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La Suisse du Nord

La Belgique planche sur une refonte structurelle. Elle entretient la crainte de devenir une deuxième Grèce, au lieu de nourrir l’ambition de devenir la Suisse du Nord.

La Belgique planche sur une refonte structurelle. Sur le plan économique, elle s’accommode d’un score moyen par rapport à ses pairs de la zone euro, qui la relèguent pourtant parmi les moins bons élèves du noyau dur gravitant autour de l’Allemagne. Elle entretient la crainte de devenir une deuxième Grèce, au lieu de nourrir l’ambition de devenir la Suisse du Nord.

La mondialisation induit une course effrénée au gigantisme. De même que les grandes compétitions sportives (à commencer par la Champions League) attirent les talents et les capitaux des plus petites, les grandes multinationales absorbent les petites enseignes locales. Les “petits” pays se sont eux aussi avérés plus vulnérables face à la crise financière. Ça, c’est la vision pessimiste des choses. Il existe cependant une version optimiste. Le monde est à nouveau en quête d’authenticité. L’uniformité mondiale séduit moins. Les petites sociétés sont plus flexibles et réagissent plus rapidement aux changements. Outre leur identité forte, les petits pays sont aussi plus avancés culturellement et sportivement.

Efficience publique ne rime pas forcément avec grandeur d’échelle

Notre pays souhaite se doter d’une nouvelle structure organisationnelle tout en renforçant son économie. Mais à qui pouvons-nous nous comparer ? La Belgique revendique son caractère unique et complexe : trois langues, croissance économique à géométrie variable, tradition industrielle séculaire et rôle de premier plan sur l’échiquier international.

Et pourtant… il existe un autre petit pays, où l’on parle quatre langues, où le secteur industriel est solidement ancré, l’industrie chimique largement représentée, qui est réputé pour sa gastronomie, et son chocolat en particulier, fait lui aussi office de plaque tournante logistique et héberge plusieurs institutions internationales.

La Suisse a su démontrer qu’un petit pays peut réunir un gouvernement efficace, un enseignement de qualité, une solidarité entre les contribuables. Le tout au prix d’une imposition somme toute raisonnable. Preuve qu’une structure fédérale efficiente peut cohabiter harmonieusement avec des compétences centralisées bien définies. À condition d’entretenir un sentiment de responsabilité, de faire preuve de parcimonie au niveau local et d’impliquer largement la population. Les Helvètes ne font absolument pas preuve d’indifférence face au monde qui les entoure, ni ne manifestent une volonté collective de profiter de l’État.

La créativité suisse

Les Suisses ont, c’est vrai, fait le ménage. Leurs querelles linguistiques sont résolues : un principe de territorialité strict s’applique, ce qui signifie que l’habitant d’un canton déterminé est supposé parler la langue de celui-ci et ne peut revendiquer aucune facilité linguistique (1). La population est politiquement impliquée au travers de consultations régulières (référendums), et il est même possible de voter par SMS… Le culte de la personne n’a pour ainsi dire aucun droit de cité dans la sphère politique. De nombreux Suisses ne connaissent même pas le nom de leur Premier ministre. Ils le considèrent davantage comme leur semblable que comme une personnalité politique haut placée. Par ailleurs, il existe un système de rotation du chef de gouvernement, autrefois annuel, aujourd’hui tous les deux ans. Imaginerait-on en Belgique qu’Elio et Bart puissent s’alterner au poste de Premier ministre pendant quatre ans ? J’oubliais : la Suisse compte seulement sept ministres !

Contrairement aux idées reçues, notre pays ressemble bien plus à la Suisse qu’aux Pays-Bas. Nos voisins du Nord ont une industrie moins développée, le pays est homogène et plat comme une crêpe !

Les coûts salariaux de la Suisse ont par ailleurs toujours fait l’objet d’une grande attention. Mais grâce à l’efficacité de l’État, les coûts salariaux indirects sont mieux maîtrisés aujourd’hui. Si le secteur public était aussi parcimonieux et efficace que le privé, la Belgique ne connaîtrait pas de problèmes liés aux coûts salariaux.

La Belgique peut s’inspirer du modèle suisse à de nombreux égards. Une piste de réflexion pour les vacances d’Elio et Bart ?

(1) Petite exception : Biel/Bienne

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