Comment Intel veut conquérir les smartphones

© Reuters

Intel a annoncé au CES de Las Vegas des partenariats avec Motorola et Lenovo qui doivent lui permettre d’imposer ses puces x86 dans les smartphones. Un marché crucial qui s’est pour l’instant refusé au n° 1 mondial des microprocesseurs.

Intel a beau être le géant incontesté des microprocesseurs dans le monde, il est encore un nain sur le juteux marché des smartphones. Celui-ci est en effet dominé par des fabricants comme Samsung, Qualcomm ou Texas Instrument qui fabriquent des puces conçues sur l’architecture du britannique ARM. Ce n’est pourtant pas faute pour Intel d’avoir essayé de percer. Lors du Consumer Electronic Show de 2010, il avait ainsi annoncé un accord avec le sud coréen LG pour équiper un futur appareil. Mais ce dernier n’a jamais vu le jour. Les alliances passées à l’occasion du CES 2012 peuvent-elles changer la donne ?

Les partenariats annoncés mercredi par le patron d’Intel Paul Otellini comportent en tout cas des engagements de lancements précis dès cette année. Le premier à dégainer un smartphone utilisant la plateforme d’Intel Atom Z2460, jusque-là appelée Medfield, sera ainsi le groupe informatique chinois Lenovo. Ce nouveau venu dans les télécoms prévoit de commercialiser un téléphone baptisé K800 au cours du deuxième trimestre en Chine. C’est l’opérateur télécom Unicom qui devrait s’en charger. Le prix: autour de 600 à 700 dollars.

L’accord pluriannuel passé avec Motorola paraît toutefois encore plus prometteur. Car il s’agit cette fois d’un grand nom américain des téléphones portables. De plus, celui-ci s’est engagé à lancer plusieurs modèles à partir du deuxième semestre 2012. Le fait que Motorola soit en train de se faire acheter par Google constitue aussi un plus car il permet à Intel de se rapprocher du groupe à l’origine du système d’exploitation dominant dans les smartphones. Les futurs Motorola équipés d’une puce Atom fonctionneront d’ailleurs tous sous Android.

Reste à savoir si d’autres constructeurs accepteront de tenter l’aventure. Intel devra parvenir à les rassurer sur deux points. Le premier est la consommation d’énergie. L’architecture x86 du fondeur a effet été conçue historiquement pour des machines plus grosses comme des ordinateurs portables et des PC. Elle est réputée plus gourmande en énergie que l’architecture ARM conçue spécifiquement pour les appareils mobiles. C’est pourquoi Intel vante aujourd’hui les progrès effectués grâce à Atom.

“La longévité de la batterie de cette plateforme n’est pas la meilleure du marché mobile, reconnaît ainsi Mike Bell, le patron de la division Ultra Mobilité d’Intel, dans une interview à la BBC. Mais elle est très loin d’être la pire. Il est possible de bâtir un smartphone basé sur notre processeur avec une batterie du même type que celle que vous trouvez sur les appareils d’aujourd’hui et qui procurera une grande expérience utilisateur. Il n’y aura pas de problème de batterie sur notre plateforme”, martèle-t-il.

Intel a d’ailleurs développé un prototype de smartphone Atom avec des spécifications de référence censées réduire le temps de développement d’appareils par des assembleurs ou des opérateurs qui voudraient utiliser sa plateforme. Il affirme que ce prototype doté d’une puce mono-coeur de 1,6 GHz est capable d’offrir 8 heures d’appels téléphoniques, 6 heures de lecture vidéo sur un écran de 4,03 pouces à 1080p et 5 heures de navigation internet 3G. Last but not least, sa longévité en veille entre deux charges serait de 14 jours.

Reste l’autre problème, tout aussi épineux: assurer aux utilisateurs qu’ils pourront bien faire fonctionner leurs chères applis avec une puce Intel. Car la compatibilité n’est pas acquise. Concernant les logiciels en Java, le géant américain a donc indiqué qu’il va mettre des experts à disposition des développeurs pour les aider à optimiser leur code. Quant aux applications spécialement conçues pour tourner sur des puces ARM (soit 25% du total), Intel affirme disposer d’une technologie capable de les réinterpréter.

Pas sûr toutefois qu’Intel puisse convaincre Nokia et son vieil allié Microsoft de travailler avec lui dans le domaine des smartphones. L’axe qu’il semble avoir constitué avec Google risque en effet de ne pas leur faire plaisir. Il faut dire que Microsoft, également en retard en matière d’ultra-mobilité, a été le premier à lui faire une infidélité. Le n°1 des logiciels a en effet annoncé il y a tout juste un an que les évolutions de son système d’exploitation Windows seraient désormais compatibles avec l’architecture ARM. L’ère de l’après-PC semble décidément bien partie pour rebattre toutes les cartes du marché…

Yves Adaken, L’Expansion.com

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content