Délits d’initié: “Non seulement la peine augmente, mais la pénalisation devient aussi plus simple”

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L’abus d’informations privilégiées et la manipulation de cours, par exemple par le biais de rumeurs sur des actions, seront punis de manière plus sévère, avec des peines allant jusqu’à quatre ans de prison. Trois questions à l’avocat Patrick Waeterinckx.

Ce durcissement se trouve dans les travaux préparatoires du texte de loi du ministre de la Justice Koen Geens (CD&V) et du ministre des Finances Johan Van Overtveldt (N-VA). Trois questions à l’avocat Patrick Waeterinckx, professeur de procédure pénale à la VUB.

La peine pour délit d’initié sera quatre fois plus lourde et celle pour manipulation de cours deux fois plus dure. Une bonne chose ?

Waeterinckx: Il y a une tendance générale pour une approche plus sévère de la criminalité. Non seulement la peine augmente, mais la pénalisation (la définition du crime) devient aussi plus simple et plus précise.

Les crimes financiers sont parfois très difficiles à poursuivre du fait de la lourde charge de la preuve. Le parquet doit ainsi prouver un lien causal entre les informations privilégiées et l’achat ou la vente des actions. Les enquêtes sur les délits d’initié auprès de Ter Beke et LHSP se sont malgré tout bien terminées.

Un autre exemple est l’utilisation abusive des biens de la société. Si un dirigeant d’entreprise en Belgique soustrait illégalement des moyens à son entreprise, il n’est coupable que si cela occasionne un inconvénient significatif à sa société. En France par exemple, cela ne doit pas être prouvé.

Le FSMA reçoit plus de compétences d’enquête pour la détection et le contrôle des délits boursiers. Cela conduira-t-il à davantage de poursuites, du fait que les délits financiers ne sont pas prioritaires pour les parquets ?

Probablement. Lentement mais sûrement prédomine l’opinion selon laquelle cela n’a pas de sens de porter certaines infractions devant la cour pénale si dans la pratique elles sont à peine poursuivies ou sanctionnées.

Il y a une tendance à structurer l’enquête et le contrôle des crimes financiers via une approche à deux niveaux: soit une sanction par l’administration, soit par le tribunal. Par cette manière de travailler, l’administration reçoit des compétences étendues. Des fonctionnaires des services d’inspection reçoivent parfois la compétence d’officier de police judiciaire, qui leur octroie, dans des limites bien définies, également des compétences d’enquête judiciaire. Cela pourrait être une option pour les membres du FSMA.

On retrouve une approche à deux niveaux pour les infractions aux lois sociales, où le parquet peut décider de traiter lui-même un dossier ou de le transmettre à l’administration. La cour se penche surtout sur les infractions lourdes. La loi Una Via de 2012 voulait instituer un même régime pour les affaires fiscales, mais la logique n’est pas complètement passée et a été partiellement annulée par la Cour constitutionnelle.

L’enquête dans l’affaire Bois Sauvage avait été interrompue après un règlement à l’amiable. Est-ce une manière efficiente de décharger le tribunal ?

Cela cadre dans cette philosophie. L’an dernier, la Cour constitutionnelle a toutefois annulé partiellement l’article de loi sur le règlement à l’amiable élargi. La conséquence est que certains parquets ne veulent plus mener de négociations concernant un accord transactionnel et d’autres biens, mais ils font vérifier le résultat par un juge.

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