Comment réussir son investissement locatif ?

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Acheter une résidence principale est facile ; faire un investissement locatif ne l’est pas. La première démarche est intuitive alors que la seconde est contre-intuitive. Faire ” comme pour soi ” est une erreur classique d’investissement.

En matière d’investissement immobilier, il ne faut pas penser confort ou coup de coeur mais bien placements et objectifs. Une autre erreur commune est de se focaliser sur le rendement alors que le risque et le taux de sérénité sont des facteurs importants. Trop souvent méconnu, l’effet de levier est un concept également intéressant pour développer son patrimoine. Commençons donc par les fondamentaux d’une bonne gestion.

Pas tous les oeufs dans le même panier

Cette sagesse populaire est toujours d’actualité. Investir tous vos avoirs dans le même sens, fort de vos succès précédents, est pourtant risqué. Si le marché change, c’est tout votre portefeuille immobilier qui en sera touché. Force est de constater que le secteur a subi de nombreuses évolutions ces dernières années : réglementation énergétique, précarité du travail et des salaires, augmentation du précompte immobilier, régionalisation des baux d’habitation, etc. Dupliquer vos expériences passées n’est pas le garant d’un futur investissement gagnant. Les actifs immobiliers ne sont pas très liquides, c’est-à-dire convertissables, en cas de problème. Mieux vaut diversifier. Vous achetez toujours dans la même commune ? Investissez dans une commune voisine. Vous croyez aux centres urbains ? Envisagez de vous en éloigner. Vous n’achetez que des studios ou des appartements deux chambres ? Dirigez-vous vers les grands appartements ou les petites maisons de rang. Sortir de votre zone de confort est désagréable mais nécessaire pour investir habilement. Plusieurs paniers immobiliers, tel doit être votre objectif.

Mettre tous ses oeufs dans le même panier est fort risqué. Un mot d’ordre : sortez de votre zone de confort et divertissez vos investissements immobiliers !

Cas vécu. Forte de ses succès locatifs précédents, Mme B. avait acheté plusieurs villas dans le Brabant wallon qu’elle louait fructueusement aux expatriés. En 2008, avec la crise, nombre d’entre eux quittèrent le pays. Mme B. se retrouva avec plusieurs villas inoccupées et dut faire face à un long et coûteux vide locatif. La revente n’était pas envisageable vu la demande affaiblie. Une diversification eut été plus sage.

Gain proportionnel au risque

Qu’à cela ne tienne, vous préférez reproduire vos succès ? Ou au contraire vous aventurer dans des zones en développement ? Gardez en tête que le gain potentiel est fonction du risque. Vous devez être prêt et capable de perdre. En immobilier, quand on gagne, comme quand on perd, les montants sont conséquents. Les investissements se font à six chiffres, les pertes facilement à cinq. Investir malin, à moins d’être fortuné, c’est avant tout protéger sa mise de départ. Souhaitez-vous placer vos capitaux en bon père de famille ou pouvez-vous vous permettre de ” jouer avec ” ?

Cas vécu. Face au développement urbain, M. L. avait acheté un immeuble de huit appartements en centre-ville. Mais l’érosion des centres urbains liée à une conjonction de facteurs (socio-économiques, politiques, de propreté, sécurité, etc.) eut raison de cet engouement. Pour raison de santé, M. L. dût revendre ses biens. Entre-temps ceux-ci avaient dévalué de 20 %, soit 35.000 euros par appartement, soit une perte totale de 280.000 euros après autant d’années d’effort de gestion locative.

Maîtrise des risques

Le risque est proportionnel au manque d’expérience et de connaissance d’un marché. Deux ou trois opérations réussies ne constituent pas en soi une expérience suffisante. Surtout si l’on considère, comme Oscar Wilde, que l’expérience est le nom que l’on donne à ses erreurs. En immobilier, la liste des complications potentielles est longue et quelques placements ne vous permettent pas de commettre assez d’erreurs que pour en tirer tous les enseignements. Vous avez le sentiment de vous y connaître parce que vous êtes à votre troisième ou cinquième transaction ? Les professionnels en sont à leur 500e ou 1.000e. Impossible de connaître et comprendre le marché comme un pro. Ne tirez pas de conclusions sur quelques acquisitions. L’analyse en est la plupart du temps erronée ou dépassée.

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Taux de sérénité

Le do-it-yourself est dans l’air du temps. Mieux servi par soi-même ? Oui mais pas pour tout le monde. En achetant dans la brique, vous vous exposez aux soucis et tracas : robinet cassé, évacuation bouchée, chaudière en panne, etc. L’énumération est interminable. Si vous êtes bricoleur et que vous avez le temps, génial. Par contre si vous devez faire appel à des corps de métier, bienvenue dans un monde à part : absence ou retard au rendez-vous, devis inexistant, surcoûts imprévisibles garantis, etc. Vos nerfs seront mis à rude épreuve. Sans parler du coût de ces réparations et du mécontentement du locataire face aux délais et nuisances. Mais l’enjeu majeur actuel n’est pas tant là que dans la qualité des nouveaux locataires : loyers et/ou charges impayé(es), dégradation, etc. De plus en plus de propriétaires se retrouvent devant le juge de paix. Stress et nervosité à la clé. A quel point avez-vous du temps et d’énergie à consacrer à cela ? Investisseur actif qui faites tout vous-même ou investisseur passif qui déléguez à des professionnels ? La question est à se poser, comme jamais auparavant.

Cas vécu. Au vu des faibles taux bancaires, M. et Mme T. achetèrent un appartement neuf à titre d’investissement. Trouver un locataire fut assez aisé mais très vite il oublia de leur transmettre son assurance locative, et ensuite de payer ses charges. De bonne composition, M. et Mme T. abordèrent ces aspects avec le locataire qui excellait dans l’art de trouver des excuses. La situation et les relations se dégradèrent au fil des mois. Ils décidèrent d’aller en justice où ils obtinrent gain de cause mais ne récupérèrent pas les sommes impayées, le locataire étant devenu entre-temps insolvable. Amers et stressés, pour ne pas dire angoissés par ces démarches juridiques, ils décidèrent de revendre l’appartement sans plus-value. Deux ans se sont passés entre l’achat et la revente. Pas de gains, beaucoup de soucis.

Cash-flow positif

Avoir un cash-flow positif – une trésorerie en boni – est fortement conseillé. La marge de liquidités entre votre loyer et les frais liés à l’investissement (crédit, précompte, assurance, réparation, chômage et dégâts locatifs, etc.) devrait être idéalement de 20 %. Ainsi, un loyer de 500 euros ou 1.000 euros ne devrait pas couvrir un crédit de plus de 400 euros ou 800 euros. Conserver votre argent, c’est pouvoir profiter de votre vie maintenant et pas dans 10 ans. C’est aussi permettre d’enchaîner d’autres investissements grâce à l’effet de levier bancaire que nous aborderons plus loin.

Exemple

Loyer mensuel hors charges : 800 euros

Mensualité de crédit : 750 euros

Charges de copropriétaire à charge du propriétaire : 50 euros

Précompte immobilier : 880 euros/12 mois = 73 euros/mois

Chômage locatif : 800 euros/12 mois = 66 euros/mois

Entretien ou réparations divers = 150 euros/12 mois = 12 euros/mois

Cash-flow mensuel = loyer – charges = 800 – (750 – 50 – 73 – 66 – 12) = – 151 euros

Vision et stratégie

” Sans objectif, c’est comme voyager sans destination. Vous n’irez jamais où vous voudrez. ” Que souhaitez-vous ? Et quel type d’investisseur êtes-vous ? Conservateur, équilibré ou spéculatif ? Zen, stressé ou angoissé ? Actif ou passif ? N’essayez pas de faire comme votre voisin mais selon votre propre personnalité. N’hésitez pas à questionner votre entourage et collègues sur leurs bonnes et mauvaises expériences immobilières. Les histoires sont riches en enseignements. Par ailleurs, toute bonne stratégie prévoit un plan B. Question de prudence. Envisagez le best case mais aussi le worst case. Que ferez-vous si vous tombez malade, que vous perdez votre emploi ou êtes amené à travailler à l’étranger ? Quelles solutions financières ou de gestion s’offrent à vous ? Votre investissement est-il suffisamment souple ou avez-vous signé un bail de trois ans qui en rend la vente plus compliquée ?

Etablissez une stratégie. Mais n’oubliez pas que toute bonne stratégie prévoit toujours un plan B.

Passage à l’action

Finalement, ce qui fait d’une personne un investisseur ou pas est plus souvent sa capacité à passer à l’action que ses moyens financiers. Il est plus facile pour quelqu’un d’entreprenant de faire le premier pas que pour quelqu’un d’analytique ou de conservateur. ” Dites-moi comment vous investissez, je vous dirai qui vous êtes. ” Le temps joue contre vous. A trop réfléchir, les affaires passent.

Sur Internet, un bien intéressant se vend en moins d’un mois. La vente se fera avec ou sans vous. D’autre part, le temps des très bonnes affaires est révolu. Nonante-quatre pour cent des transactions immobilières passent par la Toile. Et avec le Net, les vendeurs sont bien avertis des prix. Aucune raison de brader même quand on est pressé. Vous recherchez les 6 % restants ? Vingt mille agents immobiliers indépendants et salariés les voient avant vous ; sans compter les autres professionnels : promoteurs, architectes, experts, etc. Ne cherchez plus la super affaire ou la perle rare, ils l’auront trouvée avant vous. Inutile de perdre votre énergie. Visez juste le bon investissement. Celui que vous ne regretterez pas dans cinq à dix ans.

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Cas vécu. M. B. voulait investir dans l’immobilier et se constituer un patrimoine. Par manque de temps, en un an, il n’a pas lu le livre qu’une de ses amies lui avait conseillé, il n’a pas consulté son banquier, ni un courtier en crédit. Il n’a pas pris rendez-vous dans une agence. Il n’a pas acheté. Un an après, il vient encore aux conférences pour savoir comment investir. M. B. ne comprend pas que ” l’angoisse à l’achat ” est un sentiment naturel et que seules ses peurs le bloquent. Personne ne peut faire le premier pas à sa place. Dommage, car des professionnels immobiliers, financiers et autres motivés l’auraient volontiers aidé à faire le deuxième et troisième pas.

Par Evelyne Gielen.

Pièges à éviter

– Investir comme pour votre domicile principal

– Dupliquer vos investissements précédents réussis

– Surestimer les gains et sous-estimer les risques

– Ne pas envisager les soucis éventuels

– Ne pas avoir d’objectif à long terme clair et précis

– Etre paralysé par vos peurs lors de l’achat

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