Liège 2017 : sous l’expo, un morceau de ville

© Expo 2017

Le gouvernement fédéral soutient officiellement la candidature de Liège à l’organisation de l’Exposition internationale 2017. Si la capitale économique wallonne l’emporte, c’est tout un quartier de ville actuellement en déliquescence qui renaîtra.

C’est officiel : la ville de Liège est la candidate belge à l’organisation de l’Exposition internationale de 2017. Sa candidature a été déposée la semaine dernière par le gouvernement fédéral auprès du Bureau international des expositions (BIE). Le seul concurrent déjà déclaré est la ville d’Astana, au Kazakhstan. Mais d’autres candidats pourraient sortir de l’ombre dans les six prochains mois. Et la décision du BIE, qui regroupe 157 Etats et autant de votants, ne tombera qu’en novembre 2012.

En point de mire du Collège de la Ville de Liège, figure la dernière exposition internationale en date, qui s’est déroulée en 2008 à Saragosse et qui a attiré près de 6 millions de visiteurs et engendré des centaines de millions d’investissements. A Liège, les forces vives ont créé la SCRL (société coopérative à responsabilité limitée) Liège Expo 2017, qui a dévoilé les lignes de force de son dossier de candidature début juin, à l’Atomium. Pour cadrer au mieux les tenants et aboutissants de l’événement, Liège Expo 2017 s’est adjoint les services du bureau de consultance McKinsey.

Restait à définir un site porteur de 25 hectares, suffisamment central pour y transporter facilement des millions de visiteurs, cette surface n’incluant pas les terrains nécessaires pour les fonctions connexes indispensables (parking, logistique, sécurité…). “En outre, le lieu choisi devait contenir des emplacements construits par l’organisateur et libres de tous loyers, charges, taxes et frais autres que ceux inhérents aux services rendus. Le site de Coronmeuse, à l’entrée nord de Liège, a fait l’unanimité”, explique Jean-Christophe Péterkenne, le président de la SCRL Liège Expo 2017, qui pointe encore la situation stratégique du lieu, à proximité immédiate du tracé du futur tram, qui reliera ce quartier au centre-ville, ainsi que l’accès à l’autoroute, très proche.

Un vrai projet pour reconstruire une porte de ville moribonde

Afin de concevoir le masterplan (plan masse) du futur site de l’Exposition, Liège Expo 2017 s’est adjoint les services d’un bureau d’architectes-urbanistes reconnu : VenhoevenCS, d’origine néerlandaise, spécialisé dans la conception d’éco-quartiers urbains.

En pérennisant la thématique choisie – Connecting the world, linking people – la volonté des édiles liégeois est, au terme de l’Expo 2017, de reconvertir les aménagements temporaires existants pour faire renaître un nouvel îlot de ville sur les cendres de l’actuel quartier périphérique moribond. Après dépollution et reconversion – notamment d’un quartier voisin de Bressoux transformé en zone multimodale et relié via une passerelle piétonne – le nouvel îlot sera appelé à devenir un modèle de développement durable jouant sur la haute performance énergétique des immeubles, la mobilité douce (sans voitures) et les espaces verts.

Pour ce faire, le bureau VenhoevenCS a travaillé de manière étroite avec les différents acteurs concernés par l’aménagement à long terme du site et de ses alentours. Notamment avec les différents services de la Ville de Liège et de la Ville d’Herstal, le fonctionnaire délégué à l’aménagement du territoire et le cabinet du ministre wallon Philippe Henry, en charge de ces matières, l’intercommunale de développement SPI+ et la SPAQuE, le site ayant été en partie occupé par des industries lourdes.

Un plan masse qui voit double

“Les bâtiments de l’Expo seront donc construits pour être facilement modulables et devenir à terme un nouveau quartier urbain dont l’affectation principale sera consacrée au logement. Une belle place sera aussi réservée aux services (écoles, bibliothèques, magasins et restaurants) et aux bureaux”, explique Jean-Christophe Péterkenne. Le quartier ainsi créé devrait permettre d’accueillir 10.000 nouveaux habitants d’ici 2020.

Le plan masse initial envisage que les espaces soient composés d’une quinzaine de bâtiments communs, qui abriteront les pavillons des participants (pays et organisations), de deux pavillons indépendants (dont l’un abritera la représentation belge et l’autre, le pavillon de l’Union européenne) et de cinq pavillons thématiques, chacun sous une bannière spécifique. Enfin, des bâtiments fonctionnels seront destinés à remplir des services indispensables comme la restauration, l’information, la sécurité et l’accueil des enfants.

Au total, le programme de construction prévoit 156.000 m2 de surfaces bâties, dont 121.000 m2 au sol.

L’immobilier comme moteur des recettes et dépenses

Ces investissements immobiliers, colossaux pour la ville, seront, disent les organisateurs, financés via un partenariat public-privé lancé tout prochainement, sans attendre la décision finale du BIE sur la ville sélectionnée. Il est en fait déjà grand temps, vu les délais relativement courts.

Questionné sur la valorisation à long terme de cet ensemble immobilier, le Collège liégeois défend son budget, qu’il dit raisonnable et crédible. Et rassure : selon lui, l’Expo devrait attirer quelque 5,9 millions de visiteurs pendant ses trois mois d’ouverture. McKinsey estime que ces visiteurs généreront 8,4 millions d’entrées.

En outre, environ un quart de ces millions de visiteurs chercheront un logement, estime-t-on encore. Ils créeront une demande de logements évaluée entre 16.500 et 18.900 lits par jour d’Expo : une véritable manne pour l’Horeca local. Au total, 50.000 lits d’hôtel seraient disponibles à moins de 100 km de Coronmeuse, capacité jugée suffisante pour satisfaire la demande, même aux périodes de grande affluence.

Les revenus opérationnels de l’Expo 2017 sont estimés quant à eux à quelque 339 millions d’euros. Principales sources de rentrées : la billetterie (190 millions d’euros) et le sponsoring (100 millions). Les autres revenus (notamment les parkings, services aux visiteurs et participants, ainsi que les concessions commerciales) sont évalués à 49 millions d’euros. Sans compter les recettes TVA prévues, quelque 220 millions, pour l’Etat fédéral.

Mais c’est surtout du côté de la valorisation immobilière des pavillons construits pour l’Expo et transformés ensuite en bureaux, logements, petits commerces et services que la majorité des recettes de l’opération devrait être dégagée : quelque 493 millions d’euros.

Du côté des coûts, la partition est quasi similaire. Les dépenses directes (opérationnelles) sont estimées à environ 228 millions. Ce montant se répartit notamment en frais de personnel, de promotion et de communication, sécurité, animations culturelles, informatique, assurances… L’ensemble des investissements immobiliers à réaliser sur le site a quant à lui été évalué à plus du double : 488 millions d’euros, dont la part la plus importante – environ 329 millions d’euros – sera dédiée à la première phase du projet (construction des pavillons) et 159 millions à la seconde phase (transformation des pavillons post-Expo). Ces montants ont été chiffrés par McKinsey sur la base des coûts de construction moyens actuellement en vigueur à Liège, auxquels il faut ajouter une somme de 66 millions d’euros correspondant aux frais liés au montage et au financement d’un tel projet.

Philippe Coulée

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content