Les dessous peu édifiants de la Villa Empain

© Francis Metzger/Georges De Kinder

Les ors retrouvés de la façade de la Villa Empain ont fait la “une” de tous les médias. Mais rares sont ceux qui ont rappelé un épisode relativement récent et parmi les moins glorieux de l’interminable saga de la Villa Empain, dessinée début des années 1930 par Michel Polak et redevenue in extremis un des fleurons Art déco de la capitale grâce à l’atelier d’architecture de Francis Metzger (MA2) et la Fondation Boghossian.

Cet épisode, tenu sous silence lors de la récente inauguration, risque pourtant de resurgir d’ici peu, tant la personnalité et les frasques du propriétaire temporaire de ces murs peuvent difficilement être gommés. Il s’avère en effet établi, par plusieurs sources proches du dossier, que les agissements du promoteur immobilier Stéphan Jourdain (51 ans) dans ce dossier y ont laissé des traces profondes et indélébiles, et qu’une plainte serait toujours pendante.

Stéphan Jourdain souhaitait transformer la Villa Empain, propriété exemplaire de son portefeuille bruxellois au même titre que le château Fond’Roy (racheté à Mobutu) et le castel Viola Cornuta, devenu depuis complexe sportif de luxe sous enseigne David Lloyd. Laissée à l’abandon après le départ de RTL neuf ans plus tôt, la Villa Empain avait été la proie des déprédations et des vols. L’objectif avoué de Stéphan Jourdain était d’y créer un espace d’exposition. Selon certains, le propriétaire aurait également émis l’idée d’y déménager à terme le Cercle de Lorraine.

Le hic : l’homme voulait faire au plus vite et l’espace disponible était trop exigu à son goût. Qu’à cela ne tienne, le propriétaire dénatura les lieux sans permis, ouvrant des baies au milieu des planchers de bois rares pour y poser des cages d’escalier, sacrifiant des salles de bains pour y installer des bureaux, abattant ou posant des cloisons çà et là. Alertés du massacre en cours, les Monuments et sites firent poser les scellés en urgence et inscrivirent la villa sur sa liste de sauvegarde le 12 juillet 2001.

L’année suivante, rebelote : lors du rachat du château Mélot, sur les hauteurs de Namur, avec l’objectif d’y installer le Cercle de Wallonie, Stéphan Jourdain ne respecta pas les prescrits urbanistiques en tronçonnant 72 arbres de taille sans permis. Avec toujours le même justificatif : aménager rapidement les abords de son nouveau domaine pour en ouvrir les portes. L’urgence semblait justifier tous les moyens. Quand, en novembre 2006, la société Exôzt (André Van Hecke) racheta la propriété et l’activité naissante (SA Vecquim), elle hérita également du contentieux. A elle désormais de rendre des comptes à l’urbanisme.

Avenue Franklin Roosevelt, on retrouve un scénario similaire : tenter de revendre la société anonyme créée pour l’occasion avec, en prime, le contentieux pendant. C’est la société de promotion immobilière Robelco qui rachètera – avec clause suspensive – le bien pour y installer ses bureaux de standing. Au bout d’un an à peine, cependant, l’étude des dossiers et les contacts avec le vendeur révéleront tant l’étendue des dégâts que l’impossibilité d’y obtenir un permis pour des bureaux.

Exit Robelco. Arrivera alors Jean Boghossian, sur les conseils de l’architecte Philippe de Bloos, qui se fera fort d’amener la Région bruxelloise à la table des négociations afin de disposer d’une enveloppe financière suffisante pour sauver in extremis l’espace dénaturé et classé en 2007. La suite a été largement diffusée par les médias.

Dernier fait d’armes de Stéphan Jourdain : la saga des jardins d’Annevoie, où des travaux exécutés ici aussi sans permis ont forcé la Région wallonne à pénaliser et à suspendre ses subsides. Les procédés sont les mêmes et la propriété est aujourd’hui à vendre.

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