Neuf notes d’une sonate d’automne

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C’est une tradition lancée en France par Edouard Leclerc dans les années 1970. A la rentrée, la grande distribution fait la foire aux vins. Pour ne pas être en reste et continuer à vendre, les importateurs et certains cavistes y vont aussi de leur propre partition. Pas facile de s’y retrouver dans une offre plus que pléthorique. Nos dégustations ont débouché sur une sélection très resserrée. De vraies pépites dans des appellations moins connues ou au rapport qualité/prix étonnant. Santé !

Pas de doute, c’est l’amour !

Le domaine s’appelle La Pirolette. Sans doute une allusion à la pirole, une petite plante que les anciens utilisaient pour ses effets diurétiques. Aujourd’hui, seules les vignes y ont droit de cité. Nous sommes en Beaujolais dans le bien nommé village de Saint-Amour. Le domaine de La Pirolette a été racheté par Grégory et Virginie Barbet et une quinzaine de copropriétaires en 2013. Très impliqué dans Terroirs et Talents, une grande association du Beaujolais, Grégory développe ici un vrai projet personnel et familial. Et cela se goûte ! Fort de 15 hectares plantés de gamay noir, le domaine ne produit qu’un seul vin en AOP Saint-Amour. Le 2015 est une vraie réussite. C’est un vin suave à la belle robe grenat, épicé, bien équilibré et particulièrement charnu pour un beaujolais. Voilà un exemple typique du renouveau de cette région qu’on a hélas trop tendance à ignorer. Ce 3 étoiles coup de coeur du guide Hachette 2018 (excusez du peu ! ) est en vente chez Va.S.Co (02/583 57 57) au prix de 14,25 euros.

Le paradis s’appelle Arlebosc

En descendant vers le sud depuis Saint-Amour, l’autoroute A7 vous conduit vers Tournon après la traversée de Lyon. En suivant les replis de la route du Doux, un affluent du Rhône, vous arriverez tôt ou tard à Arlebosc. Un petit village devenu incontournable pour les passionnés de vin depuis qu’en 1993, un certain Hervé Souhaut et son épouse Béatrice y ont repris le domaine Romaneaux-Destezet. Biologiste de formation, Hervé y produit des vins nature au départ de cépages typiques du nord de la Vallée du Rhône : syrah, gamay, roussanne et viognier. Ce sont tous des vins simplement extraordinaires avec une incroyable pureté de fruit. Avec la Souterronne, si joliment épicée et concentrée, Hervé Souhaut a révolutionné le 100 % gamay. Et que dire des Cessieux, un saint-joseph littéralement extraterrestre. C’est gourmand, rond, puissant et d’une belle finesse. C’est du pur bonheur en bouteille. Les trois adresses bruxelloises de la Winery (Schuman, Brugmann et Boitsfort) proposent les vins d’Hervé Souhaut, dont le trop rare Cessieux au prix de 34,90 euros.

Une trilogie bien chaude

En septembre, nous vous disions tout le bien que nous pensions des vins portugais Altano en vente chez Delhaize. Ce mois-ci, dans la grande distribution, c’est chez Cora (et sur son site corawine.be) que nous avons trouvé notre bonheur. D’abord en blanc avec un Trilogy surprenant. Certifié bio depuis 2014, le domaine de Coste Chaude est installé à Visan, un petit village situé à une encâblure des Cairanne, Rasteau ou autre Vaison-la-Romaine. L’altitude des vignes, le mistral très présent et un terroir de galets roulés permettent un bel équilibre entre fraîcheur et mûrissement parfait des raisins. Trilogy tire son nom d’un assemblage de roussanne, grenache blanc et viognier. C’est un blanc bien rond, bien charnu et bien gras avec des notes de fruits blancs. Sa complexité aromatique en fait un compagnon idéal pour les volailles. Son prix ? 9,19 euros seulement (jusqu’au 30 octobre, fin de la foire des vins).

Viens, je t’emmène au vent…

Sans quitter les appellations du Rhône, traversons l’autoroute A7 pour rejoindre Domazan et le département du Gard. La famille Gonnet produit des châteauneuf-du-pape depuis les années 1950 dans le domaine de Font de Michelle, 30 hectares d’un seul tenant situé à Bedarrides dans le sud-est de l’appellation. En 2002, Jean et Michel Gonnet ont acheté le Font du Vent, un domaine de 20 hectares situé à Domazan. Le terroir y est semblable à Bedarrides avec des galets roulés, des safres et des éclats calcaires. Mais aussi de l’argile rouge. Font du Vent produit quatre vins rouges dont le Notre Passion en Côtes du Rhône Villages Signargues, une AOP relativement récente (2005). Composé quasi à parts égales de syrah et de grenache, Notre Passion est la toute belle surprise d’octobre. C’est fin, bien équilibré et long en bouche avec des notes de fruits rouges bien mûrs. Font du Vent Notre Passion est disponible chez Cora et sur corawine.be au prix de 7,45 euros (jusqu’au 30 octobre).

Il a du coeur, ce Romanin

Le marché de Saint-Rémy-de-Provence et la chapelle Saint-Sixte d’Eygalières sont des incontournables des vacances en Provence. Entre les deux, se dressent les ruines d’un vieux château du 13e siècle, célèbre autrefois pour ses ” cours d’amour “, des jeux courtois médiévaux : le château Romanin. En 1988, le domaine est devenu viticole avec un premier millésime sorti en 1990. Conduit en biodynamie, le château Romanin appartient depuis 10 ans à Anne-Marie et Jean-Louis Chamolüe, les anciens propriétaires du Château Montrose, 2e grand cru classé de saint-estèphe. Ils ont restructuré le domaine et instauré, dans l’étonnant chai-cathédrale enterré, une vinification parcellaire pour obtenir des vins plus précis et des assemblages plus pertinents. Le résultat est remarquable. Le Château Romanin en AOP Les Baux-de-Provence est un maître-achat dans ses trois couleurs. On avoue un gros faible pour la cuvée Le Coeur 2012, issue d’une parcelle emblématique du domaine. Il est précis, poivré et avec belle pureté de fruits. Le domaine commercialise aussi des cuvées Romanin, plus légères et plus fraîches, en IGP Alpilles. L’ensemble de la gamme dont les AOP Les Baux-de-Provence et Le Coeur (74 euros) sont disponibles auprès de Click Organic, l’importateur belge (09/371 46 70). Enfin, certains vins du domaine peuvent être achetés dans les magasins Sequoia et Biocaps mais aussi chez Vert de Terre (Gembloux – 081/61 59 00) et Label Green (Ixelles – 02/344 06 40).

Un vin de soif et de plaisir

Depuis la fin du 19e siècle, la famille Hubert préside aux destinées du Château Pey- Bonhomme-Les-Tours en AOP Blaye-Côtes de Bordeaux. Un domaine bien connu des Belges puisqu’il est présent à la carte de très nombreux restaurants. En 1997, la famille a acheté le Château La Grolet, un côtes de bourg. Les deux domaines sont conduits, depuis l’an 2000, en agriculture certifiée en bio et en biodynamie sous le label Demeter. Aujourd’hui, à la tête du domaine, Rachel et Guillaume Hubert poursuivent ce travail de respect du terroir, tout en innovant dans les cuvées proposées. Comme un étonnant Atypic de Peybonhomme, un assemblage à parts égales de cabernet franc et de malbec. Un vin particulier à découvrir. Tout aussi spécial est cet hommage au merlot appelé… Les Vacances de Monsieur Merlot. Une espèce d’Hôtel de la Plage mais pas de Jacques Tati sur une étonnante étiquette au charme désuet. Il n’y a rien de désuet, par contre, dans la bouteille. Voilà un 100 % merlot qui décoiffe. Un vrai glouglou de potes, gourmand et gouleyant que la famille a déclaré en Vin de France. A découvrir chez Velu Vins (02/ 520 60 68) au prix de 10,20 euros.

Une pépite du Piémont cévenol

D’Anduze à Quissac en passant par la pittoresque Sauve, le Piémont cévenol est une région à la beauté sauvage particulièrement prisée des Belges. A quasi égale distance de Montpellier et de Nîmes, se trouvent des domaines viticoles peu connus mais d’une rare qualité. Tel ce domaine d’Aigues Belles (Brouzet-les-Quissac) ramené à la vie en 2000 par Gilles Palatan. Avec ses neveux, il a restructuré les vignes, réhabilité la vieille cave et gardé les raisins qui partaient auparavant en coopérative. Le domaine d’Aigues Belles produit des vins en IGP Pays d’Oc pour garder libre choix dans ses assemblages. D’année en année, les vins s’améliorent et font sans doute aucun la course en tête dans l’appellation. Nous avons adoré la Cuvée Lombarde issue des vieilles vignes du domaine. C’est beau, pur et fin et avec une jolie trame tannique. C’est sans doute le vin le plus charmeur du domaine. La Lombarde est disponible chez Vincent Damien, dénicheur infatigable de pépites, aux Fruits de la Passion à Thorembais-les-Béguines (010/88 08 06). Le millésime 2014 (11,70 euros) est quasiment épuisé au moment d’écrire ses lignes (quatre cartons) mais le 2015, encore meilleur, arrive dans les prochains jours.

Du vin depuis 27 générations

A mi-chemin entre Perpignan et Argelès-sur-Mer, se dresse fièrement depuis le 12e siècle le Château de Corneilla. La famille Jonquères d’Oriola y produit du vin depuis 1485. Aujourd’hui, William a repris le flambeau en tant que représentant de la 27e génération. Fort d’un tour du monde de la viticulture et de la gestion du froid dans les fermentations dont son papa était le précurseur dans la région, il a entrepris de repositionner le vignoble familial. Ainsi, pour rendre ses rosés et blancs plus accessibles, il a choisi de leur faire subir une fermentation malo-lactique tout en amenant de la fraîcheur autrement notamment en vendangeant de 3 h à 9 h du matin. La gamme des vins Jonquères d’Oriola contient de belles choses mais nous avouons un gros penchant pour le Cavalcade rouge, dont le 2015 a été récemment coté à 90 par le guide Parker. C’est un AOP Côtes du Roussillon Villages Les Aspres, le dernier cru communal reconnu. C’est un vin atypique issu de parcelles situées à 120 m d’altitude mais seulement à 8 km de la mer. Il est concentré mais très frais. Cela fleure bon les fruits rouges et les épices. Le Cavalcade rouge en version 2014 (et bientôt 2015) est disponible dans tous les magasins Comptoir des vins (067/22 25 19), chez Vinathtitude à Ath (0476/59 09 21), chez Maga-Vins à Charleroi (071/37 25 30) et chez Divine Wines à Rhode-Saint-Genèse (02/771 88 47). Enfin, les vins de William Jonquères d’Oriola sont aussi à déguster (et à emporter) à la Trinquette à Saint-Gilles (02/537 94 59).

C’est beau mais surtout, c’est bon !

La route escarpée qui mène de Collioure à Banyuls-sur-Mer débouche sur des paysages magnifiques. L’Anse de Paulilles, classé Grand Site de France, est de ceux-là. Il fait bon s’y baigner ou rêvasser sur la petite plage. Les vignobles Cazes y possèdent le domaine Les Clos de Paulilles, une vaste étendue de 90 hectares de vallons et de terrasses de schistes s’ouvrant sur la mer. Soixante hectares sont plantés de vignes et Cazes y possède aussi un magasin, une cave de dégustation et un restaurant. L’endroit est idyllique. Et les vins sont à la hauteur de la beauté du site. Notamment les cuvées Cap Béar, le meilleur de la production, qui, malheureusement, ne sont pas encore disponibles chez nous. Les Clos de Paulilles rouge, blanc et rosé en AOP Collioure valent tout autant le déplacement. Trois valeurs sûres à prix doux pour découvrir une appellation peu travaillée chez nous. A tort. Elles sont disponibles chez Wijnen De Clerck à Courtrai (056/35 65 11). Livraison dans toute la Belgique.

XAVIER BEGHIN

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