceux du phosphate sont très petits. Elle m’a répondu que ça ne faisait rien et m’a demandé de lui en donner un grand sac. “

Trends Manager de l’année 2018

Pourquoi le jury l’a choisi

Pour le parcours sans faute et exemplaire de Mohamed Takhim et d’Ecophos. ” C’est un nouveau processus totalement innovant “, indique un membre du jury. La progression financière est aussi remarquable, ” un chiffre d’affaires passé de 12 millions d’euros en 2012 à 151 millions en 2018 “. L’Ebitda est à l’avenant, et le dévelop-pement international réussi.

Le fait marquant de 2018

La signature d’une joint-venture en Chine avec le groupe Guizhou Chanhen Chemical Corporation pour la construction d’usines de traitement produisant jusqu’à 2,2 millions de tonnes tous les ans. ” Et la montée en puissance de l’usine de Dunkerque. “

La réalisation dont il est le plus fier

” L’usine de Dunkerque, ouverte en 2017, et le projet chinois sont les étapes les plus importantes pour Ecophos. L’usine française a une capacité de 220.000 tonnes par an. Elle constitue un véritable show-room pour montrer la capacité d’Ecophos à de nouveaux clients ou partenaires. “

Le défi qui l’attend en 2019

” L’ouverture de l’usine en Inde, dont Ecophos possède 85 %. ” Le lancement d’un projet de production de phosphate au départ de boues incinérées provenant de systèmes d’épuration des eaux, ” sans doute à Dunkerque “. Une véritable démonstration d’économie circulaire. ” Nous avons réalisé la production pilote. La technique est au point. “

Un bon Manager de l’Année, selon lui

” C’est quelqu’un qui a réussi la stratégie fixée pour son entreprise, a construit un business plan et est parvenu à l’implémenter et à fédérer ses équipes. C’est une reconnaissance de cette réussite, sachant qu’en général, elle n’est pas l’affaire d’une année. “

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