“L’offre d’appartements à Bruxelles est inadaptée”

Illustration. © BELGA/Benoît Doppagne

Mettre la main sur un studio ou un appartement de plus de trois chambres est une mission quasi impossible en Région bruxelloise. L’offre y est inexistante. Etonnant dans un contexte où le nombre de familles recomposées seront de plus en plus nombreuses à l’avenir.

Le marché de l’appartement neuf bruxellois reste très standardisé. L’information n’est pas neuve. Un appartement sur deux comprend deux chambres et s’étend sur environ 80 m2. Un classique pour un promoteur qui ne veut pas prendre de risque et qui veut trouver aisément un acquéreur ou un investisseur. Cette uniformité du marché pourrait toutefois tendre à l’avenir vers une certaine inadéquation entre l’offre et la demande. C’est ce qui ressort notamment des chiffres du bureau d’expertise de Crombrugghe & Partners, qui analyse le marché des appartements neufs pour Trends-Tendances et à qui nous avons demandé d’étudier plus précisément les extrémités du marché.

Pour le moment, à Bruxelles, on recense 313.815 appartements (neufs et anciens), selon des chiffres du cadastre. Soit 54,7 % du parc de logements. Le solde étant essentiellement composé de maisons. Notons que la proportion du nombre d’appartements est en augmentation constante depuis 10 ans, de près de 1 % chaque année. Et cette tendance ne devrait bien évidemment pas s’atténuer, vu le coût de l’immobilier et l’offre qui est dans le pipeline. A contrario, le nombre de maisons baisse chaque année. ” La croissance du nombre d’appartements étant plus élevée que la diminution du nombre de maisons, cela implique une hausse globale du stock, constate Michaël Zapatero, consultant auprès du bureau de Crombrugghe & Partners. Ce phénomène s’explique d’une part par la destruction d’îlots et de logements de type maison unifamiliale pour les remplacer par la construction de nouvelles promotions. Une situation qui trouve son origine dans le manque de foncier non urbanisé disponible et s’explique par une production de nouvelles promotions essentiellement orientées vers les appartements. Seul citydev.brussels met l’un ou l’autre lotissement de maisons sur le marché. ” D’autres promoteurs privés sont également actifs sur ce segment, dans des projets tels qu’Erasmus Gardens (BPI) à Anderlecht, les Amandiers (Matexi) à Berchem-Sainte-Agathe, les Jardins de la Poésie (Matexi) à Anderlecht ou encore les Promenades d’Uccle (Matexi et Besix Red).

Les Amandiers. Ce projet développé par Matexi dans la commune de Berchem- Sainte-Agathe est l'un des rares à proposer des maisons unifamiliales sur le territoire bruxellois.
Les Amandiers. Ce projet développé par Matexi dans la commune de Berchem- Sainte-Agathe est l’un des rares à proposer des maisons unifamiliales sur le territoire bruxellois.© MATEXI PROJECT

Oser prendre des risques

Si on analyse d’un peu plus près le stock d’appartements neufs qui est actuellement en vente (une proportion qui ne reflète donc pas l’ensemble des projets qui sont dans le pipeline), on voit que les appartements de plus de trois chambres ne représentent que 1 % de l’offre à Bruxelles. Et en regardant d’encore plus près la répartition de cette offre par district, on voit que davantage d’appartements de ce type sont présents dans les communes du sud de Bruxelles mais que cela reste relativement insignifiant. A l’opposé, les studios ne représentent que 7 % de l’offre bruxelloise. Une proportion qui grimpe à 15 % pour Bruxelles-Ville. ” Il s’agit d’enseignements très intéressants, relève Michaël Zapatero. La taille des ménages a tendance à diminuer ou, à contrario, à augmenter suite à l’apparition de familles recomposées. Ce sont deux tendances contradictoires, que ne prennent pas suffisamment en compte les promoteurs. Même si on peut aussi se dire que s’ils ne sont pas sur le marché, c’est peut-être également car ils sont vite vendus. On ne le sait pas, mais en tous les cas la proportion est bien faible. Tous les observateurs savent qu’il va falloir construire davantage d’appartements à l’avenir vu la hausse démographique, or l’offre est inadaptée. C’est principalement dû au fait que les promoteurs ne veulent pas prendre de risques et souhaitent rentabiliser au mieux leur investissement. ”

Quant à la taille des appartements, la superficie moyenne est de 84 m2. La diminution de la taille des logements s’est donc atténuée ces dernières années à Bruxelles. Si on regarde cela d’un peu plus près, on voit que la superficie s’étend de 60 à 120 m2. C’est dans les communes du centre de Bruxelles que les appartements neufs actuellement mis sur le marché sont, en moyenne, les plus grands.

Enfin, pour le marché secondaire, l’offre d’appartements est légèrement plus variée. Il y a davantage d’appartements de plus de trois chambres – même si cela reste faible (5,7%). Une offre pour des appartements de plus de six chambres existent même, mais elle est infime (0,2%) ! Ajoutons qu’il y a également davantage de studios sur le marché secondaire que sur le marché du neuf. La proportion d’appartements deux chambres est également moins prononcée.

Olivier Carrette, administrateur délégué de l’Union professionnelle du secteur de l’immobilier

© PG/Bernard Demoulin

TRENDS-TENDANCES. Comment peut-on expliquer que si peu de promoteurs proposent des appartements de plus de trois chambres ?

OLIVIER CARRETTE. Car le Règlement régional d’urbanisme (RRU) impose des surfaces minimales pour les habitations. Or, notre façon de vivre actuellement ne correspond plus à ce qui était applicable il y a 10 ans. Et si le Code bruxellois de l’aménagement du territoire (CoBAT) et le RRU sont actuellement en révision, il n’y a malheureusement pas de révision de cette disposition. Ce que nous regrettons.

Comment infléchir la programmation des promoteurs, vers davantage d’appartements une chambre et de plus de trois chambres, pour être plus proche de la demande ?

Nous plaidons pour plus de flexibilité pour la superficie des appartements. Le problème, ce sont les normes de construction imposées par le RRU et les normes énergétiques qui sont trop poussées. La fiscalité sur l’immobilier neuf est également trop importante. Avoir un taux de TVA à 21 % est rédhibitoire. Sans parler du fait que le bonus logement ne s’applique pas à l’immobilier neuf. Enfin, le pouvoir politique n’encourage pas les appartements de petite taille ou d’une chambre malgré la demande, qui représentent pourtant 15 % du marché.

La taille moyenne des appartements neufs est de 84 m2. C’est encore trop pour l’Upsi ?

La moyenne européenne est de 65 m2, donc il y a encore de la marge. Le but n’est pas de produire que des petites surfaces mais bien de produire des logements adaptés à chaque étape de la vie.

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