La start-up Rocket Lawyer va-t-elle “ubériser” les avocats ?

© screenshot/https://www.rocketlawyer.com/

Championne de la “legal tech”, la start-up américaine débarque en Europe. Les avocats doivent-ils trembler ?

Rocket Lawyer pose ses valises en Europe continentale. Cette start-up américaine, déjà présentée aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, ouvre des antennes en France, aux Pays-Bas et en Espagne. D’autres pays ouvriront dans la foulée, mais les dirigeants de la start-up ne veulent pas encore s’avancer sur un calendrier précis. Cela dit, la Belgique, même s’il ne s’agit pas du marché le plus stratégique en Europe, devrait logiquement figurer dans les étapes européennes de Rocket Lawyer, surtout si le site est déjà déployé dans nos deux langues nationales, en France et aux Pays-Bas.

Rocket Lawyer est l’un des plus gros acteurs de ce qu’on appelle la “legal tech”. À l’instar des “fintech” qui attaquent les acteurs traditionnels du secteur bancaire et financier avec leurs plateformes en ligne, Rocket Lawyer débarque dans le secteur juridique avec une nouvelle offre numérique.

Documents juridiques à prix cassés

Rocket Lawyer propose à ses clients des documents juridiques (statuts d’entreprise, pactes d’actionnaire, contrats de travail, reconnaissances de dettes, contrat de fourniture de services…). Le site veut couvrir toutes les démarches courantes de la vie personnelle et professionnelle de ses clients, dans les domaines comme le logement, la copropriété, la fiscalité, la création d’entreprises, la relation avec les salariés, etc.

Les clients payent au téléchargement ou souscrivent un abonnement mensuel (39,95 dollars par mois aux Etats-Unis) leur offrant un accès illimité à ces documents qu’ils peuvent facilement personnaliser. Sur son site, Rocket Lawyer dit avoir déjà créé plus de trois millions de documents pour ses clients.

Les avocats : concurrents ou partenaires ?

Vu les tarifs pratiqués, la plateforme fait évidemment frémir certains avocats, qui craignent de se faire “ubériser”, comme le secteur des taxis craint de se faire remplacer à terme par l’application Uber. Rocket Lawyer se défend cependant de vouloir prendre la place des avocats. “Les avocats ne sont pas des concurrents, mais des partenaires”, assure Christophe Chevalley, directeur général de Rocket Lawyer Europe.

Le site se décrit en effet comme complémentaire au travail de l’avocat. Si les clients ont besoin d’un avis juridique plus détaillé, ils peuvent prendre contact avec un avocat travaillant en partenariat avec la plateforme. Le premier conseil est gratuit. Ensuite, si l’utilisateur veut approfondir une question, il devient client direct de l’avocat. Rocket Lawyer insiste bien : le site ne prend pas de commission sur les prestations de l’avocat (Ce serait illégal). “La relation entre l’avocat et Rocket Lawyer est une relation sans aucun aspect financier : pas de frais d’inscription, pas de frais technique, rien, explique Blandine Jugé, chargée du développement de Rocket Lawyer en Europe. Le business model de Rocket Lawyer ne repose pas sur l’avocat, mais uniquement sur la vente de document.”

Nouveau marché

Les clients de Rocket Lawyer sont essentiellement des entrepreneurs, des PME et des particuliers. Selon Rocket Lawyer, son positionnement sur le marché n’est pas en confrontation directe avec les avocats. Pour la plupart, ces derniers ne proposent plus des services “basiques” comme des modèles de documents juridiques. “Nous ouvrons un nouveau marché. La plupart de nos clients ne seraient jamais allés chez un avocat”, explique Christophe Chevalley.

Ils seraient sans doute plutôt allés à la pêche aux documents sur Google. Une pratique risquée : impossible de savoir si les documents que l’on retrouve en ligne sont à jour et conformes à la toute dernière réglementation. Rocket Lawyer, de son côté, assure faire les vérifications nécessaires via son équipe de juristes, et garantit donc la fiabilité des informations contenues sur son site. “Avec notre proposition, nous participons à l’assainissement du marché des documents juridiques en ligne”, assure Blandine Jugé.

Soutenue par Google

Avec sa centaine de collaborateurs, dont une vingtaine désormais en Europe, la start-up, créée en 2008, est l’un des plus gros acteurs mondiaux de la “legal tech”. Déjà financée à hauteur de plusieurs dizaines de millions de dollars par des acteurs comme Google Ventures ou Morgan Stanley, l’entreprise a les moyens de ses ambitions. Son déploiement se fait toujours en joint-venture avec un acteur juridique local. En France, il s’agit de la maison d’édition spécialisée ELS, qui héberge notamment Larcier, premier éditeur juridique en Belgique.

Si le créneau de la “legal tech” est foisonnant en France, la Belgique compte encore peu d’initiatives. Mais elles commencent tout doucement à émerger, avec des acteurs comme Lawbox ou LeBonBail. Comme Roket Lawyer, ils espèrent secouer le monde du droit.

Pour découvrir la nouvelle scène belge de la “legal tech”, lisez Trends-Tendances cette semaine. Disponible en librairie et sous format numérique

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