BNP Paribas Fortis se voit en moteur de l’économie 100 % verte

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Sebastien Buron
Sebastien Buron Journaliste Trends-Tendances

Responsable du “corporate banking” et membre du comité de direction de BNP Paribas Fortis, Didier Beauvois nous explique pourquoi la première banque du pays a choisi de miser résolument sur la finance verte.

Le numérique n’est pas la seule et unique transformation qui bouscule aujourd’hui les ban-ques. La transition verte les impacte tout autant. Signe de cette lame de fond : la décision prise fin de l’année dernière par le groupe BNP Paribas de ne plus financer ni l’industrie du tabac ni celle du gaz de schiste. Une décision qui cadre avec la volonté de la maison mère de l’ex-Fortis de résolument jouer à l’avenir la carte du développement durable. Car ” nous voyons bien que le marché est à la recherche de modèles commerciaux alternatifs, lance Didier Beauvois, membre du comité de direction de BNP Paribas Fortis, en charge du corporate banking (la banque d’entreprise). Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à transformer la ‘contrainte’ de la transition énergétique en opportunités à créer du nouveau business, à renforcer leur business model actuel et à se protéger contre le risque d’être disruptées. En tant que courroie de transmission de l’économie, BNP Paribas Fortis doit être ce facilitateur de la transition vers plus de durabilité “, soutient Didier Beauvois.

Troisième vague

Si la première banque du pays a choisi de se lancer à la conquête d’une croissance plus verte, c’est donc parce que le monde change. ” Il y a cinq ans, indique Didier Beauvois, on ne parlait pas de durabilité dans le corporate banking. Aujourd’hui, c’est un sujet qui intervient systématiquement dans les discussions. ”

Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à transformer la ‘contrainte’ de la transition énergétique en opportunités.” Didier Beauvois

On peut toutefois imaginer que l’amende de 9 milliards de dollars infligée par les Etats-Unis au groupe pour avoir contourné l’embargo américain avec certains pays tels que l’Iran a également joué un rôle dans ce changement. L'”accident industriel” l’a sans doute amené à revoir son degré de tolérance par rapport à ce qu’il voulait et ne voulait pas faire, jusqu’à considérer le développement durable comme un axe de développement stratégique.

Outre cette réflexion interne, le changement vient aussi de l’adoption en 2015 par les Nations unies de 17 nouveaux objectifs de développement durable. Ces derniers, adoptés à la suite des ” objectifs du millénaire “, ont pour but de répondre aux déséquilibres actuels de la planète, depuis les droits de l’homme jusqu’à la protection de l’environnement, en passant par la diversité ou encore la réduction des inégalités. Bien que non contraignants, leur adoption par plus de 90 pays dans le monde leur confère une autorité morale importante. ” Le monde est aujourd’hui entré dans une vague environnementale, analyse Didier Beauvois. La crise financière, qui à vrai dire est une rupture sociétale, a d’abord débouché sur une vague réglementaire, analyse-t-il. Cette crise a ensuite donné lieu à une vague éthique clouant au pilori l’évasion fiscale et des scandales tels que les Panama Papers. Et le tsunami de 2008 a aujourd’hui conduit à une troisième mutation, une mutation où se rejoignent le digital et le durable. ”

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Effet de levier

Dans ce nouvel environnement, la banque ne part pas de zéro. Sur les 100 milliards d’encours de crédits accordés par BNP Paribas Fortis aux particuliers et aux entreprises, plus ou moins 8 milliards, soit environ 15 % de son portefeuille, correspondent actuellement aux objectifs fixés par l’ONU. La banque a, par exemple, participé à la construction du nouveau bâtiment de l’administration de la Région flamande (Extensa) sur le site de Tour & Taxis, le plus grand bureau passif de Belgique (48 millions d’euros). Dans un autre registre, elle soutient la commune d’Assesse qui accueillera bientôt trois éoliennes sur le site de la société américaine PolyOne qui, ensemble, produiront annuellement quelque 4.500 mégawatts-heures d’électricité (3,65 millions d’euros). Etc.

En réalité, ” BNP Paribas Fortis est déjà un moteur hybride mais demain, la banque veut devenir le moteur de l’économie 100 % verte, avance le responsable du corporate banking, en Ardennais passionné de nouvelles technologies qu’il est. Pour jouer ce rôle de facilitateur et d’accélérateur de la transition, BNP Paribas Fortis s’appuie, en tant que leader du marché, sur sa taille, ses compétences et ses moyens, c’est-à-dire une maison sur quatre financée par BNPP Fortis, un Belge sur trois client de la banque, une entreprise sur quatre cliente, plus de 13.000 employés, 100 milliards de crédits dans l’économie réelle, etc. ”

” C’est un réel effet de levier pour faire évoluer les mentalités et aller vers plus de durabilité “, poursuit Didier Beauvois, qui entend accroître de manière substantielle cet encours de 8 milliards de crédits ” durables ” dans les années à venir.

“Smart cities”, etc.

Pour cela, BNP Paribas Fortis a choisi de résumer les objectifs de développement durable de l’ONU en quatre thèmes : la décarbonisation (lutte contre le réchauffement climatique), l’économie circulaire (réduire, réparer, recycler, réutiliser), le capital humain (éducation, santé, démographie) et les smart cities (mobilité, gestion de l’eau et des déchets). Quatre thèmes sur lesquels la banque va donc se focaliser et qui se traduisent eux-mêmes aujourd’hui par la création d’un nouveau centre de compétence destiné à accompagner les entreprises et les institutions publiques en leur prodiguant des conseils personnalisés en matière de développement durable.

Par ailleurs, l’enseigne est sur le point de proposer des ” sustainable ateliers “, des ateliers soutenables, dispensés sur l’ensemble du territoire aux PME et aux entrepreneurs. Ces ateliers s’inspirent du succès des ” ateliers digitaux (formations en marketing digital) que la banque propose depuis 2016 en partenariat avec Google et qui ont déjà réuni près de 2.500 entrepreneurs depuis leur lancement.

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Toutes les banques “se mettent au vert”

Côté produit enfin, BNP Paribas Fortis a peu à peu étoffé sa gamme pour disposer aujourd’hui d’une offre allant des green bonds (obligations vertes, un marché qui a le vent en poupe) aux investissements socialement responsables (fonds ISR, qui représentent désormais chez BNP pas moins de 10 milliards d’euros) en passant par les sustainable loans (prêts ” durables “) dont les taux d’intérêt sont liés à la performance en matière de développement durable de l’entreprise, celle-ci étant mesurée par des organismes indépendants tels que Sustainalytics. La banque a ainsi octroyé 75 millions d’euros à bpost dans le cadre d’un prêt de ce genre. Quant à l’Etat belge, il a choisi BNP Paribas Fortis pour l’aider à émettre dernièrement sa première obligation linéaire (OLO) verte.

Reste que BNP Paribas Fortis n’est bien évidemment pas le seul établissement bancaire belge à mettre davantage de ” vert ” dans son business. Par exemple, Belfius a financé dernièrement le réaménagement de La Croisette à Dinant dans le cadre d’un programme conjoint de financement avec la Banque européenne d’investissement (BEI) visant à aider les pouvoirs locaux en Belgique à concrétiser leurs projets intelligents et durables dans les domaines de la mobilité, du développement urbain et/ou de l’efficacité énergétique. La banque publique a également prêté 75 des 300 millions accordés à bpost. Au même titre que les trois autres membres du consortium présents dans l’opération : KBC, ING Belgique… et BNP Paribas Fortis.

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