Le roaming “gratuit” ? Ce n’est pas pour tout de suite…

Image d'illustration. © istock

Les frais d’itinérance sur les télécommunications en Europe ne seront finalement pas supprimés avant 2018.

Le consommateur européen devra encore patienter avant d’utiliser son smartphone sans crainte en-dehors des frontières de son pays. Alors que le Parlement européen avait voté en avril dernier l’abolition des frais de roaming à partir du 15 décembre 2015, le Conseil européen fait machine arrière. La haute instance représentant les Etats membre vient de donner mandat à la présidence lettonne pour négocier un nouveau cadre réglementaire.

Il n’est donc plus question de supprimer les frais d’itinérance ou de roaming. Ces frais supplémentaires, dont les consommateurs doivent s’acquitter lorsqu’ils téléphonent, envoient des messages ou utilisent l’Internet mobile, seront d’application jusqu’en 2018. Au moins. Le Conseil charge en effet la Commission d’adopter un plan, d’ici la mi-2018, visant à supprimer progressivement les frais de roaming.

D’ici là, une nouvelle réglementation devra voir le jour. Celle-ci imposera aux opérateurs d’octroyer à leurs clients un volume minimum (à définir) de communications à l’étranger qui ne seront pas surtaxées. Au-delà de ce ” package de base “, les opérateurs pourront continuer d’appliquer les frais de roaming.

Pilule amère

Du côté des associations de consommateurs, la pilule est amère. ” Nous sommes extrêmement déçus, pointe Julie Frère (Test-Achats). Le lobbying des opérateurs télécoms a de nouveau permis d’éviter la seule solution qui s’impose : la suppression pure et simple des frais de roaming. “

Les frais d’itinérance représentent des rentrées non négligeables pour les opérateurs. Chaque année, ceux-ci se plaignent d’ailleurs de la réglementation européenne, qui a durci progressivement les montants maximum que les opérateurs peuvent facturer à leurs clients itinérants (pour le détail sur l’évolution de ces plafonds, cliquez ici).

Sur la seule année 2014, Proximus estime que l’impact de la régulation européenne en matière de roaming a coûté 35 millions d’euros à l’entreprise. Chez Mobistar, l’impact est estimé à 22,2 millions d’euros.

Tarifs prohibitifs

Malgré cette régulation européenne, et malgré des plans tarifaires plus avantageux pour les clients ” voyageurs ” développés par certains opérateurs, les tarifs de roaming restent exorbitants pour la plupart des consommateurs européens. Facturer le Mb consommé à 0,20 euro, c’est clairement prohibitif. Et cela explique pourquoi les clients débranchent l’Internet mobile sur leur smartphone dès qu’ils quittent leur pays.

Il faut néanmoins rappeler que les opérateurs ne comptabilisent pas ces frais dans le simple objectif de plumer leurs clients (enfin pas seulement). Le marché du roaming est d’abord un marché B2B : les opérateurs se facturent entre eux l’utilisation de leur réseau. Orange facture à Proximus les minutes, les SMS et les données consommées en France par les clients de l’opérateur belge.

La question primordiale est donc : les opérateurs payent-ils le juste prix à leurs homologues étrangers ? De cette facture initiale découlent théoriquement les frais répercutés au client final. Selon les associations de consommateurs, ce qui est clair, c’est que les montants facturés aux clients sont trop élevés par rapport au coût réel du roaming pour les opérateurs.

Gagnants et perdants

Ces prix facturés d’un opérateur à un autre sont eux aussi limités par la réglementation européenne. Mais à ce petit jeu de facturation entre opérateurs européens, certains gagnent et d’autres perdent. En gros, les pays les plus touristiques bénéficient plus du roaming que les pays moins touristiques… comme la Belgique. Si on supprime les frais de roaming facturés au consommateur final, les opérateurs belges devront toujours payer les opérateurs étrangers quand leurs clients utilisent un réseau en-dehors des frontières belges. En contrepartie, les opérateurs étrangers continueront à payer les opérateurs belges lorsque leurs propres clients se déplacent en Belgique. Mais si l’on fait la balance des rentrées et des dépenses, les opérateurs des ” petits pays peu touristiques ” sont dans une position moins favorable que les autres : ils payent plus qu’ils ne reçoivent.

Une solution pourrait être de supprimer totalement les frais de roaming payés entre opérateurs. Mais dans ce cas-là, un autre problème surgira. Certains opérateurs seront tentés de proposer des forfaits mobiles à des consommateurs vivant dans d’autres pays européens, à des tarifs plancher. Imaginons un opérateur irlandais qui propose des forfaits mobiles aux consommateurs belges. Ces clients belges subtilisés aux opérateurs belges utiliseront le réseau de ces mêmes opérateurs belges, sans que ces derniers soient rémunérés par l’opérateur irlandais.

Ces problèmes ont visiblement semblé insolubles aux Etats membres. Au point de les faire flancher devant le lobbying des opérateurs télécoms.

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