Au coeur du flower power…

dotée de 23 vitres, est la plus recherchée. Elle se négocie aujourd'hui autour 100.000 euros ! © ISTOCK

Cette année marquera les 50 ans du ” Summer of Love “, qui a mis en lumière le mouvement hippie. Un petit bus européen a accompagné ce vent de liberté américain. Retour sur l’histoire du fameux Combi de VW, aujourd’hui très recherché.

Longtemps après la ruée vers l’or des pionniers, la Californie fut le terreau d’une nouvelle façon de penser. Au coeur des années 1960, la cupidité céda la place à la paix et la liberté : les racines de l’esprit Flower Power étaient plantées. Le mouvement s’est révélé à tous avec le Summer of Love de 1967, un festival musical qui avait installé ses tréteaux dans le quartier Haight-Ashbury de San Francisco. Au programme : un esprit pacifique, une dose d’art psychédélique, un brin de substances illicites et un nouveau style de musique qui a fait éclore des artistes comme Janis Joplin, Jimmy Hendrix, Bob Dylan et bien d’autres.

L’automobile a très logiquement croisé la route de ce mouvement en quête de liberté. Elle l’a même véhiculé. Ce fut en particulier le cas de la Coccinelle et du Combi de VW. Simples, peu coûteuses et sympathiques, ces Volkswagen étaient parfaitement dans le ton de l’époque.

Le bus de la révolution

C’est donc un petit bus européen qui a accompagné ce vent de liberté américain. Pourtant, à l’origine, le Combi VW ne véhiculait pas de visée contestataire ni d’idées subversives, lui dont la silhouette a été croquée pour la première fois sur une page d’agenda un jour de 1947. D’allure sympathique, le Combi VW reprenait le patrimoine génétique et technique de la Coccinelle. La production du bus a débuté en 1950. Et il a suffi de quelques manipulations pour lui visser deux rangées de sièges arrière et en faire un transporteur convivial pour ses passagers et leurs autostoppeurs. A l’éclosion du Flower Power, la deuxième génération du Combi VW (T2) était déjà née. Mais c’est le premier (T1) qui reste immortalisé sur les clichés, acheté d’occasion par la jeunesse désargentée de l’époque, qui recherchait un véhicule pratique, fiable et sans grade, pour briser les codes du paraître.

Ce premier bus Volkswagen au coeur de Coccinelle (moteur 1.1 litre de seulement 25 ch à l’origine ! ) a donc sillonné le pays de l’Oncle Sam de long en large, accompagnant les voyages de ses passagers parfois illuminés. Et le Combi était bien sûr également présent sur les pelouses de Bethel, dans l’Etat de New York, à une soixantaine de kilomètres de la ville de Woodstock. Là où environ 500.000 jeunes se sont rassemblés en août 1969, au son de la guitare de Jimmy Hendrix et de la voix rocailleuse de Joe Cocker, entre autres. Là où des organisateurs dépassés ont dû faire appel aux hélicoptères de l’US Navy pour amener sur scène les artistes bloqués dans les embouteillages. L’aide des militaires fut aussi sollicitée pour approvisionner les spectateurs en eau et médicaments, et pour évacuer les malades. L’armée au secours des antimilitaristes, voilà bien le comble de l’ironie !

Né sur une page d’agenda

Tout commence par un coup de crayon, au printemps 1947. A l’époque, Ben Pon, qui était l’importateur de Volkswagen aux Pays-Bas, se rend à l’usine de Volkswagen à Wolfsburg. Là, il remarque un simple véhicule à plateau construit pour faciliter le transport des pièces lourdes sur les chaînes de montage. Ben Pon part de cette idée pour dessiner sur une feuille de son agenda les grandes lignes d’un véhicule utilitaire d’un nouveau genre, avec un volant à l’avant, un moteur à l’arrière et une structure en forme de caisse. Un véhicule simple et pratique, offrant une imposante surface de chargement. Le directeur de Volkswagen est séduit par le projet et, deux ans plus tard, des prototypes sont construits.

La production du modèle de série démarre le 8 mars 1950, dans l’atelier numéro 1 de l’usine de Wolfsburg. Le véhicule utilise le moteur (1.1 litre de 25 ch) et les trains roulants de la Coccinelle, mais, à la place du châssis tubulaire central, le ” bus ” reçoit une carrosserie autoportante montée sur un châssis-échelle. Ben Pon, qui voulait faire naître un simple véhicule utilitaire, a sans le savoir tracé les grandes lignes d’un engin qui allait devenir mythique.

Le premier Combi a vécu de 1950 à 1967 et s’est écoulé à 1,82 million d’unités. Le T2 lui a succédé : il a vécu de 1967 à 1979 et fut produit à 2,93 millions d’unités (le modèle a même été fabriqué au Brésil jusqu’en… 2013, portant la production totale à près de 4 millions d’exemplaires). Ont suivi les T3 (1979-1990, 1,5 million d’exemplaires), T4 (passé à la traction avant, il vécut de 1990 à 2003 et fut produit à 1,7 million d’exemplaires), T5 (2003-2015, 2 millions d’unités) et, enfin, le T6 actuel. Depuis sa naissance, le Transporter de VW, dans toutes ses déclinaisons, s’est donc écoulé à environ 12 millions d’unités à travers le monde.

Un objet de collection

En 50 ans, les Etats-Unis sont passés de Janis Joplin à Beyoncé. Mais le Combi, lui, est resté. Certes, il s’est adapté aux époques, au fil de six générations de modèles. Mais même si certains exemplaires font désormais carrière dans la police, le Combi a mûri sans renier son passé. Il reste le témoin d’une époque, d’un moment de rupture et d’un vent de liberté. Un esprit dont l’Occident a hérité. Et aujourd’hui, le mythe du Combi VW est toujours bien vivace. La première génération du modèle devient même un véritable collector. Pour une version correcte en état de marche, comptez entre 15.000 et 20.000 euros. Mais pour les beaux modèles, les prix grimpent vite. Et certaines versions s’arrachent même à prix d’or. C’est le cas de la version Samba du T1, dotée de 23 vitres et d’un toit ouvrant en toile ; cette variante se négocie autour des 100.000 euros !

Vu les prix, de nombreux mécaniciens se spécialisent dans la restauration de Combis VW, tandis que des négociants sillonnent le sud des Etats-Unis pour dénicher des modèles ayant vécu sous le soleil et ne souffrant donc pas de la corrosion, le cancer des voitures anciennes. Tout un business s’est donc développé autour de cette camionnette très particulière, qui est devenue aussi célèbre que sa petite soeur, la Cox. C’est sûr, l’ancien hippie traînera sa carcasse encore longtemps sur nos routes.

OLIVIER MALOTEAUX

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content