“Garder 15.000 logements inoccupés en Wallonie n’a aucun sens”

Paul Furlan © DR

Entre 15.000 et 20.000 logements sont inoccupés en Wallonie. Une problématique majeure pour les communes du sud du pays. Le ministre Paul Furlan entend redynamiser cette lutte par la mise en place d’un nouveau mécanisme de sanction qui entrera en vigueur en 2017. Ce qui devrait permettre de remettre sur le marché la moitié de ce parc d’ici 10 ans.

Le chantier est pratiquement bouclé. Il devrait atterrir au printemps 2017. Ce qui entraînera une profonde mutation du secteur du logement en Wallonie. Tant le volet public que privé est concerné par cette vaste réforme. Parmi les nombreuses mesures, l’une concerne la lutte contre les logements inoccupés. Une problématique ancienne que peu de politiques ont réussi à solutionner. Paul Furlan (PS), ministre wallon du Logement, tente à son tour le coup.

PAUL FURLAN. Selon les chiffres de mon cabinet, on estime qu’il y a entre 80.000 et 100.000 logements inoccupés en Wallonie. Soit 7 % du parc immobilier. Mais attention, ce chiffre est très large et recouvre également les secondes résidences ou les chalets de centres de vacances. Ce n’est donc pas le plus fiable. Par contre, dans cette masse, il y aurait entre 15.000 et 20.000 logements privés vides, qui nécessiteraient une importante rénovation.

Comment les remettre sur le marché ?

C’est justement l’objet de la réforme que nous allons lancer et qui, je l’espère, sera adoptée d’ici peu par le gouvernement. L’idée est d’augmenter graduellement les sanctions (amende administrative, prise en gestion volontaire du logement) envers les propriétaires. Nous allons proposer la gestion publique du bien, et une rénovation si nécessaire (via les agences immobilières sociales). Les loyers seront reversés aux propriétaires. Mais si le propriétaire ne répond pas, nous passerons à une procédure de prise en gestion unilatérale. Le bien est réquisitionné mais pas sa propriété. Dernière option : l’action en assignation par voie judiciaire.

Quels sont les enjeux principaux de cette lutte ?

Ils sont nombreux. Chacun a droit à un logement décent. Laisser un logement vide n’a aucun sens (le plus souvent, cela s’explique par l’âge avancé des propriétaires, l’impossibilité d’obtenir un crédit hypothécaire pour rénovation ou encore des difficultés d’entretien et de gestion du bien, Ndlr). Un bien inoccupé entraîne une dégradation et une dépréciation de l’immobilier aux alentours, une paupérisation du quartier ou encore des squats. Si nous souhaitons réenchanter nos villes, il faut s’en occuper.

La problématique est ancienne. Pourquoi cette réforme fonctionnerait-elle aujourd’hui alors qu’elle n’a jamais porté ses fruits auparavant ?

La loi sur la réquisition des logements inoccupés n’a jamais été appliquée. La taxation communale était quant à elle appliquée par les communes mais pas suffisamment. Nous allons aller plus loin. Notamment avec un mécanisme de sanctions qui fait que si une commune ne joue pas le jeu, nous lui couperons l’accès aux subsides du Fonds régional pour les investissements communaux (pour les travaux de voirie, d’égouttage, d’éclairage public ou de rénovation de bâtiments public). A terme, d’ici 10 ans, j’espère que la moitié du parc de logement inoccupé sera réhabilité et remis sur le marché.

Un des enjeux principaux semble être de définir ce qu’est un logement inoccupé et de savoir comment les recenser. Comment allez-vous procéder ?

Par le biais des acteurs de terrain. Nous allons offrir aux communes une méthode et un cadre. Aucune commune n’a envie de voir son centre-ville déserté et inoccupé, elles vont donc coopérer. Lorsqu’elles suspectent qu’un logement est inoccupé, elles pourront demander à nos services d’effectuer un contrôle des balises de consommation. La consommation annuelle doit être supérieur à 5 m3 d’eau et 100 kWh d’électricité.

Les propriétaires qui ne souhaitent pas louer leur bien doivent-ils avoir peur ?

Non, ce n’est bien évidemment pas l’objectif. Celui qui possède une seconde résidence au Lac de l’Eau d’Heure ne doit pas s’inquiéter non plus. Chacun aura la possibilité de justifier son choix de ne pas occuper son bien ou d’expliquer qu’il s’agit d’une seconde résidence.

Propos recueillis par Xavier Attout.

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