Smartphones: à qui profitent les grandes manoeuvres?

© REUTERS/Nicky Loh

En dix jours, le paysage concurrentiel dans le secteur de la mobilité s’est brutalement recomposé. De l’avis des experts interrogés, les gagnants se nomment Apple, Google et Qualcomm. Pour RIM, les choses se compliquent.

Le 15 août dernier, l’annonce du rachat de Motorola Mobility par Google pour 12,5 milliards de dollars a eu l’effet d’une bombe dans le monde de la mobilité. Le moteur de recherche et créateur du populaire système d’exploitation mobile Android s’offrait ainsi un de ses partenaires, au risque de se mettre à dos tous les autres dont LG, HTC, Samsung ou encore Sony-Ericsson.

Pour Google, pas question d’intégrer Motorola

Pour expliquer sa décision, le nouveau patron de Google, Larry Page, invoque les 24 500 brevets de Motorola qui protégeront Android des procès pour violation de brevets intentés par Apple et Microsoft. “Même Motorola, qui utilise pourtant Android pour ses terminaux mobiles, avait menacé de s’en prendre aux autres fabricants partenaires de Google. Une situation qui a dû accélérer la décision de Google”, explique l’analyste Rob Enderle.

En revanche, pas question d’intégrer l’activité de Motorola et ses quelques 19 000 salariés, spécialisés dans le matériel, avec celle du géant d’Internet, qui préfère développer du logiciel. Une stratégie qui facilitera le cas échéant une cession de Motorola, extirpé de ses brevets, à un autre fabricant Android par exemple. “Personne n’a encore réussi à licencier son logiciel à des fabricants et, dans le même temps, les concurrencer avec son propre matériel”, ajoute Michael Gartenberg, analyste chez Gartner. Pas sûr en effet, que Google tienne à réitérer les échecs d’Apple, Palm et plus récemment de Microsoft avec son téléphone KIN ou Nokia avec Symbian.

Et si Qualcomm rachetait WebOS ?

La semaine suivante, c’était au tour de HP de vouloir fermer sa division mobile, après l’échec des ventes de sa tablette TouchPad et de sa nouvelle génération de smartphones. Du coup, HP ne sait plus quoi faire de WebOS, le système d’exploitation mobile qu’il a racheté avec Palm pour 1,2 milliard de dollars. Le licencier ou tout simplement le vendre à un autre constructeur ?

“Qualcomm me semble être le mieux placé pour faire de WebOS un concurrent sérieux à Android ou Windows Phone 7 en le proposant avec ses puces ARM (Snapdragon)”, estime l’analyste Jack Gold. Une décision logique puisque WebOS ne fonctionne aujourd’hui qu’avec les processeurs Snapdragon. “Qualcomm fournirait alors une solution complète aux constructeurs de smartphones et de tablettes, incluant la puce, WebOS et l’app store. Ce qui lui donnera une longueur d’avance sur son concurrent principal, Nvidia”.

RIM va tenter de sauver sa peau en devenant compatible Android

Le grand perdant de ces grandes manoeuvres estivales est RIM. Déjà derrière Google, Apple et Nokia dans les smartphones, la part de marché du fabricant des Blackberry enregistre une véritable chute libre aux États-Unis, alors que sa tablette ne convainc toujours pas.

“Si RIM n’installe pas Android sur le PlayBook, comme promis, cette tablette connaîtra le même sort que la TouchPad de HP”, prédit Orlando Portale, le directeur technique du centre de santé Palomar à San Diego, qui a choisi d’équiper les médecins du plus grand hôpital des États-Unis avec les tablettes pro de Cisco (CIUS), sous Android.

Pour le canadien, le salut pourrait venir de la sortie début 2012 de la prochaine génération de son logiciel pour Blackberry, QNX. D’après les informations de Bloomberg, les smartphones et les tablettes sous QNX seront compatibles avec les applications Android.

Mais entre temps, Apple aura lancé son iPhone 5, Google aura fourni deux nouvelles versions d’Android et Microsoft-Nokia, leur premier smartphone. Plus que jamais, l’avenir de RIM semble des plus incertains.

Jean-Baptiste Su (L’Expansion.com), dans la Silicon Valley

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