Bruxelles veut reprendre en main le levier touristique

© Eric Danhier

Doubler le nombre de touristes à Bruxelles en 10 ans, voilà un objectif ambitieux. Pour y arriver, les responsables politiques développent diverses idées : notamment dynamiser les congrès et promouvoir la culture à la portée de tous. Les hôtels en profiteraient.

Après des années de réflexion et de tâtonnements, l’asbl VisitBrussels (directement liée à la Ville de Bruxelles et à la Région bruxelloise), née des cendres du BITC, est récemment sortie de l’ombre, avec une nouvelle image et de nouvelles ambitions. Ses objectifs : soutenir et réguler le marché hôtelier bruxellois, pérenniser la destination sur le long terme et renforcer le taux d’occupation de fin de semaine.

“Durant la crise, nous avons enregistré, via notre nouvelle base de données en ligne, des baisses d’occupation de 35 %. Le nombre de nuitées a chuté de 3 à 2 millions dans le tourisme d’affaires. Et encore : cela n’a pas été pire parce que nous avons pu faire progressivement grossir la clientèle “loisirs” via plusieurs initiatives touristiques porteuses, comme Plaisirs d’hiver, au moment des fêtes de fin d’année, ou l’ouverture et la promotion du musée Magritte”, explique Patrick Bontinck, le nouveau directeur de VisitBrussels, issu en droite ligne du secteur hôtelier, hier encore à la tête de la Brussels Hotels Association (BHA).

Une récente enquête de fond sur le secteur hôtelier londonien montre à quel point le mix affaires/loisirs est porteur en termes d’offre hôtelière dans une métropole. Idem pour le segment du luxe ou bien l’impact de l’offre en ligne.

Une étude concluante… à mettre en musique

A l’échelle bruxelloise, l’objectif fixé est ambitieux et chiffré : doubler le nombre de touristes dans la capitale en 10 ans. Cela impliquerait la création de 33.000 emplois, dont 15.000 indirects. Les premières filières visées sont connues : les congrès internationaux, via Square, la nouvelle infrastructure mise en place au Palais des Congrès, et le nouveau centre de congrès planifié au Heysel, à l’horizon 2020. Mais il y a également la clientèle business à faire grossir et, last but not least, celle des touristes. L’échevin de tutelle, Philippe Close, fixe la barre : passer de la formule la plus répandue actuellement _ une fois un jour par an_ à celle, commercialement bien plus porteuse, du cinq fois deux jours par an, en fidélisant les visiteurs potentiels déjà ciblés. Pour cela, il faudra multiplier les occasions de séjour tous azimuts, y compris commerciales, comme l’ouverture des commerces du centre en soirée, déjà lancée dans le Pentagone, ou élargir la période de soldes, par exemple.

“Il nous faut également mettre sur pied une “tour de contrôle” qui puisse planifier les moments de pics d’occupation, sur le modèle des aiguilleurs du ciel”, pose encore Philippe Close. Et de rappeler qu’en octobre 2010 la CEE a ouvert le sommet des Régions au même moment que le sommet Europe-Asie. L’afflux qui en a découlé _ quelque 10.000 personnes _ s’est révélé ingérable. “Il faut réguler à long terme l’offre et la demande hôtelières lorsque c’est encore planifiable. Par ailleurs, nous allons ouvrir 1.800 chambres sur les trois prochaines années en Région bruxelloise”, assure l’échevin. Une nouvelle concurrence dommageable pour l’offre existante ? “Non, on répond à un besoin de diversification réel et on le planifie”, assurent les gestionnaires publics.Pour dynamiser l’offre de congrès et réguler les nuitées dans la capitale, VisitBrussels a mis sur pied, en collaboration avec la Brussels Hotels Association, une centrale de réservation autonome à laquelle tous les hôtels bruxellois adhèrent, le Brussels Booking Desk. Ce dernier dispose d’un droit de préemption sur les chambres d’hôtel dans la capitale jusqu’à six mois maximum avant la date de la nuitée.

Tabler sur les musées

Pour faire fonctionner l’asbl, la Ville verse une subvention unique de 150.000 euros, émanant d’une partie de la taxe sur les nuitées enregistrées dans les hôtels. Pour Philippe Close, l’échevin du Tourisme, Bruxelles a un bel atout à jouer : celui de la culture à la portée de tous. “L’offre locale se commercialise sous l’impulsion d’acteurs éclairés comme Michel Draguet (musée Magritte) ou Paul Dujardin (Bozar). Le récent succès du musée Magritte représente à lui seul 6 millions de rentrées pour l’Etat au minimum. Vous vous rendez compte de ce que l’on peut financer comme actions avec cela ? Sans compter le nombre de nouveaux visiteurs que cette nouvelle carte de visite draine”, insiste-t-il.

Selon l’échevin, en matière de stratégie commerciale muséale, Bruxelles n’en est encore qu’aux premiers coups d’essai. “Il faut fusionner les collections existantes pour les présenter autrement et les revaloriser commercialement. Ce n’est pas, quoi que disent certains, les brader”, commente-t-il.

Remanier des collections et leur dédier certains lieux, dépoussiérer les musées historiques… Michel Draguet serait chaud pour faire avancer ces dossiers mais il n’aurait pas encore toutes les clés. “Les bâtiments existent ; nous, on a les ouvertures…”, lâche Philippe Close. Qui reparle à demi-mots, notamment, d’un Dexia Art Centre à la Bourse.

Autre projet lancé par les deux compères, toujours pour dynamiser ce réseau hôtelier public et véhiculer l’offre culturelle et touristique auprès des visiteurs d’un jour : la TV Hotel, une chaîne de télé spécifique qui sera diffusée dans tous les hôtels bruxellois. “Sans argent public : il est prévu de l’autofinancer”, garantit-on à la Ville.

Philippe Coulée

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