Devenir actionnaire de Facebook en 5 leçons

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L’entrée en Bourse de Facebook est l’événement boursier de l’année. Cela vaut-il le coup de devenir actionnaire ? Comment s’y prendre ? Quel est le meilleur moment ? Les réponses de spécialistes.

La société Facebook va être introduite au Nasdaq vendredi 18 mai, et mettre 421 millions d’actions sur le marché à un prix compris entre 34 et 38 dollars. De nombreux analystes doutent de la rentabilité. Mais si, comme 51% des Américains, vous estimez que l’action Facebook est un bon investissement, voici ce qu’il faut savoir avant de devenir actionnaire.


1. Peut-on encore souscrire à l’opération ?


La réponse est non, à quelques rares exceptions. “Cette introduction ne peut pas être souscrite par des clients particuliers en France. Aussi, pour les clients désireux d’investir dans cette société, la seule solution sera d’acheter des titres sur le marché, une fois l’introduction réalisée”, indique Isabelle Falloux, responsable Epargne chez BNP Paribas.


Les investisseurs institutionnels et les fonds d’investissement américains ont en effet réservé quasiment tous les titres. Selon Cédric Chaboud, gérant de la société de gestion de patrimoine SPGP, la part hors Etats-Unis serait seulement d’environ 20%.


Il y a bien une part réservée aux particuliers, qui s’élèverait quand même selon le New York Times à 20 ou 25% du flottant. Les courtiers eTrade, TD Ameritrade et Fidelity font partie des sociétés partenaires de l’opération, qui pourront proposer à leurs clients de souscrire à l’introduction en Bourse. Si vous êtes client, vous pouvez donc tenter votre chance. Mais c’est une niche, qui s’adresse aux plus fortunés des épargnants. “Chez eTrade, il y a beaucoup de semi-pros : des anciens traders, des gens fortunés… Les particuliers ne pourront placer un ordre que s’ils disposent de 500.000 à 700.000 dollars sur leur compte et qu’ils ont passé une trentaine d’ordres dans l’année. Ce n’est pas du tout monsieur et madame Toutlemonde”, explique Cédric Chaboud. Et encore, même ces clients là n’ont aucune garantie d’être servis.


Pierre-Antoine Dusoulier, président de Saxo Banque, confirme. “Nous sommes clients de JP Morgan, donc peut-être que nous aurons une allocation pour nos clients. Mais nous ne le saurons qu’au dernier moment. Ce sont seulement nos meilleurs clients qui pourront en bénéficier. Pour schématiser, ceux qui font vraiment du trading et qui possèdent un compte d’au moins 500.000 euros pour cela. Nous les appellerons directement pour leur proposer.”


Il y a un dernier moyen de participer quand même à l’introduction : en souscrivant des parts dans un fonds spécialisé. SPGP a lancé une Sicav dont la spécificité est d’investir dans les IPO, et dont le ticket d’entrée s’élève à 1000 euros. Elle devrait investir dans Facebook 1 à 2 % de son portefeuille, à condition que le prix définitif de l’action ne dépasse pas 36,5 dollars.


2. N’importe qui peut-il acheter et vendre des actions Facebook une fois le titre coté ?


Oui, en passant par son courtier ou sa banque habituels, et en les plaçant dans un compte titres. Il faut simplement garder à l’esprit, comme l’expliquait Les Echos en février, que ce type de transactions peut être un peu plus onéreux que pour des titres de la zone euro. La commission est plus élevée, et il faut compter avec le change puisque Facebook est coté en dollars.


3. Pourra-t-on investir dans Facebook via des Sicav, des fonds communs de placement… ?


Certainement, car les valeurs techniques sont aujourd’hui recherchées par les investisseurs et car Facebook est une entreprise de croissance, leader sur son marché. “Le titre Facebook pourra bien entendu être acheté par des fonds technologiques ou autres en fonction de l’opinion des analystes de marché et gérants d’OPCVM, comme n’importe quelle autre valeur”, précise Isabelle Falloux.


Cependant, gare au miroir aux alouettes des fonds sectoriels, avertit Cédric Chabaud. “Aujourd’hui les gens se réfugient dans les technologies, mais les rotations sont de plus en plus rapides et les retournements de plus en plus violents. Pour un particulier, prendre un pari sur un secteur est très compliqué. Il vaut mieux investir dans des Sicav diversifiées.”


4. Quand faut-il acheter ?


Dans la mesure où la demande est supérieure à l’offre, où les petits institutionnels et les particuliers ne seront pas servis lors de la souscription, il “va y avoir une énorme frustration”, estime Cédric Chaboud, qui va soutenir la demande lors des premiers échanges. C’est justement là qu’il faut éviter de se précipiter. Il y a aussi tous les fonds qui font de la gestion indicielle qui vont acquérir des titres car Facebook va devenir une composante forte dans l’indice Nasdaq et dans les indices technologiques. Mécaniquement, tout cela va faire monter le cours de l’action, et augmenter la volatilité car les spéculateurs vont en profiter pour prendre leurs bénéfices dans les premières heures.


“Attention aux gens qui vont se ruer au mauvais moment juste après l’introduction, avertit Pierre-Antoine Dusoulier. Quand on achète juste après l’IPO, cela prend beaucoup plus de temps pour faire un bénéfice.”


SPGP fait partie de ceux qui vont spéculer. “Nous allons acheter avec une stratégie tout d’abord court-termiste, pour peut-être ensuire revenir dans quelques mois. Nous aurons un trading relativement actif car nous pensons que ce sera relativement volatile”, confie Cédric Chaboud.


5. Est-ce une bonne affaire ?


“Ce n’est pas parce que vous adorez le produit que vous adorerez l’action”. Cette phrase du Chicago Tribune résume bien la situation des petits porteurs dans l’opération Facebook. Cette IPO est particulière, car tout le monde connaît le produit et tout le monde sait que la société a du succès. Ce n’est pas pour cela que tout le monde devrait avoir envie de devenir actionnaire.


“Paradoxalement, ceux qui sont intéressés par Facebook, ce sont ceux qui n’ont jamais participé à une IPO, juge Pierre-Antoine Dusoulier. Ceux qui sont habitués, je ne suis pas sûr qu’ils iront. Car à part LinkedIn, les dernières IPO du secteur s’échangent en dessous de leur cours d’introduction. Ils sont peut-être un peu échaudés. Et aussi parce que la valorisation est hyper élevée. On ne sait pas si c’est parce qu’il y a beaucoup de demande ou si c’est parce que la société le vaut intrinsèquement. Normalement, à l’introduction, ce n’est pas la loi de l’offre et de la demande qui détermine la valeur de l’action.”


Cédric Chabaud est plus optimiste. “Facebook, c’est l’émergence d’un nouveau sous-secteur que les gens ne comprennent pas. Ils font des bénéfices depuis plusieurs années. Ils monétisent leur base d’utilisateurs. Ce n’est pas un Groupon. On achète aussi un leader mondial. Je pense que Facebook devrait doubler sa capitalisation dans les cinq prochaines années.”


Malgré tout, il ne conseille pas aux particuliers d’investir dans l’action avec un réel objectif de faire fructifier un capital. “Ce genre de valeur est trop technique, il y a trop de flux, trop de volatilité. Il faut connaître le secteur et les valorisations, les points hauts et les points bas…” Bref, décrocher le gros lot est un travail de pro. “Si votre seul lien avec l’opération, c’est d’être membre de Facebook, il vaut mieux passer votre chemin”, conclut Pierre-Antoine Dusoulier.


Raphaëlle Karayan, L’Expansion.com

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