Immo: où les super-riches préfèrent-ils investir ?

Image d'illustration. © REUTERS

Ils ont plus de 30 millions de dollars dans leur portefeuille et ont une vision bien arrêtée de leur investissement en matière d’immobilier. Voici le profil de ces super riches, leurs destinations les plus prisées et les villes où ils devront investir demain. Avec une tendance générale, l’immobilier résidentiel haut de gamme s’ouvre au monde.

Il y a les riches. Il y a les très riches. Et il y a les très très riches. Ceux dont le bas de laine franchit allégrement la barre des 30 millions de dollars. Ils sont 212.615 dans le monde, dont une poignée en Belgique. Et pour eux, investir dans l’immobilier relève autant de la partie de plaisir que de la partie de Stratego. D’autant qu’ensemble, ils pèsent très lourd : 30.000 milliards de dollars (12 % de la richesse mondiale). Une étude publiée il y a peu par Barnes et Warburg, deux sociétés immobilières internationales spécialisées dans l’immobilier de prestige, s’est intéressée aux comportements de ces high net worth individuals (HNWI) et ont dressé un classement mondial des villes privilégiées en matière d’investissements. Une première du genre, intéressante à plus d’un titre. ” Nous avons pu publier pour la première fois un rapport très précis grâce à notre partenaire américain Wealth X, conseiller en étude de marché, explique le Français Thibault de Saint Vincent, président de Barnes. Il y a en tout cas eu quelques surprises dans ce classement. Je ne m’attendais pas à voir Tokyo et Sydney si bien placées. Suite à cette étude, nous allons d’ailleurs ouvrir d’ici peu un bureau à Sydney ! La croissance y est à deux chiffres, ce n’est pas négligeable. ”

Un profil de self-made-man

Thibault de Saint Vincent, président de Barnes:
Thibault de Saint Vincent, président de Barnes: “Un des grands constats relatifs à l’immobilier de prestige, est qu’il se rétablit toujours.”© PG
Immo: où les super-riches préfèrent-ils investir ?
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Deux tiers de ces grosses fortunes sont des entrepreneurs, self-made-men qui plus est. On en retrouve près de 70.000 en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. Ils placent, en moyenne, 10 % de leurs actifs dans l’immobilier de prestige. Soit environ 2.700 milliards de dollars. De quoi leur conférer une certaine influence sur le marché. ” Ils achètent et vendent des propriétés dans les principales villes internationales et les lieux de villégiature d’exception, recherchant la sécurité, un système économique transparent et une stabilité sociale “, explique Heidi Barnes, fondatrice de Barnes. Vu les perspectives économiques, le nombre de gens fortunés devrait encore s’accentuer dans les années à venir pour atteindre, à l’horizon 2020, le seuil des 318.000 personnes. Une croissance qui devrait surtout se concentrer dans les pays de la région Asie-Pacifique.

Un investissement entre passion et raison

Investir dans l’immobilier haut de gamme est (encore) moins risqué que dans l’immobilier résidentiel classique.

Une précision : investir dans l’immobilier haut de gamme est (encore) moins risqué que dans l’immobilier résidentiel classique. Vu la situation exceptionnelle des biens, ils perdent très rarement de leur valeur. Un appartement avec vue sur la Fifth Avenue ou à Hyde Park restera toujours très prisé. La combinaison de trois critères déterminent en fait le choix d’un actif immobilier : les aspects financier, pratique et émotionnel. On voit par exemple que ces entrepreneurs cherchent avant tout à rester dans le même fuseau horaire, de même qu’ils visent la proximité d’écoles ou d’universités de renom. ” Ces choix les rassurent car ils mettent leur famille en sécurité tout en générant une plus-value sur leur placement immobilier “, note Thibault de Saint Vincent.

RHODE-SAINT-GENÈSE. Le loyer de cette villa neuve de 480 m2 s'élève à 7.000 euros par mois.
RHODE-SAINT-GENÈSE. Le loyer de cette villa neuve de 480 m2 s’élève à 7.000 euros par mois.© DR

L’aspect émotionnel n’est bien évidemment pas à négliger. Une belle localisation, une belle histoire ou une identité architecturale affirmée sont des éléments qui ne laissent pas indifférents. Quant à l’aspect financier, l’objectif n’est pas d’obtenir d’importantes plus-values mais un retour sur investissement assuré. Sans parler du fait que le rendement locatif est très stable pour ce type de bien. ” Quand on prend en compte tous les facteurs de décision, la propriété idéale doit bénéficier d’un bel emplacement, jouir d’excellents services de proximité et être unique, que ce soit en matière de prestations ou d’histoire, estiment les auteurs de l’étude, ajoute le président de Barnes. Tous ces critères doivent être réunis car les investisseurs fortunés ne font pas de compromis lorsqu’ils recherchent une résidence de prestige. ”

Un patrimoine qui n’est pas extensible

UCCLE. Située dans le Quartier Prince d'Orange, cette villa contemporaine de 788 m2 conçue par Bruno Erpicum est affichée à 4,5 millions d'euros.
UCCLE. Située dans le Quartier Prince d’Orange, cette villa contemporaine de 788 m2 conçue par Bruno Erpicum est affichée à 4,5 millions d’euros.© DR

Le comportement de ces grosses fortunes a d’ailleurs évolué : elles sont de plus en plus nombreuses à détenir plusieurs résidences secondaires ou pied-à-terre. La moitié des ultra high net worth individuals (UHNWI) possédant au moins deux propriétés alors que 10 % d’entre eux en détiennent cinq ou plus. Et leur portefeuille immobilier est habituellement assez simple à définir : une résidence principale située à proximité de leur entreprise, le plus souvent dans une grande métropole, et un second bien qui fait office de lieu de villégiature. ” Mais les promoteurs immobiliers sont allés trop loin, estime Thibault de Saint Vincent. Désormais, l’offre de propriétés d’une valeur d’au moins 8 millions de dollars est excédentaire et la demande est plus faible que prévu. ” Et Clelia Warburg Peters, présidente de Warburg Realty, d’ajouter : ” Le patrimoine immobilier a tendance à se réduire à mesure que la fortune personnelle augmente. Ainsi, une personne dont la richesse atteint 10 millions de dollars pourra posséder un appartement de 5 ou 6 millions de dollars. Mais si votre richesse est de 100 millions de dollars, il est peu probable que votre investissement dans l’immobilier atteigne 50 ou 60 millions de dollars. Je pense que de nombreux promoteurs n’ont pas compris cet aspect du marché. ”

La mondialisation des investissements

Londres, New York, Tokyo, Sydney et Paris. Un top 5 assez classique.

Quand on a de l’argent, le champ des possibles est bien évidemment plus large que son habituel pré carré. Et ce, grâce notamment à l’amélioration des moyens de transport, à la révolution technologique ou encore à l’évolution du monde des affaires, qui ont permis d’élargir les horizons. ” Les UHNWI disposent aujourd’hui des ressources nécessaires pour acquérir des résidences sur plusieurs continents, dans des objectifs aussi bien personnels que professionnels “, notent les auteurs du rapport. Des éléments qui font que l’investissement immobilier s’est nettement internationalisé ces dernières années pour les clients fortunés. ” La population UHNWI ne limite plus ses investissements dans son pays ou sur son continent, mais mondialise ses implantations, arbitre son patrimoine et reste à l’écoute des nouvelles opportunités et tendances, note Thibault de Saint Vincent.

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Pour ces self-made-men, vu que leurs entreprises sont implantées dans différentes villes internationales, ils passent beaucoup de temps dans les transports. Il est désormais plus judicieux de posséder des propriétés dans une ou plusieurs des principales places financières ou commerciales du monde, que sont notamment Londres, New York, Hong Kong ou encore Singapour. Par ailleurs, leurs enfants étudient et vivent de plus en plus à l’étranger, ce qui contribue également à l’extension de leur patrimoine immobilier à l’international. Ces trois facteurs (mobilité, technologie et mondialisation) ont non seulement favorisé les acquisitions immobilières des UHNWI dans différentes destinations internationales, mais leur ont également permis de bâtir leur fortune dans des contextes économiques très variés. ”

Une croissance en recul depuis deux ans

Dans le quartier très prisé du Prince d'Orange, cette propriété de 662 m2 datant des années 1930 est située dans un parc. Son prix ? 5,5 millions d'euros.
Dans le quartier très prisé du Prince d’Orange, cette propriété de 662 m2 datant des années 1930 est située dans un parc. Son prix ? 5,5 millions d’euros.© PG

Le contexte n’est toutefois pas flamboyant pour ces gens fortunés. Une série de pays ont lancé une vague de réformes fiscales visant à encourager les investissements locaux. D’autres éléments ralentissent le marché depuis deux ans. Que ce soit une croissance mondiale plus modérée, les sanctions internationales qui frappent les Russes – gros acteurs du marché entre 2000 et 2014, la chute des prix du pétrole, la menace terroriste ou encore l’instabilité politique liée au Brexit et à l’élection de Donald Trump. A contrario, on peut noter que la hausse de la population mondiale, l’expansion de la richesse en Asie, une offre mieux adaptée et la stabilité de l’immobilier sont des facteurs qui tendent à créer, à long terme, certaines opportunités. ” Un des grands constats relatifs à l’immobilier de prestige, est qu’il se rétablit toujours, lance Thibault de Saint Vincent. Les trois règles d’un bon investissement immobilier restent l’emplacement, l’emplacement et l’emplacement. Qu’il s’agisse de Londres, de New York, de Paris, ou d’un prestigieux lieu de villégiature ‘international’, l’importance de l’emplacement se capitalise sur le long terme. ” Cela s’explique notamment par le fait que les villes les plus prisées ne peuvent s’étendre à l’infini. Et qu’il n’y a qu’un seul Champs-Elysées, Hyde Park ou Central Park.

Le top 5 des villes les plus recherchées

Londres, New York, Tokyo, Sydney et Paris. Un top 5 assez classique. Ce classement a pris en compte une série de facteurs tels que la richesse culturelle, l’éducation, la mobilité, les risques limités d’investissement, la multiplication des entreprises, l’impôt foncier ou encore l’engagement écologique de la ville. Précisons que Bruxelles ne figure pas dans les 50 premières places. Un classement qui fait la part belle aux villes américaines, qui trustent la moitié des 25 premières places. ” Londres accueille les familles les plus aisées au monde et continue d’attirer les acquéreurs britanniques et internationaux, estime Alex Newall, directeur associé Hanover Barnes Private Office. On peut dire que suite au vote en faveur du Brexit, à une livre sterling plus faible, à des taux d’intérêt à moyen terme bas et au vaste choix d’un immobilier de luxe de qualité, 2017 sera une belle opportunité pour acquérir un bien immobilier à Londres. Elle demeurera une ‘ville inter- nationale’ avec laquelle il est difficile de rivaliser. ” Notons que le prix moyen d’un bien premium s’y élevait à 10,9 millions d’euros mi-2016, soit entre 50.000 et 60.000 euros/m2. Alors qu’à New York, les prix premium sont affichés à 34.642 euros/m2, ils peuvent atteindre 37.000 euros/m2 à Tokyo et 26.000 euros/m2 à Paris. Inutile de rappeler que ces gens fortunés se contentent rarement de 200 m2…

Par Xavier Attout.

Quel prix pour les bien haut de gamme ?

Il y a donc les biens de prestige, à partir de 1 million d’euros, en moyenne. Et les biens haut de gamme, un cran en-dessous. Avec la collaboration du bureau d’expertise de Crombrugghe & Partners, nous avons recensé les quelques développements neufs en la matière en Belgique. A Bruxelles, les projets de la Résidence Quadrian, du Louise 430, du The Cond’Or ou encore du Parc Hamoir à Uccle sont affichés entre 4.800 et 6.000 euros/m2. Leurs penthouses s’affichant même à plus de 10.000 euros/m2. En Brabant wallon, quelques projets commencent également à flamber comme celui de l’Agora mené par Eckelmans à Louvain-la-Neuve (plus de 4.000 euros/m2). A Namur, citons la Résidence Hôtel de la Plage, dont les prix dépassent 4.000 euros/m2. En province de Luxembourg, Les Balcons de la Semois, à Bouillon, sont dans la même veine. En Brabant flamand, citons le projet I love Hungaria, à Louvain, (4.000 euros/m2). A Gand, des projets tels que la Green Tower, les Bords de Lys ou la Résidence, située Sint-Widostraat, flirtent avec les 4.500 euros/m2. A Courtrai, la Résidence Domus permet de franchir allégrement la barre des 5.500 euros/m2. Alors qu’à Anvers, certains appartements de la Résidence Liberty atteignent 7.500 à 8.500 euros/m2. Même topo avec le Zuiders Dok III où certains appartements grimpent à 6.000 euros/m2.

“En Belgique, une villa de prestige est vendue au-delà de 4 millions”, Nicolas Frings, CEO de Barnes Belgium

A l’échelle belge, comment définissez-vous cet immobilier de prestige que l’on retrouve dans cette étude ?

C’est une notion compliquée à définir. Ces biens ont une situation exceptionnelle et disposent de caractéristiques rares, comme une architecture qui sort du lot, un degré de finition important ou une orientation idéale.

Combien de Belges peuvent être qualifiés de “high net worth individuals” ?

C’est difficile à dire. Nous ne disposons pas de données officielles pour déterminer les Belges qui possèdent un tel patrimoine, au-delà de 30 millions d’euros. Il y a un manque de transparence dans le système belge à ce niveau. Sans oublier le fait qu’un grand nombre de transactions sont actées par le biais de vente de parts de sociétés, un procédé qui sort des radars des notaires. Mais on voit néanmoins que les Belges sont de plus en plus nombreux sur ce marché.

Quel est le profil de vos clients ?

Nous retrouvons 60 % de Belges, 20 % de Français et 20 % d’autres nationalités. Ces derniers proviennent des institutions européennes ou de grandes sociétés établies à Bruxelles. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la majorité des transactions concernent donc des Belges. Même si l’arrivée des Français a entraîné une hausse des standards du luxe. Sans eux, on n’aurait jamais vu l’apparition de systèmes d’ascenseur hydraulique pour rejoindre son garage… Ils ont également fait évoluer la demande en matière de villas. De 300 à 400 m2 sur une parcelle de 50 ares, on est passé à des villas bien plus grandes, de 600 m2 sur des parcelles de 15 ares. Ce qui fait monter les prix.

Justement, dans quelle gamme de prix sommes-nous ?

A Bruxelles, le prix des biens de prestige avoisine les 8.000 euros/m2. Une belle villa se vend au-delà de 4 millions d’euros. Et les ventes les plus chères atteignent les 10 millions. Le marché y est très stable, ce qui est un grand avantage. Il s’est aussi assaini. Après une baisse l’an dernier suite aux inquiétudes liées au climat anxiogène, on sent depuis le début de l’année que la demande s’intensifie à nouveau. J’estime qu’ à terme, les prix pourraient encore grimper jusqu’à 15.000 euros/m2 si le bien est bien situé et qu’il dispose de toutes les finitions.

Dans quels quartiers retrouve-t-on ces biens ?

A Uccle (Prince d’Orange et Fort Jaco), dans le quartier de l’Observatoire et Dieweg pour le Lycée Français, à Molière et Brugmann, à Ixelles (quartier Louise, abbaye de la Cambre, jardin du Roi, étangs d’Ixelles, Châtelain), Etterbeek, Boitsfort, Woluwe, mais également dans le haut de Forest et de Saint-Gilles. Il y a également une demande pour Tervuren, Lasne et Waterloo. La situation est évidemment le facteur clé.

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