En Cornouailles, une nouvelle ville émerge sur les terres du prince Charles

© Reuters

Charles, l’héritier du trône britannique, se veut un prince bâtisseur. Sous son égide et sur ses terres de Cornouailles, dans l’extrême sud-ouest de l’Angleterre, une nouvelle ville dans la ville est en cours de construction à Newquay, avec l’ambition de revitaliser cette zone située dans une région pauvre, anciennement minière.

A distance de marche des côtes rocheuses et du centre de cette station balnéaire prisée des surfeurs, 137 maisons sont déjà sorties de terre depuis le lancement, en 2014, de la construction de Nansledan (“large vallée” en cornique), nouvelle extension de Newquay voulant allier tradition et modernité.

“Nous voulons créer une communauté viable. Nous allons aussi construire une école, une église, des bureaux, des commerces”, détaille Alastair Martin, dirigeant du Duché de Cornouailles, gestionnaire privé des avoirs du prince Charles, qui opère en coopération avec les autorités locales.

Au total, quelque 4.000 logements doivent être érigés en 40 ans sur le site de 218 hectares appartenant au Duché. “Pour une ville de seulement 20.000 personnes, c’est beaucoup”, souligne le conseiller municipal Louis Gardner.

L’ambition est de “régénérer la ville existante et diversifier son économie”, explique à l’AFP l’architecte, Hugh Petter, du bureau Adam Architecture. Celle-ci dépend principalement du tourisme et des emplois saisonniers faiblement rémunérés.

Les maisons neuves, d’un ou deux étages, s’alignent le long de rues proprettes aux noms corniques, avec leurs façades de pierre ou de plâtre pastel, rehaussées de toits d’ardoise typiques de ce coin du pays.

“C’est quelque chose de vraiment bien pour Newquay ainsi que pour moi”, s’enthousiasme Theresa Ferguson, une employée de l’aéroport tout proche qui s’est installée là en juin, en faisant fi du remue-ménage ambiant.

Les bâtisses vertes, roses ou bleues rappellent à Mme Ferguson le petit village d’origine de sa mère en Irlande, Allihies.

Abeilles et arbres fruitiers

Mais Nansledan se veut aussi un exemple de ville moderne et durable, traduisant sur le terrain deux passions du prince Charles, l’architecture et l’environnement.

“Il est très impliqué (…) et se rend sur place deux fois par an”, affirme M. Petter, l’architecte.

L’héritier du trône britannique n’en est pas à son coup d’essai. Le projet s’inspire des principes déjà éprouvés à Poundbury, nouvelle localité érigée à Dorchester (sud de l’Angleterre) et parfois critiquée pour son côté “Disneyland” en raison des styles architecturaux hétéroclites adoptés.

Plus homogène dans son genre, Nansledan veut offrir un cadre de vie à l’opposé des cités-dortoirs de banlieue où la voiture est reine, et privilégier proximité, mixité sociale et nature.

“Vous pourrez emmener votre enfant faire de la balançoire tout en surveillant vos légumes”, dit Hugh Petter en évoquant les espaces de jeux intégrés aux jardins ouvriers. Les arbres du lotissement seront tous fruitiers, les plantations dans les rues, comestibles et des briques d’accueil pour abeilles intégrées aux maisons.

Au-delà du style de vie, l’objectif est de créer un emploi par foyer, grâce aux nouvelles activités que le projet est censé attirer sur place (commerces, bureaux…), et de construire 30% de logements sociaux ou de logements moins chers que le marché, indiscernables des habitations de plus haut standing.

Les acheteurs ou locataires ciblés sont les habitants locaux, et non des vacanciers en quête de résidence secondaire, dans cette région où la multiplication des maisons de vacances est accusée d’avoir fait monter en flèche les prix de l’immobilier.

“Newquay a besoin de plus de logements abordables et je pense que Nansledan pourrait aller plus loin encore” que les 30% de logements sociaux promis, estime Louis Gardner, favorable à une proportion plus élevée.

Les maisons mises en vente le sont souvent à plus de 300.000 livres (environ 340.000 euros), ce qui est “hors de portée de la famille moyenne”, déplore-t-il.

Globalement, la construction de Nansledan ne suscite toutefois que peu de critiques.

Mais la cherté des maisons était déjà le grief principal émis contre le projet de Tregunnel Hill, 174 logements déjà construits par le Duché dans la ville, un modèle miniature de Nansledan. Des centaines d’habitants s’étaient alors aussi opposés au bétonnage de l’espace vert où ils ont été érigés.

Quid des emplois ?

Grâce à Nansledan, “il y aura un gros dividende économique pour la population et les entreprises locales”, assure Hugh Petter, alors que 21 millions de livres (23,7 millions d’euros) ont déjà été investis.

La promotion de l’économie locale commence dès la construction, avec l’utilisation de matériaux extraits de carrières environnantes, comme l’ardoise ou le granit.

“Nous avons passé les cinq dernières années à former une main-d’oeuvre capable d’atteindre les standards élevés qui sont exigés de nous”, explique Mark Jackson, chef de chantier chez Morrish Builders, un des trois entrepreneurs qui emploient au total une centaine de personnes sur le site.

Grâce à ce projet entre autres, Fraser Parkin, coiffeur dans le centre-ville, a déjà observé une hausse de la fréquentation de son commerce, qui n’est plus tributaire de la seule saison touristique.

Il s’inquiète toutefois: les nouveaux arrivants pourraient “avoir du mal à trouver un boulot”.

Créer suffisamment d’emplois qualifiés pour les habitants les plus aisés, notamment, sera “un défi”, abonde Louis Gardner.

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