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Gare à l’effet papillon…

Le Belge passe généralement un été tranquille. D’accord, le plat pays manque d’eaux turquoises et de cocotiers bercés par le vent. Mais au moins, de Blankenberge à Libramont, on ne craint pas les ouragans ni les tremblements de terre. On ne craint pas les tirs de rocket ni l’invasion par les forces armées voisines. Sauf que cette fois-ci, des événements qui se déroulent à mille lieux d’ici ont quelque peu perturbé notre habituelle quiétude. Petit retour en arrière sur cet été 2014 pour le moins mouvementé.

1er juillet. La banque française BNP Paribas est condamnée par la justice américaine à payer une amende de 8,9 milliards de dollars pour avoir violé les embargos américains sur Cuba, l’Iran et le Soudan. Le Soudan en particulier pose question : le régime est poursuivi par la Cour pénale internationale pour crime contre l’humanité suite aux massacres perpétrés dans la région du Darfour depuis 2003. Résultat, le cours de l’action BNPP est passé de 60,85 euros (février 2013) à 47,72 euros la semaine dernière. Une tuile pour l’Etat belge qui verra ses dividendes rabotés en 2015 et qui plombe quelque peu l’idée de revendre la participation de 10 % qu’elle détient dans le capital de la banque française.

17 juillet. Le vol MH17 de la Malaysian Airlines, reliant Amsterdam à Kuala Lumpur, est abattu par un missile en plein survol de l’Ukraine. La bavure est imputée par les Etats-Unis à la Russie, ou en tout cas aux séparatistes pro-Russes à l’oeuvre dans la région depuis le début de l’année. Six victimes belges sont à déplorer et près de 200 chez nos voisins néerlandais, fortement éprouvés par ce drame.

29 juillet. Mehdi Nemmouche, suspecté d’avoir commis un quadruple attentat au Musée Juif de Bruxelles fin mai dernier, est rapatrié vers la Belgique après avoir été arrêté en France. Son geste d’une brutalité sans nom reflète l’antisémitisme ambiant en Europe, sur fond d’une recrudescence du conflit israélo-palestinien dans la bande de Gaza depuis le début de l’été.

6 août. Suite aux sanctions économiques et diplomatiques infligées par Barack Obama et l’Union européenne à la Russie dans le cadre du conflit ukrainien, Moscou riposte et annonce un embargo sur une série de produits agroalimentaires en provenance des Etats-Unis et de l’Union européenne. Pour la Belgique, la perte pourrait atteindre 100 millions d’euros. Certains secteurs, comme celui de la viande, vont indéniablement licencier.

Hasard du calendrier, nous commémorions en grande pompe le 5 août dernier les 100 ans de la guerre 14-18. Cette guerre dont l’Europe fut le sordide théâtre – qualifiée de “mondiale” par l’implication de forces armées de tous continents – semble déjà loin derrière nous. Aujourd’hui pourtant, les conflits ne sont pas moins mondiaux qu’ils ne l’étaient à l’époque ; ils le sont juste différemment. Même si leurs origines profondes nous dépassent la plupart du temps, et même si ces conflits sont souvent très localisés, ils s’invitent dans nos vies quotidiennes parce que la soif de pouvoir et de vengeance n’a plus de limites et parce que la propagande, grâce aux technologies de l’information, n’a plus de limites. Les conséquences de cette globalisation des conflits sont plus ou moins violentes – certains auront perdu cet été un proche, d’autres un emploi, d’autres encore quelques milliers d’euros en Bourse.

Et tout à coup, au beau milieu de l’été 2014 c’est ça qui devient important. La voilà l’horreur, la vraie : celle qui nous fait oublier l’atrocité physique des guerres au profit de leurs dommages collatéraux.

CAMILLE VAN VYVE, Rédactrice en chef adjointe

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