Ces entreprises de leasing qui ont recours aux start-up pour relever le défi multimodal

Vélos partagés Le transport multimodal est l'avenir des entreprises. © BELGAIMAGE

Les entreprises de leasing automobile se pressent pour proposer des services de multimodalité et ainsi encourager les transports alternatifs auprès des utilisateurs de voitures de société. Pour ce faire, elles recourent à des start-up.

L’arrivée du budget mobilité a poussé les entreprises de leasing à ne plus se limiter à une offre de voitures de société. Cette dernière restera toutefois longtemps l’essentiel de l’activité des grands acteurs comme LeasePlan ou ALD. Cependant, ces derniers alignent aussi des services supplémentaires. Il y a d’abord la location de vélos, parfois électriques, qui complète l’offre de leasing de voitures.

Il y a surtout les offres de multimodalité. L’idée est simple, mais compliquée à mettre en oeuvre : pousser les clients à utiliser les moyens de déplacement qui conviennent à chaque trajet. C’est parfois la voiture individuelle ou partagée, le métro, le bus, le train, ou une combinaison de ces moyens de transport.

Le défi, pour les entreprises qui prennent en charge la mobilité de leur personnel, est d’offrir un service multimodal aussi simple et pratique que la voiture de société, avec une application proposant le moyen optimal pour chaque déplacement et un mécanisme de paiement aisé pour toutes les mobilités proposées.

Les nouveaux professionnels de la mobilité

Pour y répondre, plusieurs nouveaux acteurs sont apparus ces dernières années. En général, les sociétés de leasing ne développent pas elles-mêmes une offre de service multimodal. Elles confient ce travail à ces nouveaux professionnels de la mobilité, des start-up fondées pour répondre à ce type de besoin, dans un marché qui a déjà ses initiales : MaaS ( mobility as a service).

Ces nouveaux acteurs sont souvent partenaires de sociétés de leasing, qui sont des canaux privilégiés de distribution. Mais elles s’adressent aussi directement aux entreprises. Leur service est basé généralement sur une application de smartphone, qui va aider les utilisateurs à choisir leur mode de transport et parfois en assurer le paiement, directement sur l’appli ou via une carte. Ainsi, Belfius Auto Lease et ALD travaillent avec Olympus Mobility, tandis qu’Athlon et Alphabet recourent à XXImo. Le groupe Octa+ (stations services et énergie) a lancé Modalizy et s’adresse directement aux entreprises.

Voitures partagées Le transport multimodal est l'avenir des entreprises.
Voitures partagées Le transport multimodal est l’avenir des entreprises.© BELGAIMAGE

Des logiques différentes

Ces plateformes ne suivent pas toutes la même logique. Certaines sont basées sur des cartes de paiement, comme XXImo et Modalizy, la première avec Visa, la seconde avec MasterCard, et mettent l’accent sur l’avantage administratif et fiscal pour l’entreprise.

Premiers arrivés, XXImo et Olympus Mobility ont touché l’essentiel du marché du leasing. XXImo a été lancée en 2011 aux Pays-Bas, puis en 2013 en Belgique, et rachetée en 2016 par Sodexo. La start-up propose une carte Visa limitée à une série de services choisis par l’entreprise. Elle comprend un forfait de carburant et peut aussi compter, selon les options prises, la recharge de voiture électrique, les transports en commun, les parkings et les péages. Elle peut également inclure des frais de voyage à l’étranger (hôtels, billets de train et d’avion, location de voitures). XXImo a une approche internationale et met en avant la faculté de récupérer la TVA sur les frais hors des frontières.

Olympus Mobility

Les services d'Olympus Mobility sont commercialisés via des entreprises de leasing, qui n'indiquent pas toujours explicitement le nom de la plateforme.
Les services d’Olympus Mobility sont commercialisés via des entreprises de leasing, qui n’indiquent pas toujours explicitement le nom de la plateforme.© PG

Provenant du monde de la mobilité, Olympus Mobility est une spin-off de la SNCB. Elle est dirigée par Koen Van de Putte, un ancien des chemins de fer, qui avait lancé la vente des tickets de la SNCB sur Internet en 2004. Il avait, du reste, remporté un ICT Trends Awards, une récompense attribuée par Trends- Tendances aux meilleurs projets d’e-business. Olympus Mobility est un projet né en 2012 d’une initiative de la SNCB (Olympus, un living lab financé par le gouvernement flamand), en partenariat avec Belfius Auto Lease et Engie (Electrabel). ” Nous faisions partie d’un projet centré sur la voiture électrique “, précise Koen Van de Putte. L’idée était de créer un paquet avec une voiture électrique et l’accès à des transports en commun.

L’insuccès du démarrage de la voiture électrique a poussé à recentrer le projet sur la seule multimodalité, articulée autour d’une application et de la carte Mobib. En 2015, la SNCB s’est désengagée du projet et une société a été fondée avec pour actionnaires Taxistop, Cambio et le VAB. Les services d’Olympus s’appuient sur la combinaison de l’utilisation de la voiture de société et des transports en commun, l’accès aux parkings de la SNCB, l’utilisation des vélos partagés Blue-Bikes , et des voitures partagées Cambio. Du projet de départ, elle n’a gardé que la seule recharge de voitures électriques aux gares.

Les utilisateurs accèdent aux services via une application et utilisent, dans certains cas, une carte Mobib pour s’identifier et ” pour accéder, par exemple, aux parkings de la SNCB “, explique Koen Van de Putte. L’application permet d’acheter des tickets de train ou de bus De Lijn. Elle utilise aussi le service Moovit pour aider l’utilisateur à trouver les moyens de transport optimaux pour arriver à sa destination.

Les services d’Olympus Mobility sont commercialisés via des entreprises de leasing. Une offre directe aux entreprises est proposée via le site Artemis Mobility.

Les sociétés de leasing proposant ce service y ajoutent parfois des éléments comme la location court terme de voitures, comme le fait Belfius Auto Lease. Chaque loueur a sa stratégie. Belfius, par exemple, ne lie pas les contrats du service Olympus à une voiture de société. ” Un client peut très bien ne prendre que le service multimodal, un vélo et pas d’auto “, indique Thierry Goset, directeur de la mobilité à Belfius Auto Lease. Il va donc falloir s’attendre à des configurations très variées.

Modalizy, le petit dernier

Koen Van de Putte, directeur général d'Olympus Mobility.
Koen Van de Putte, directeur général d’Olympus Mobility.© PG

Lancée l’an passé, Modalizy a été créée par le groupe Octa+, qui cherche à se diversifier hors de la distribution de carburants et d’énergie. Elle est centrée sur la Belgique et propose de gérer les paiements pour l’achat de tickets de transports en commun (Stib, SNCB, Tec et De Lijn) et de vélos partagés Villo à Bruxelles. La carte de base ne contient pas de service carburant, et est en fait une carte MasterCard limitée aux services de mobilité. Modalizy propose une carte carburant en sus (70 % des clients décident d’y recourir).

Arrivée tardivement, Modalizy n’a pas pu devenir partenaire d’une société de leasing automobile, puisque le marché était déjà pris par XXImo et Olympus Mobility. Elle vise donc directement les entreprises. Elle est tout de même parvenue à signer avec Europcar, loueur de voitures. ” C’est un accord important qui va nous donner de la visibilité , explique Alain Allyn, business development manager de Modalizy. Europcar est un des loueurs le plus avancés dans les offres de mobilité alternative. ”

L’approche carte de paiement

En apparence, le catalogue des services de XXImo ou Modalizy est très large, celui d’Olympus Mobility plus limité. Les deux premières étant des cartes de paiement, il y a donc moyen de profiter de tout ce qu’une telle carte peut acheter comme services de mobilité. Mais tous ces services ne sont pas accessibles de la même manière. Pour obtenir une facturation détaillée, qui permet de déduire la TVA ou d’éviter les formalités d’inscription à certains opérateurs, le service multimodale doit avoir un accord avec le fournisseur de transport (ou de parkings), ce qui n’est pas toujours le cas pour les cartes de paiement de mobilité. Ainsi, pour le moment, seul Olympus a un contrat avec la SNCB, mais cette situation devrait changer.

Olympus a fait le choix de ne pas inclure un schéma de paiement (tel que MasterCard ou Visa, par exemple, Ndlr), ce qui limite les services à ceux qui font l’objet d’un accord avec les prestataires. ” Nous avons mis la priorité sur la convivialité pour l’utilisateur final, alors que d’autres approches misent sur la convivialité pour l’entreprise “, explique Koen Van de Putte. Ainsi, le titulaire d’un compte Olympus ne doit pas s’inscrire à Cambio ou à Blue-Bikes pour bénéficier de voitures ou de vélos partagés. C’est inclus dans le bouquet de services proposés. Un bouquet qui est appelé à s’étendre. DriveNow (voitures partagées à Bruxelles) a demandé à s’intégrer dans le service, ce qui devrait se faire. Olympus va également ajouter le stationnement sur la voie publique (déjà pratiqué par XXImo) et va intégrer le service de covoiturage de Taxistop.

Olympus a aussi participé à un concours destiné aux entreprises à Anvers. Objectif : encourager les salariés à éviter l’heure de pointe ( spitsmijden project). Plus de 200 entreprises s’étaient inscrites à la dernière session de ce concours, leurs salariés y participaient en utilisant l’application Olympus pour détecter le moyen de transport à utiliser (auto, vélo, transports en commun). Ceux qui contribuaient à limiter les embouteillages gagnaient des bons d’achat numériques pour des lunchs. Cette opération n’était pas liée au bénéfice d’une voiture de société.

Ces entreprises de leasing qui ont recours aux start-up pour relever le défi multimodal

Marché balbutiant

Ce marché de la mobilité as a service (MaaS) en est encore à ses balbutiements. Il ne représente que quelques pour cent des utilisateurs de voitures en leasing et cherche son business model. ” La difficulté, me semble-t-il, est de rentabiliser ce genre de service “, avance un expert du monde de l’automobile. Les sociétés de leasing peuvent se le permettre car c’est un élément concurrentiel, un service pour inciter une entreprise à s’intéresser à son offre automobile, mais le volume manque encore. Il s’agit d’un service essentiellement B to B.

Proposer ces services directement au particulier, en B to C, paraît problématique. Il n’y a pas encore vraiment d’offre de service multimodal, de MaaS pour le grand public, les start-up misant plutôt sur les entreprises. Pour toucher les particuliers, il faudrait faire accepter le paiement de la plateforme multimodale utilisée en plus du coût des transports, des prestations de mobilité. Pas sûr qu’ils acceptent.

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