Immobilier : les maisons de repos, LE nouveau filon

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S’il ne fallait retenir qu’une leçon de la récente crise immobilière, ce serait celle-ci : on ne peut indéfiniment spéculer sur la valeur d’immeubles vides.

Hier encore, les portefeuilles d’immeubles cotés en Bourse (sicafis, certificats) étaient surtout composés d’immeubles de bureaux bien situés et bien loués. Aujourd’hui, la roue tourne : l’offre de bureaux dépasse la demande. Résultat : les sicafis, poussées dans le dos par leurs actionnaires de référence et les marchés, diversifient leurs murs, achètent ailleurs ou autre chose : cafés-brasseries, maisons de repos, logements meublés, prisons, écoles. Tout ce qui offre une masse critique suffisante, chiffrée en centaines de millions d’euros à investir sur base annuelle, intéresse les investisseurs.

S’il ne fallait retenir qu’une leçon de la récente crise immobilière, ce serait celle-ci : on ne peut indéfiniment spéculer sur la valeur d’immeubles vides.

Il existe cependant un segment immobilier où la demande dépasse l’offre du parc industriel : les maisons de repos. On a même frôlé la catastrophe voici quelques années : en Belgique, après une croissance fulgurante de l’investissement entre 2005 et 2008 – on est passé de 20 à 240 millions d’euros investis sur base annuelle – le marché a connu une forte décroissance en 2009, à l’instar du reste du marché immobilier. Plus de 70 millions d’euros ont quand même été investis cette année-là, soit 4 % du marché total de l’investissement en immobilier commercial dans notre pays (1,6 milliard).

La reprise ne s’est toutefois pas fait attendre : en 2010, alors que le niveau d’investissement sur l’ensemble du marché est resté stable, les investissements dans le secteur des maisons de repos ont crû de 65 %, pour atteindre 121 millions d’euros (7,6 % du marché total de l’investissement). L’année 2011 confirme d’ailleurs cette tendance : sur les neuf premiers mois de l’année, ce sont pas moins de 143 millions d’euros qui ont été investis dans plus de 1.600 lits.

“Le marché reste dominé à plus de 80 % par deux acteurs : Cofinimmo et Aedifica, indique Vincent Leroux, analyste en chef chez DTZ. Au cours des six dernières années, Cofinimmo a investi à lui seul près d’un demi-milliard (479 millions) d’euros dans le secteur en Belgique – et 418 millions en France. Cette Sicafi est aujourd’hui le leader incontesté dans l’acquisition du foncier des maisons de repos. Non seulement en Belgique mais aussi au niveau européen, avec une part de marché de 11 % dans les investissements du secteur depuis 2005.”

Depuis 2007, le nombre de lits au sein du portefeuille de Cofinimmo a sextuplé alors que sa valeur a quintuplé. Ceci représente une évolution annuelle de près de 54 % ! Aedifica a connu quant à elle un taux de croissance annuel de près de 23 % et un doublement de son portefeuille sur la même période.

Le CEO de Cofinimmo, Serge Fautré, déclarait d’ailleurs récemment que, s’il le pouvait, il revendrait volontiers son portefeuille d’immeubles de bureaux. Et le 28 septembre, la part de maisons de repos dans le portefeuille de la Sicafi augmentait encore suite à l’achat de l’une d’entre elles à Uccle et, surtout, à la vente, pour quelque 60 millions d’euros, de deux immeubles de bureaux bien occupés à Bruxelles (Montoyer-Science, quartier européen) et Anvers (Veldkant).

Cependant, peu d’acteurs institutionnels investissent dans ce marché de niche : le secteur des maisons de repos exige une connaissance très spécifique, des économies d’échelle et une taille de portefeuille suffisante pour limiter les risques de contrepartie. “Pourtant, fait remarquer Vincent Leroux, au vu des expériences française et anglaise, où les opérateurs gèrent des portefeuilles de 10.000 à 40.000 lits, de grandes marges de consolidation subsistent encore chez nous. La concentration et la professionnalisation des acteurs est un signe de maturité du marché qui rassure les investisseurs, ces derniers disposant ainsi de baux plus solides.” Selon l’analyste, la croissance des principaux opérateurs et le partenariat avec les principaux propriétaires sont prometteurs. Une question stratégique se pose toutefois : celle de la disponibilité des produits, ou plus exactement des licences d’exploitation de lits, préalable à tout nouveau développement.

Philippe Coulée

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