La plateforme d’économie collaborative Listminut évolue et lève 850.000 euros

© ERSAN MEMIC

La jeune pousse de mise en contact entre internautes et prestataires de service vient discrètement de lever 850.000 euros. Une bonne nouvelle pour Listminut qui s’entoure de nouveaux investisseurs l’aidant à renforcer son “business model”. Zoom sur les principaux chantiers de la start-up.

Certains observateurs dubitatifs ne lui laissaient plus que quelques semaines. Pourtant, la start-up Listminut, plateforme d’économie collaborative permettant aux internautes de trouver des prestataires pour tous types de jobs (bricolage, jardinage, plomberie, etc.), est à nouveau parvenue à séduire des investisseurs. La jeune pousse a, en effet, trouvé 850.000 nouveaux euros auprès de deux duos d’entrepreneurs belges actifs dans la tech et du fonds wallon W.IN.G, qui remet symboliquement 50.000 euros pour soutenir son précédent investissement dans Listminut. Un montant qui s’ajoute à une première levée de 200.000 euros en 2014 et 300.000 en 2016 (dont 100.000 chez W.IN.G).

A la base, les cofondateurs espéraient réaliser une levée de fonds bien plus importante. ” Nous sommes partis dans l’idée de trouver 2 millions d’euros, avoue Jonathan Schockaert, CEO de Listminut. Mais nous nous sommes rapidement rendu compte que c’était trop. Nous nous sommes vus plus beaux que nous le sommes : nous n’étions pas prêts pour un tel montant. Nos metrics aujourd’hui ne nous permettent pas de séduire, à ce stade, les nombreux venture capital (VC) que l’on a contactés. ” C’est que la jeune firme s’est adressée à pas moins de 170 fonds en Europe. Avec quelques marques d’intérêt dont peu toutefois ont mené à une term sheet ou un investissement, même si une discussion était allée assez loin. Pourtant, la croissance du business est bel et bien au rendez-vous : actuellement plus d’un millier de prestataires réguliers sont inscrits sur la plateforme. Et ” plusieurs centaines ” de services sont rendus mensuellement au travers de Listminut. Mais pas encore assez pour séduire les gros fonds de venture capital.

Améliorer la qualité des prestataires

Du coup, les fondateurs se sont tournés vers les business angels. ” Depuis le début de nos discussions, nos investisseurs nous challengent énormément et nous aident à faire progresser notre business model et nos objectifs “, se réjouit Jonathan Schockaert. Et, forte de 850.000 euros frais, Listminut nourrit la ferme ambition de continuer son développement et de renforcer son business model, en Belgique avant tout. Du coup, elle met en pause le service parisien qu’elle a lancé voici quelques mois. Reculer pour mieux sauter en quelque sorte. Car Listminut travaille actuellement sur plusieurs gros chantiers qui doivent lui permettre de renforcer son modèle pour en faire un business robuste et stable avant de le dupliquer dans d’autres villes et pays.

D’abord, la start-up déploie de vrais efforts pour améliorer sans cesse la qualité de ses prestataires. Bien sûr, Listminut s’adresse à tout particulier qui décide de proposer ses services. Mais les prestataires trop occasionnels ne se révèlent pas très intéressants pour la jeune pousse qui leur consacre du temps et de l’énergie. Du coup, elle veille à ne placer ses efforts que dans les plus motivés et les plus qualitatifs. Ainsi, elle a commencé, l’an passé déjà, à rencontrer systématiquement tous les candidats prestataires à Bruxelles. De sorte à les ” trier ” et les responsabiliser. Et l’équipe de Listminut les encourage à réaliser des services. Notamment en les incitant à obtenir rapidement (en 15 jours) leurs trois premières évaluations de clients satisfaits. Cela lui permet de repérer les plus réguliers qui sont ensuite chouchoutés par Listminut afin qu’ils améliorent la qualité du service. La start-up crée d’ailleurs une véritable communauté de prestataires en organisant, par exemple, des drinks dans les bureaux, etc. Et visiblement, cela fonctionne. ” La rencontre avec les prestataires a changé notre business, admet le jeune CEO. Nous enregistrons de meilleurs taux de conversion (demandes de service qui se soldent effectivement par une prestation, Ndlr) et les prestataires deviennent de plus en plus réguliers. Et cela permet de veiller à ce que 85 à 90 % des demandes d’internautes à Bruxelles reçoivent des offres, en quelques heures seulement, de la part de nos prestataires. ” Listminut se montre aussi plus strict envers ceux qui proposent leurs services, et n’hésite pas à mettre un terme à la collaboration avec ceux qui n’assurent pas un bon service. ” Cela crée énormément de valeur parce que nous augmentons les chances d’offrir une bonne expérience au client “, souligne-t-on au sein de la jeune entreprise de six personnes (bientôt huit). Elle a d’ailleurs développé un système interne d’alerte qui lui permet d’être vigilante par rapport au comportement des prestataires. Ainsi, si une personne qui donne des cours particuliers les multiplie mais ne retourne jamais chez le même client, ” c’est qu’il y a probablement un problème puisqu’on constate qu’en général, les profs de cours particuliers travaillent plusieurs fois avec le même élève “.

La plateforme d'économie collaborative Listminut évolue et lève 850.000 euros
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Doper la récurrence des transactions

L’autre gros défi de Listminut se situe, comme pour beaucoup d’entreprises d’ailleurs, au niveau de l’augmentation de ses revenus. Il s’agit notamment de doper la récurrence. Beaucoup de clients cherchent un prestataire pour une ou deux missions seulement. D’ailleurs, la moyenne des transactions par client se situe entre deux et trois par an. Aussi, la plateforme s’est enrichie d’un système d’abonnement. Idéal pour les femmes de ménage, les jardiniers ou les cours particuliers qui peuvent se réaliser à fréquence régulière. Plus besoin de poster de demande pour faire appel systématiquement au même jardinier. Et moins de risque de voir la relation client-prestataire se dérouler en dehors du système : les transactions s’enclenchent automatiquement au travers de Listminut. Il n’y a plus qu’à confirmer. Ce n’est pas tout : la plateforme suggère aussi des prestataires ” utiles à proximité “. Comme ” trouver un super plombier pour un entretien de chaudière “. De plus, la loi De Croo qui permet aux prestataires de gagner 5.100 euros par an – taxables à hauteur de 10 % – encourage la récurrence, constate la start-up. Les prestataires qui ne veulent pas travailler en noir trouvent un avantage à le faire sous le statut de l’économie collaborative, et donc de cette loi, plutôt qu’en tant qu’indépendant, statut plus lourdement taxé. Jusqu’au plafond de 5.100 euros, bien sûr.

Autre dernière grosse mission de Listminut : affiner le recrutement des clients. Aujourd’hui, 90 % se font par le bouche- à-oreille et par le référencement naturel sur Google (c’est-à-dire l’apparition dans les résultats de recherche, sans devoir acheter de mot-clé). Les 10 % restants, la jeune pousse les attire grâce à la publicité en ligne… mais ne parvient pas encore bien à correctement rentabiliser ces clients qu’elle conquiert en ouvrant son portefeuille. Autrement dit, ils lui coûtent encore de l’argent. La start-up affine l’achat de mots-clés pour améliorer le recrutement des clients.

Vingt villes dans cinq ans ?

Toutes ces améliorations devraient permettre à Listminut de trouver son rythme de croisière. La nouvelle levée de fonds lui laisse pas mal de temps devant elle (entre 1,5 et 2 ans). Son premier but consiste à montrer qu’une ville comme Bruxelles peut être ” rentable “, c’est-à-dire qu’il y a moyen de couvrir les frais opérationnels et marketing. En parallèle, la plateforme devrait ouvrir ses activités dans toute une série d’autres grosses villes belges, c’est-à-dire y dédier plusieurs membres de son personnel. Car aujourd’hui, bien sûr, clients et prestataires peuvent s’inscrire dans n’importe quelle ville ou village belge. Mais les efforts des équipes de la start-up se concentrent essentiellement dans la capitale pour l’instant. Ensuite, Jonathan Schockaert voit Listminut se redéployer à l’étranger, la France en tête. ” Notre objectif est clairement ambitieux, affirme le jeune patron. Nous gardons, en effet, une ambition européenne et nous nous voyons, à horizon de cinq ans, dans une vingtaine de villes en Europe. ”

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