La start-up belge Cowboy a levé 2,4 millions et lance son vélo

Adrien Roose, Tanguy Goretti et Karim Slaoui. © belgaimage

Anciens fondateurs des start-up Take Eat Easy et Djump, le trio d’entrepreneurs bruxellois composé d’Adrien Roose, Karim Slaoui et Tanguy Goretti revient sur le devant de la scène. Ils officialisent une levée de fonds à plus de 2 millions d’euros et commercialisent, dès ce jeudi, leur vélo Cowboy, un deux-roues électrique d’un nouveau genre. Et s’attaquent à d’ambitieux nouveaux défis.

Il aura fallu attendre quatre mois avant que l’information ne soit communiquée. Quatre mois pendant lesquels les responsables de Cowboy ont fait ce qu’ils ont pu pour éviter toute fuite. Pourtant c’est bien en décembre que la jeune start-up belge Cowboy a finalisé sa levée de fonds à 2,4 millions d’euros auprès d’investisseurs de renom, parmi lesquels le célèbre fonds Index Ventures (Facebook, Deliveroo, Slack, BlaBlaCar, etc.), Kima Ventures (le fonds financé par Xavier Niel) et le fonds français Hardware Club. La jeune pousse aime canaliser les informations et voulait que l’annonce de cette levée de fonds de taille profite au lancement de son produit.

C’est donc à quelques jours du lancement de son vélo électrique qu’Adrien Roose, Tanguy Goretti et Karim Slaoui, les trois fondateurs de Cowboy, sortent de leur silence. Il faut dire que les trois entrepreneurs s’étaient montrés assez discrets ces derniers temps. D’une part, pour se concentrer sur la mise au point de leur produit (un processus long de 18 mois). Et d’autre part, pour quitter le feu des projecteurs sous lesquels la faillite de Take Eat Easy, médiatique start-up de livraison de repas, avait placé deux d’entre eux pendant l’été 2016 et le fait encore de temps à autre, en France notamment.

Désormais, les trois jeunes reviennent sur le devant de la scène. Et l’annonce de cette levée de fonds au moment même où ils vont dévoiler au grand public leur vélo électrique ” intelligent ” va permettre à Cowboy d’intégrer rapidement la liste des start-up belges les plus en vue. Car le projet du trio d’entrepreneurs bruxellois ne manque pas d’ambition et pourrait bien révolutionner l’univers du vélo électrique. Avec leur regard extérieur à l’industrie du deux-roues, ils se sont en effet attachés à développer un vélo qui bouleverse les codes classiques du secteur.

Leur Cowboy aligne une série de fonctionnalités novatrices. Ainsi, le vélo s’intègre dans un univers véritablement numérique et est véritablement couplé à son application mobile : impossible, par exemple, de démarrer le vélo sans l’actionner sur son smartphone. Il s’agit d’une clé numérique. Idéal contre les vols : ” Le vélo devient totalement inutilisable si quelqu’un s’en empare sans disposer de l’accès à l’application “. Par ailleurs, le cycle est agrémenté d’un système intelligent d’assistance moteur : grâce à une série de capteurs, il s’adapte au rythme auquel l’utilisateur pédale. Et une série de fonctionnalités pourront être ajoutées au vélo par la simple mise à jour, à distance, que pourra faire la start-up. Des possibilités qui ne sont pas sans rappeler la marque de voiture électrique Tesla. Car Cowboy ne veut pas simplement ” vendre un vélo ” : elle tient à embarquer ses clients dans un univers et à leur proposer un service bien spécifique. Avec l’objectif de séduire les jeunes urbains (25-45 ans) qui ne s’intéressaient pas forcément au vélo électrique jusque-là.

Cowboy a fait le choix de dépenser pas mal d’argent pour développer un maximum d’éléments elle-même.

Remonter la chaîne de valeur

La firme installée à quelques dizaines de mètres du palais de justice de Bruxelles mise sur un prix attractif pour un vélo de cette qualité-là : 1.799 euros, alors que ” le prix moyen d’un vélo électrique tourne autour de 2.200 euros “, précisent les entrepreneurs de Cowboy. Cette proposition, la start-up y est arrivée après plus d’un an et demi de développement. Dès l’automne 2016, l’équipe fondatrice a commencé à analyser le marché et identifier le créneau dans lequel elle veut se lancer. Elle a aussi élaboré les caractéristiques du produit qu’elle voulait développer pour se différencier de tous les autres connus sur le marché.

Le gros pari des fondateurs pour y arriver ? La jeune pousse veut remonter dans la chaîne de valeur du produit. ” La plupart des vélos électriques utilisent un kit électrique mis en place et commercialisé par de grands acteurs comme Bosch, explique Tanguy Goretti. Mais nous ne voulons pas dépendre de sous-traitants comme eux et nous voulons proposer un produit à forte valeur différenciante. Aussi, nous avons développé une batterie sur mesure, une carte électronique sur laquelle la plupart des éléments du vélo se connectent ainsi qu’une application mobile qui sert d’écran pour le vélo. On a fait le calcul qu’à terme, ce sera plus intéressant financièrement pour nous. ”

La start-up belge Cowboy a levé 2,4 millions et lance son vélo
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Les ” kits ” des grands constructeurs peuvent s’acheter entre 700 et 1.000 euros. Mais Cowboy a fait le choix de dépenser pas mal d’argent pour développer un maximum d’éléments elle-même. ” Cela coûte évidemment plus cher au début puisqu’il y a des coûts d’investissement et de développement importants pour la mise au point, enchaîne Tanguy Goretti. Mais à terme, cela devrait nous permettre de faire la différence avec les autres acteurs et nous devrions être gagnants. ”

Les fondateurs ont également réalisé le design du cadre et d’une série d’autres pièces mécaniques. Un sacré défi pour des entrepreneurs plutôt issus du monde du software. Mais l’équipe s’est entourée d’experts en électronique et en design et est aussi allée à la rencontre des acteurs du secteur, un peu partout dans le monde : Canada, Pologne, Suède, Chine, France, etc. Adrien Roose, Karim Slaoui et Tanguy Goretti ont d’ailleurs passé ces derniers mois de nombreuses semaines à l’étranger, en Chine notamment. Pour rencontrer les producteurs de pièces et les sélectionner. Ce temps pour le développement, Cowboy l’a financé grâce à une première levée de fonds de 700.000 euros, réalisée auprès de business angels dès mars 2017, soit très rapidement après la création de l’entreprise.

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Primé deux fois avant sa sortie

Parmi les investisseurs de la première heure, on retrouve notamment Thibaud Elzière, entrepreneur à l’origine de Fotolia et fondateur du start-up studio à succès eFounders. ” Quand les fondateurs de Cowboy sont venus me trouver avec leur idée, j’ai rapidement été emballé, se souvient-il. A l’époque, ils n’avaient encore rien développé mais leur concept avait beaucoup de sens alors que le vélo électrique connaît une belle croissance. Dans leur projet, il y avait plusieurs défis. Ils allaient devoir créer une marque, un produit et du logiciel. Je n’avais pas beaucoup de doute quant à leur capacité à lancer une marque et à développer du software. Ils l’avaient déjà fait. Restait le produit lui-même, où j’attendais de voir leur manière d’avancer. Et j’avoue que je suis épaté : en 18 mois, ils sont parvenus à mettre au point un vélo qualitativement au-dessus de tout ce qui se fait. ” D’ailleurs, avant même qu’il ne soit proposé à la vente, le Cowboy a déjà reçu deux prix : le premier au salon Eurobike, à l’été 2017, et le second en mars 2018, le Red Dot Award, qui récompense le design.

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Une autre grande spécificité de Cowboy, au-delà du produit lui-même, résidera dans son mode de distribution. La seule manière d’acheter le vélo sera de le commander par Internet. ” Nous avons décidé de court-circuiter les distributeurs et les revendeurs, admet Adrien Roose, le CEO, avec comme objectif de diminuer au maximum les frais et de pouvoir diminuer le prix du vélo pour le consommateur. ”

A l’essai

L’e-commerce est de plus en plus entré dans les moeurs, mais les clients sont-ils prêts à acheter un vélo sur ses seules photos et caractéristiques mises en ligne ? Cowboy ne serait pas la seule marque de vélo à vendre son deux-roues via le Web et les fondateurs savent que cela peut-être un frein pour certains. Voilà pourquoi ils proposeront des essais à la demande. Un vélo sera amené au domicile des internautes qui pourront l’essayer avant de, peut-être, l’adopter. Une sacrée organisation qui représentera un coût. Mais l’expérience de l’équipe au niveau de la logistique au travers de Take Eat Easy et Djump devrait, selon les trois entrepreneurs, être un atout pour mettre un tel système en place. De même que pour développer le service après-vente.

Sur demande, un vélo sera amené au domicile des internautes qui pourront l’esayer avant de, peut-être, l’adopter.

Comment, en effet, gérer les soucis éventuels que les clients pourraient rencontrer avec le vélo ? ” Quand il s’agira de pièces standards sous garantie, nous enverront les clients chez les réparateurs de vélos, répond Adrien Roose, et nous leur rembourserons la facture. ” Quant aux problèmes plus sérieux touchant aux composantes créées par Cowboy, la start-up envisage d’envoyer la batterie par correspondance ou, dans les cas plus compliqués, d’aller chez le client faire la réparation. ” Voici pourquoi nous commençons par le marché belge “, insiste Adrien Roose. La firme veut faire ses armes ici, bétonner son process et sa logistique dans le pays avant de s’aventurer sur d’autres marchés.

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L’enjeu ? Assurer la cadence

Car l’ambition des trois jeunes dirigeants de Cowboy est grande : ils se voient, bien sûr, à l’international. Et particulièrement en Europe, dans les pays environnants (Allemagne, Pays-Bas en tête) qui représentent un marché ” plus important que les Etats-Unis “. Voilà probablement le plus gros défi qu’aura à relever la firme bruxelloise. ” L’enjeu sera d’être bons pour être à l’échelle et assurer la cadence d’un très grand nombre de commandes dans différents pays, intervient Thibaud Elzière. Dans ce type d’activité, cela peut se révéler hyper complexe. ”

Même une société très capitalisée comme Tesla peine, en ce moment, à passer à la vitesse supérieure dans la production et la livraison de son modèle ” bon marché “, Model 3. Cowboy n’a bien sûr pas la même envergure que Tesla. Mais la start-up belge fait fabriquer aussi sur mesure différentes pièces à différents endroits du monde avant d’assembler le produit. Elle devra pouvoir piloter correctement l’ensemble de ses sous-traitants pour que l’approvisionnement et l’assemblage se déroulent sans interruption, de sorte à pouvoir acheminer les vélos dans les temps chez les clients… peu importe le pays où ils se trouveront.

Reste que, à en croire Thibaud Elzière, l’expérience acquise par les trois fondateurs dans leurs différentes start-up précédentes (Take Eat Easy, Menu Next Door et Djump) représente un atout majeur dans le projet : ” Outre leur capacité à prendre des risques pour parvenir à quelque chose de grand, argumente-t-il, les fondateurs ont appris à scaler leur business et à lever de l’argent “. Take Eat Easy avait, il est vrai, grimpé, en une bonne année, de 10 à 160 personnes et s’était installée dans pas moins d’une vingtaine de villes. Et avait attiré 16 millions d’euros de capital…

La start-up belge Cowboy a levé 2,4 millions et lance son vélo
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Dans le cas de Cowboy, le modèle ne devrait toutefois pas nécessiter de telles levées de fonds, bien que la jeune pousse ait rapidement réussi à attirer de beaux investisseurs, parmi lesquel Index Ventures, Kima Ventures, Hardware Club, Thibaud Elzière, Bertrand Jelensperger (LaFourchette), Harold Mechelynck (Ogone), Frederic Potter (Netatmo), Francis Nappez (BlaBlaCar).

Solutions de mobilité urbaine

” Les start-up comme Djump et Take Eat Easy évoluaient sur un marché spécifique où le gagnant l’emporte (” Winner takes it al l”, Ndlr), analyse Adrien Roose. Il y avait dans ces business une dynamique de réseau qui pousse à devenir très vite très gros. Cowboy va évoluer dans un business plus classique et un marché plus fragmenté où, bien sûr, joue l’économie d’échelle mais pas de réseau. Nous ne nous engageons donc pas dans une course de vie ou de mort pour devenir et rester numéro un. ” Et de préciser que le développement de l’entreprise devrait se faire en bonne partie sur ses ventes. ” La volonté, ici, est d’arriver à une entreprise rentable assez rapidement car il n’y a pas de raison que cela ne soit pas le cas “, enchaîne le CEO de Cowboy.

Cela n’enlève toutefois en rien l’ambition de la start-up bruxelloise qui ne compte vraisemblablement pas se limiter à devenir une ” marque de vélos “. ” Nous nous pensons comme une entreprise qui proposera des solutions de mobilité urbaine électrique, insistent, en choeur, Adrien Roose et Tanguy Goretti. Aujourd’hui, nous sommes une société de vélos mais ce ne sera peut-être pas toujours le cas “. Reste que, pour l’instant, Cowboy entend se concentrer à 100 % sur la commercialisation de son (unique) modèle de vélo électrique avant d’envisager d’autres produits et d’autres développements.

Cowboy en six chiffres

3 fondateurs

CEO : Adrien Roose (ex-co-CEO de Take Eat Easy)

Head of Engineering : Karim Slaoui (ex-COO de Take Eat Easy)

CTO : Tanguy Goretti (CEO de Djump, head of couriers Take Eat Easy, COO de Menu Next Door)

3,1 millions d’euros

Déjà levés. D’abord 700.000 euros en mars 2017 pour soutenir l’élaboration des premiers prototypes. Puis 2,4 millions d’euros fin 2017 pour lancer la production des premières séries, soutenir le lancement et engager du personnel.

9 employés

sont inscrits sur le payroll de Cowboy actuellement.

1.790 euros

Prix auquel sera vendu le vélo.

16 kg

Le poids du vélo, batterie comprise. Cowboy se veut l’un des vélos électriques les plus légers du marché.

15 capteurs

sont embarqués dans Cowboy : GPS, accéléromètre, température, humidité, vitesse, etc.

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