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Les ravages de la révolution numérique

La révolution numérique est prometteuse de beaucoup d’espoirs – des voitures sans conducteurs, des maisons intelligentes, des diagnostics médicaux par ordinateur et même des générateurs automatiques d’articles de presse – tout cela est magnifique, mais à chaque fois ou très souvent l’humain est absent.

Au fond, la révolution numérique favorise le capital, c’est-à-dire les robots au détriment du travail, donc des humains. En d’autres mots, ce que gagne en efficacité, voire en pouvoir d’achat, le citoyen, il le perd au même moment en jobs.

Prenez le cas des taxis Uber. C’est vrai que le consommateur n’aime généralement pas trop les taxis. Donc quand une start-up lui propose de transformer sa voiture en taxi et d’arrondir ainsi ses fins de mois, il se dit “chouette”, et tant pis pour ces taxis. Quant aux usagers, ils sont également ravis: ils croient qu’ils vont payer moins cher qu’un taxi normal. Oui, tout cela est en partie vrai, mais c’est du court terme, du très court terme. En réalité, que fait-on (1) avec ce genre d’innovation ? On remplace des intermédiaires analogiques, comme des sociétés de taxi, par des intermédiaires numériques. En clair, on remplace une personne protégée par une autre qui ne bénéficie que d’une protection sociale symbolique. Pire encore, le citoyen/conducteur qui veut se faire des fins de mois sympas assume tout seul les risques qui pesaient avant sur l’employeur ! Et comme il est seul, ses positions de négociation sont nulles !

En réalité, ce que fait la révolution numérique, c’est également détruire de la sécurité sociale et des rentrées fiscales. Bref, tout ce qui finance notre mode de vie sociale. Mais oser le dire, c’est passer pour un grincheux, un passéiste. En revanche, critiquer les banques, c’est ‘in’, c’est même devenu banal, mais critiquer une initiative numérique vous fait immédiatement passer dans le camp des primitifs, dans le camp de ceux qui n’ont rien compris à la technologie.

Sauf que cette technologie détruit aussi beaucoup d’emplois ! Un seul exemple, quand Facebook a racheté Instagram, le site internet de partage de photos, Facebook a payé 1 milliard de dollars pour un site qui avait 13 employés. Juste quelques mois avant ce rachat, Kodak faisait faillite, car l’entreprise avait raté le virage du numérique en s’accrochant trop longtemps à son modèle argentique. Tant pis pour elle, direz-vous ? Pas si vite, car Kodak, on l’oublie, c’était 145.000 personnes employées dans le monde, et donc autant de familles qui vivaient grâce à cette firme.

Aujourd’hui, le discours ambiant est de dire à la foule des perdants, “eh oui, c’est comme cela, il faudra suivre des cours d’informatique et faire preuve de créativité”. Mais la question bien entendu, c’est: est-ce que tout le monde en sera capable ? J’ai des doutes. Les politiques le savent et ils ne font qu’acheter un peu de temps, car ils sont démunis face aux Google, Facebook, Amazone et autre Apple de notre temps.

(1) De l’utopie numérique au choc social, Le Monde diplomatique, Août 2014.

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