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Le CV anonyme, la fausse bonne idée de la Ministre de l’Emploi

C’est la dernière trouvaille de la Ministre fédérale de l’Emploi, Monica De Coninck ; elle veut permettre aux candidats demandeurs d’emploi de pouvoir postuler…anonymement.

L’idée est que grâce à cet anonymat du CV, les femmes, les personnes plus âgées et surtout les travailleurs d’origine étrangère pourraient ainsi avoir plus facilement accès au marché du travail. La plupart des organisations patronales ont déjà réagi à cette idée en disant haut et fort que c’est une mauvaise idée.

Question : ces employeurs ont-ils raison de refuser ce CV anonyme qui, sur le papier, a plutôt l’air d’une bonne idée pour éviter les discriminations ? La réponse est étonnamment et malheureusement : oui. La preuve, c’est qu’à Bruxelles, le test a été réalisé en 2011 mais sans grand succès.

A l’époque, plusieurs grandes entreprises et communes bruxelloises ont transmis des offres à Actiris, l’office bruxellois de l’Emploi. Actiris a donc trouvé des candidats, et a transmis aux employeurs des CV, avec pour seule mention les aptitudes du candidat et sa formation. Le nom n’y figurait pas (pour éviter le rejet sur base de la consonance), l’adresse n’y figurait pas non plus (pour éviter d’identifier les quartiers à forte immigration), l’âge n’y était pas indiqué (pour éviter la discrimination sur base de l’âge), et ni le sexe, ni les établissements scolaires n’étaient mentionnés.

Résultat de ce test grandeur nature : le CV anonyme s’est révélé être un échec ! Pourquoi ? Parce que mentionner, par exemple, l’adresse du candidat permet d’éviter d’éventuels problèmes de mobilité du candidat. De même, les entreprises estimaient qu’il était très important pour un recruteur de connaître la durée de la formation, histoire de mesurer le sérieux du candidat, et quant au nom de l’école, cela permettait d’apprécier la qualité de l’enseignement.

Et puis, ce test grandeur nature à Bruxelles, a montré les autres faiblesses du CV anonyme. La procédure est longue, coûteuse et fastidieuse pour les entreprises. L’entreprise ne peut donc plus publier ses offres sur son site ou passer par des agences. Elle doit se limiter à un seul canal d’embauche, ce qui ralentit fortement le recrutement. Bref, quand une entreprise a un besoin urgent d’un nouveau travailleur, c’est un frein considérable !

Il faut aussi rappeler que des études à l’étranger ont démontré que, même avec un CV anonyme, la discrimination pouvait hélas encore jouer au moment de l’entretien d’embauche. Monica De Coninck a donc lancé une idée généreuse en apparence alors qu’elle savait bien qu’elle était impraticable ! Et c’est le défaut des politiques aujourd’hui : le message compte beaucoup plus que la réalité, au risque de créer des attentes irréalistes et donc des déceptions.

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