La réalité virtuelle promet de révolutionner le monde de la télé

La réalité virtuelle filmée au service du documentaire. Masai, dans la série Nomads : la magie opère... © FELIX & PAUL STUDIOS

La réalité virtuelle était jusqu’à récemment l’apanage des créateurs de jeux vidéo, mais les producteurs estiment que cette technologie est sur le point d’exploser et de révolutionner la manière de faire de la télévision.

Le studio CBS Digital à Los Angeles, en pointe dans ce domaine, a développé “Parallax”, un système de réalité virtuelle avec lequel il n’y aura plus besoin d’aller tourner sur le terrain.

L’entreprise californienne a scanné au laser un grand nombre d’endroits aux Etats-Unis et peut apposer sur les formes géométriques relevées des images haute résolution qui donnent des décors virtuels en trois dimensions dans lesquels des acteurs peuvent jouer. Sans avoir besoin de sortir du studio donc.

Ainsi, dans les studios de CBS à Los Angeles (sud-ouest des Etats-Unis), deux acteurs jouent dans une pièce recouverte de murs verts, avec des caméras installées au plafond. Mais ce que voit le réalisateur sur son écran de contrôle, ce sont ces personnages se tenant par la main au-dessus des chutes du Niagara ou devant la Tour Eiffel.

“Le principal avantage, c’est de pouvoir contourner les restrictions traditionnelles auxquelles les réalisateurs doivent faire face”, explique Craig Weiss, directeur de la création de CBS Digital. “Vous n’avez pas à aller filmer de nuit, vous êtes en mesure d’amener le monde dans le studio: vous avez donc plus de flexibilité et vous pouvez travailler beaucoup plus vite”.

Reprendre le contrôle

Avant tout, Parallax permet au studio CBS de faire de grosses économies: une importante partie des coûts de production est en effet consacrée à réserver des lieux de tournage et à s’y rendre pour filmer. Ces coûts se multiplient lorsqu’il faut attendre qu’il arrête de pleuvoir, ou que la lumière soit exactement la même que la veille.

Les décors virtuels de Parallax permettent aux réalisateurs de tourner en une journée ce qui prendrait trois semaines en décors extérieurs traditionnels, affirme le studio. Et les équipes de production peuvent être réduites de moitié.

Selon Craig Weiss, une poignée de techniciens ont récemment travaillé à cartographier minutieusement deux pâtés de maisons à New York (nord-est), chaque coin, chaque fissure, chaque corniche, en moins de 14 heures.

“Après un investissement initial, le coût d’utilisation du studio virtuel peut, dans certains cas, permettre d’économiser 100% des coûts de tournage sur place”, affirme George Bloom, producteur exécutif chez CBS Digital.

M. Bloom estime que Parallax permet également aux metteurs en scène de reprendre le contrôle: “Quand vous êtes réalisateur, vous avez parfois l’impression de ne pas pouvoir tout contrôler, parce que vous vous en remettez à une société qui va vous faire des effets spéciaux et vous n’avez aucune idée de ce à quoi ça va ressembler avant cinq ou 10 jours”.

Les séries “The Last Man On Earth” de Fox et “American Housewife” de ABC ont toutes deux commencé à utiliser Parallax.

‘Hollywood dans une boîte’

CBS Digital fournit déjà une variété d’effets spéciaux à la série d’Amazon “Transparent”, ou à celles de Netflix “Daredevil”, “Stranger Things” et “Jessica Jones”.

Les seules limites de la réalité virtuelle à la télévision sont celles de l’imagination humaine, assure M. Bloom.

La nouvelle génération d’appareils de réalité virtuelle est née en 2010 de l’imagination d’un adolescent américain, Palmer Luckey: il avait alors construit un prototype qui allait au final devenir le casque Oculus Rift.

Palmer Luckey, aujourd’hui âgé de 24 ans, pèse 700 millions de dollars. Grâce à une campagne de financement participatif, il avait levé des fonds pour produire cet appareil en série. Facebook n’a pas mis longtemps à repérer le filon, déboursant deux milliards de dollars en 2014 pour racheter l’entreprise du jeune homme.

La technologie, prisée des amateurs de jeux vidéo, se développe rapidement mais n’en est qu’à ses balbutiements, et pour CBS Digital, le transfert de la réalité virtuelle vers la télévision aura des conséquences profondes.

Pour George Bloom, l’objectif ultime est que quiconque avec une bonne idée et du talent puisse un jour, sans avoir à se soucier de questions de budget, recréer “Hollywood dans une boîte” et tout tourner dans un seul studio.

“Un studio est un bel endroit, confortable pour travailler, et il peut devenir Paris, New York, le futur…”, conclut-il.

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