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Le massacre des chevaux, parabole de la crise

Avec plus de 6 millions de chômeurs, l’Espagne serait au bord de l’implosion si elle n’était sauvée par la solidarité familiale et le travail au noir. Parmi les victimes surprenantes de la crise, on retrouve les chevaux.

Comment l’Espagne n’implose-t-elle pas avec un taux de chômage de 27 % de sa population active ? Plus de 6 millions de chômeurs. Ce dernier chiffre officiel est effrayant. Et, comme à chaque fois que les chiffres des demandeurs d’emploi sont publiés, c’est la même question qui revient avec une réponse identique: la solidarité familiale sert de soupape et empêche de nombreux Espagnols de se retrouver à la rue. Le deuxième argument serait que l’économie en noir joue les amortisseurs. L’économie souterraine représenterait entre 20 % et 25 % du produit intérieur brut espagnol soit 240 milliards d’euros. Une somme qui échappe au fisc, sans même parler des cotisations sociales. Le travail au noir s’affiche pourtant au grand jour. Non loin des abris de bus où des travailleurs, souvent d’origine étrangère, attendent qu’une camionnette s’arrête pour les prendre. Qui pour quelques heures, qui pour quelques jours, mais toujours pour un salaire dérisoire. Un travail au noir qui entre en compétition avec les salariés déclarés ou des patrons. Une compétition que ces derniers trouvent déloyale.

Mais ce qui frappe en premier, c’est l’aspect humain de la crise. Pas celui des chiffres macroéconomiques souvent arides ou de celui des discours des économistes. Prenons l’exemple de ces éleveurs de chevaux qui en sont réduits à conduire ceux-ci à l’abattoir faute de pouvoir les vendre à un prix convenable.

Quand le boom de l’immobilier battait son plein,certaines personnes se sont enrichies rapidement et ont souhaité acheter des chevaux pour se donner un air de gentlemen. À cause de la crise, ils n’ont hélas plus les moyens d’entretenir ces derniers. Pour s’en débarrasser, leurs propriétaires les abandonnent en pleine nature, les envoient à l’abattoir – l’Espagne est devenue le plus grand exportateur de viande de cheval après l’Italie – ou les enterrent après les avoir décapités. Cette dernière technique permet aux propriétaires de ne pas être identifiés par l’état grâce à la micro puce insérée dans la tête des chevaux. Et surtout d’éviter l’amende. Encore récemment, dans le sud de l’Andalousie, la police a retrouvé les carcasses d’une vingtaine de chevaux.

La crise, c’est aussi cela. Le cheval s’est transformé en symbole. Il est une inquiétude alimentaire au nord de l’Europe mais aussi un animal massacré et objet de business au sud.

Amid Faljaoui à Malaga

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