Twitter peut-il un jour devenir rentable ?

© Reuters

Le spécialiste des gazouillis a entré, hier, ses documents officiels pour son introduction en Bourse. Ils lèvent le voile sur le montant que Twitter espère lever, et sur ses résultats financiers. Mais, surtout, sur la vulnérabilité de son modèle.

Un milliard de dollars. C’est le montant que Twitter voudrait lever avec son entrée en Bourse, “aussi vite que possible”. C’est en tout cas ce qui ressort des documents introduits hier auprès du gendarme de la bourse américaine, la SEC. Toutefois, Twitter ne précise pas quelle est la part de de son capital qui sera proposée aux marchés.

Par contre, plus intéressant, Twitter dévoile pour la première fois certains chiffres financiers. Avec ses 218 millions d’utilisateurs, le site a généré un chiffre d’affaires de 317 millions de dollars en 2012. En forte hausse : il a triplé par rapport à 2011. Et sur les 6 premiers mois de 2013, il a encore grimpé à 253,6 millions de dollars. Bref, les activités de Twitter prennent bel et bien de l’ampleur. C’est toutefois relativement normal puisque cela ne fait que peu de temps seulement que le réseau social a commencé à monétiser son audience avec de la publicité.

Jack Dorsey, le fondateur de Twitter, et ses équipes ont mis au point quelques formats publicitaires à destination des annonceurs désireux de mettre en avant leurs marques ou leurs produits.
“Il existe trois options différentes de pub sur Twitter, détaille Benjamin Snyers, head of Advertising chez Social Lab Group. Il y a le promoted tweet qui permet à un annonceur de faire augmenter la visibilité de ses messages auprès de certaines catégories d’utilisateurs. Il est aussi possible de sponsoriser des profils. Autrement dit, de payer pour que Twitter suggère à ses utilisateurs de suivre votre compte. L’objectif est, alors de gagner des followers. Enfin, le promoted Trend : vous payer pour qu’un hashtag (un genre de mot clé, ndlr) apparaisse dans ceux qui cartonnent le plus sur Twitter.” Ces trois formats, Twitter les propose depuis pas mal de temps aux Etats-Unis et dans d’autres grands marchés (France, Angleterre…). En Belgique, certaines agences qui travaillent avec Twitter en France peuvent déjà proposer ces pubs à leurs clients. “On peut commencer une campagne avec 5.000 euros, précise Benjamin Snyers. Le coût moyen d’une interaction (un clic, un partage, etc) sur un tweet sponsorisé tourne autour de 0,15 à 0,4 euros chez Twitter alors qu’ils coûte plutôt entre 0,5 et 0,6 euros chez Facebook.” Acquérir de nouveaux suiveurs sponsorisés coûte, en moyenne, entre 0,5 et 1 euro. Par contre, réserver un “trend” pour 24 h varie selon les pays. En Belgique, il ne coûte que 10.000 euros mais atteindrait 200.000 euros aux Etats-Unis !

Investissements pour croître

Et si l’offre publicitaire n’est pas encore officiellement disponible dans tous les pays du monde, Twitter cherche à développer ses équipes commerciales. Pour la Belgique, par exemple, où le réseau n’est pas encore vraiment présent Twitter cherche un responsable commercial qui sera engagé par son entité à Dublin.
Reste que l’expansion de Twitter sur toujours plus de marchés lui demande(ra) de gros investissements. Ce qui pourrait creuser, encore sa perte financière. Car des documents introduits hier, on apprend aussi que Twitter enregistrait, en 2012, une perte d’environ 80 millions de dollars. Une perte qui se creuse encore plus en 2013 : 69 millions sur le seul premier trimestre de 2013 !
Cette situation pousse, d’ailleurs, Twitter à la plus grande prudence. “Nous pourrions ne pas être capables de devenir ou de rester rentables, prévient le réseau social. Notre performance financière est et restera déterminée de manière importante par notre capacité à augmenter le nombre d’utilisateurs et leur niveau d’engagement sur notre plateforme, de même que le nombre de pub”.

Plein feu sur la télévision

Pour mettre toute les chances de son côté, Twitter espère bien s’engouffrer dans un créneau publicitaire spécialisé : celui de la télévision. Car s’il est un marché particulièrement ciblé par Twitter, c’est bien celui de la petite lucarne. “Des études montrent que pas loin de 75% des téléspectateurs font autre chose en même temps qu’ils regardent la télévision, note Christophe Chatillon, fondateur de Tapptic et Screenity, deux start-up spécialisées dans les applis mobiles. Et beaucoup utilisent leur smartphone ou leur tablette en regardant des programmes… et ils partagent leurs impressions sur Twitter. C’est ce qu’on appelle la tendance du second screen. Les chaînes de télé sont d’ailleurs poussées par le réseau social pour prendre part à ces conversations et à canaliser les flux qui les concernent sur Twitter.” Les outils que Twitter développe sont destiné à tirer un maximum profit de cette (nouvelle) réalité. Le site web commence d’ailleurs à mettre sur le marché, avec des chaînes de télé (dont récemment avec TF1) des formats publicitaires co-vendus. La chaîne peut partager des vidéos de ses programmes, les faire sponsoriser par un annonceur et Twitter se charge d’en assurer la plus grande visibilité aux groupes cibles. TF1 a commencé la commercialisation de ce nouveau format en tout début du mois de septembre. Le réseau social a la ferme intention de se positionner en tant que partenaire des chaînes et de jouer sur l’amplification possible des messages publicitaires de manière synchronisée télé/Twitter. D’ailleurs, lors du Superbowl 2013, la grand messe sportive du début d’année aux USA où les plus gros annonceurs de la terre rivalisent d’idées (et de millions de dollars), plus de 50 % des publicités télés intégraient Twitter. Sera-ce assez convaincant pour les marchés ?

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