L’échéance idéale?

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Dans la quête d’un emprunt visant à financer la construction ou la rénovation de votre logement, le choix de l’échéance revêt une importance cruciale. Quels éléments faut-il prendre en compte ?

Lorsqu’un particulier envisage de contracter un emprunt hypothécaire dans le cadre d’un projet de construction ou de rénovation, son choix se porte généralement sur la banque qui lui propose les taux les plus bas. Pourtant, le taux d’intérêt n’est pas le seul facteur déterminant. L’échéance de l’emprunt joue en effet un rôle tout aussi important : plus cette échéance est éloignée, plus les intérêts seront élevés. Parce que le taux proposé est plus élevé, mais aussi parce que la part des mensualités constituée par les intérêts diminue plus lentement.

Il ressort d’un sondage réalisé auprès de plusieurs banques belges que les emprunteurs se concentrent à nouveau sur les échéances plus courtes. “Jusqu’à l’an dernier, la durée moyenne était restée relativement stable, annonce Ilse De Muyer, de la KBC. En 2011 et en 2012, chez nous, elle s’élevait à 20,75 ans. Au cours des trois premiers mois de cette année, nous avons constaté une baisse considérable, à 17,75 ans.” Chez Crelan, banque née de la fusion entre le Crédit Agricole et Centea, l’échéance moyenne était revenue à 18 ans en 2012. “Là aussi, la tendance est à la baisse, affirme Jean-Louis De Valck, responsable de l’octroi de crédits. Si l’on ne considère que les emprunts visant à financer les achats immobiliers ou les nouvelles constructions, l’échéance s’élève à 20 ans.”

“En 2012, chez BNP Paribas Fortis, l’échéance moyenne des crédits hypothécaires était de 20 ans, nous confie la responsable de la communication Kim Cauberghs. Cela représente trois mois de moins que l’année précédente. La baisse la plus nette est palpable au niveau des emprunts visant à financer un achat : l’échéance a en effet été écourtée de sept mois.” AXA est l’une des rares banques où l’échéance moyenne est restée stable, à 19,5 ans. “Cette échéance moyenne est celle de 2010, de 2012 et des trois premiers mois de 2013, assure Benoît Lempkowicz. L’année 2011 fut atypique, caractérisée par une échéance moyenne des emprunts de 18 ans, mais l’emprunt vert, particulièrement populaire à l’épo-que, n’est pas étranger à cet état de fait.”

Jusque 30 ans

La plupart des organismes bancaires belges permettent d’emprunter pour une durée maximale de 30 ans. Pour de nombreuses familles, cette longue échéance constitue le seul moyen de limiter les mensualités pour ne pas compromettre les finances du ménage. Cela dit, la popularité de ces crédits longs a diminué dans la plupart des banques — parallèlement au raccourcissement généralisé des échéances. “L’an dernier, les crédits associés à une échéance comprise entre 25 et 30 ans représentaient encore 12,5 % des contrats signés, rappelle KBC. Au premier trimestre 2013 cependant, cette proportion est revenue à moins de 1 %.”

Chez BNP Paribas Fortis, l’an dernier, un tiers de tous les emprunteurs avaient encore opté pour une échéance supérieure à 25 ans. “En 2005, à peine 5 % de la clientèle avait choisi une échéance longue, précise Kim Cauberghs. A nouveau, ces crédits de longue durée ont perdu leur attrait. D’ailleurs, cela nous a incités à retirer de notre gamme de produits les emprunts sur 40 ans.” AXA est la seule banque à avoir constaté une augmentation du nombre de contrats au long cours : sur les trois premiers mois de cette année, 60 % des emprunteurs ont opté pour une échéance supérieure à 20 ans alors qu’autrefois, ce groupe représentait seulement 35 à 40 % des contrats signés.

Taux plus faibles, prix moins élevés L’an dernier, en règle générale, les échéances ont donc légèrement baissé, une tendance qui semble se confirmer en 2013. “Nos clients sont davantage conscients désormais du fait qu’une échéance légèrement plus courte allège considérablement la charge totale d’intérêts remboursables, précise Vanessa Zwaelens, media relations manager chez ING. Qui plus est, l’écart de taux entre les formules de très longue durée et les emprunts plus courts est plus important aujourd’hui que par le passé. Ce facteur pèse également dans la balance.”

Ilse De Muyer, de KBC, confirme que la faiblesse des taux contribue à ramener les clients vers des échéances plus brèves puisqu’elle leur permet de quand même conserver une mensualité raisonnable. “En comparaison avec la situation qui prévalait au début de l’an dernier, le particulier peut emprunter le même montant avec la même mensualité, mais sur une échéance réduite d’environ trois ans, calcule-t-elle. Qui plus est, la crise économique a incité les emprunteurs et les banques à une plus grande prudence. Ce facteur justifie lui aussi le choix d’échéances moins éloignées.”

“L’atonie des taux rend du reste les investissements moins intéressants, ajoute Jean-Louis De Valck, de Crelan. Un facteur qui incite les parents à con-tribuer à l’achat, à la construction ou à la rénovation de l’habitation de leurs enfants. L’apport de fonds propres réduit le montant emprunté, partant la durée du crédit. Par ailleurs, la baisse généralisée des prix de l’immobilier n’est évidemment pas étrangère à cette tendance.”

L’échéance idéale ?

Quelle échéance choisir pour votre emprunt hypothécaire ? Sachez tout d’abord que l’échéance idéale n’existe pas. Le choix dépend en effet notamment du montant emprunté, des taux en vigueur, de l’âge de l’emprunteur, de sa marge de manoeuvre financière et de sa situation fiscale. Il convient toutefois également de tenir compte d’un facteur psychologique : dans un contexte d’incertitude économique, les emprunteurs craignent de se lier à leur banque pendant 30 ans. “Il est important de déterminer au préalable le montant maximal allouable aux mensualités, conseille Benoît Lempkowicz d’AXA. En fonction de ce budget mensuel, la durée et le capital à emprunter peuvent être adaptés à vos besoins.”

“Un facteur essentiel dans la détermination de l’échéance adéquate réside dans la capacité de remboursement, affirme Vanessa Zwaelens d’ING. L’apport joue un rôle important à cet égard. Nous remarquons que les clients dont la capacité de remboursement est importante évitent dans la mesure du possible les très longues échéances.” Selon Jean-Louis De Valck, il est important d’établir un plan de financement solide. “Plus vite le crédit peut être remboursé, plus vite vous serez à l’abri d’une éventuelle déconvenue future comme un divorce ou la perte de votre emploi, affirme-t-il. Plus l’échéance est brève, plus vite vous devenez plein propriétaire et disposez donc d’un parechoc financier.”

Quid de la fiscalité ?

L’avantage fiscal figure également dans l’argumentaire de certains banquiers désireux de mettre en avant leurs emprunts de longue durée. “Sur le plan fiscal, il est encore intéressant d’emprunter le plus longtemps possible, con-seille Kim Cauberghs, de BNP Paribas Fortis. Même si le consommateur est davantage conscient du fait que les échéances plus longues coûtent un peu plus cher, l’avantage fiscal joue toujours un rôle important.” Chez AXA, le discours est un peu plus nuancé. “L’emprunteur doit lui-même mettre en balance le coût supérieur de l’emprunt plus long et l’avantage fiscal qu’il procure.”

L’avantage fiscal joue certes un rôle non négligeable dans l’équation, mais la possibilité de prolonger la déduction fiscale en optant pour une durée plus longue ne compense généralement pas le surplus d’intérêts payés. L’avantage fiscal dont l’emprunteur bénéficie sur son emprunt hypothécaire peut en outre réduire l’impact d’autres avantages fiscaux, voire les anéantir purement et simplement. Et lorsque les revenus diminuent — lors du départ à la retraite, par exemple — l’avantage fiscal s’amoindrit également. Enfin — et ceci n’est pas négligeable — la législation fiscale peut changer à tout instant…

ROEL VAN ESPEN

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