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G20 : impasse diplomatique, autoroute économique

Tout est question de point de vue. Fort logiquement, la presse française n’aura retenu du G20 qui se tenait le week-end dernier à Saint-Pétersbourg que l’isolement de son président dans le cadre du dossier syrien. “Impasse diplomatique sur le dossier syrien”, titrait Le Monde. “Syrie : Obama et Hollande peinent à convaincre le G20”, martelait Les Echos. Alors que le député Bruno Le Maire parlait lui dans Le Figaro d’un “échec cinglant”…

Si les médias belges étaient supposés être moins sensibles à cette question, force est de constater qu’ils se sont engouffrés dans le G20 par la même porte, n’accordant qu’une importance très (trop ?) relative aux dossiers économiques pourtant fondamentaux pour l’Europe.

Serait-ce précisément cette indifférence médiatique (pas seulement belge…) qui aura permis aux décideurs réunis en Russie d’avancer de concert, et au pas de course ? Espérons que non. Toujours est-il que ces avancées méritent d’être soulignées. Car elles relèvent à notre sens de tout, sauf de l’échec. Le dossier de l’échange automatique d’informations d’abord. Dès vendredi, les membres du G20 annonçaient par voie de communiqué que l’échéance de 2015 était validée, et qu’ils soutenaient “pleinement la proposition de l’OCDE de mettre en place un modèle réellement international”. Une avancée relevée évidemment par les médias suisses, le pays étant directement concerné par la mesure… et n’y étant plus du tout opposé. C’est en tout cas ce qu’a fait comprendre Boris Collardi, patron de la banque privée suisse Julius Bär, dans une interview donnée au journal Le Temps : “L’échange automatique d’informations me fait penser au moment où le port de la ceinture de sécurité est devenu obligatoire pour le conducteur d’une voiture. Cela semblait tellement absurde et inconfortable. Pourtant on a très rapidement arrêté d’en parler et c’est devenu une évidence.”

Optimisation fiscale ensuite. Le dossier est épineux : les divergences en matière de fiscalité au sein de l’Europe donnent effectivement lieu à des montages permettant à certaines entreprises — multinationales en tête — d’éluder l’impôt. Mais évidemment, pas question pour les nations d’abandonner leur souveraineté en matière fiscale. Conclusion : “Dans un contexte de sévère consolidation budgétaire et de difficultés sociales, il est prioritaire pour nombre de pays de s’assurer que tous les contribuables payent leur dû de manière juste”, stipulait le communiqué en provenance de Saint-Pétersbourg. D’accord, les termes sont vagues. Mais la volonté commune de s’attaquer au problème est bien là.

Pays émergents enfin. A la différence des précédents sommets, comme l’a remarqué Barack Obama, ce n’est plus la zone euro qui concentre l’inquiétude des pays du G20. Ce sont les grands pays émergents, dont la croissance marque le pas et qui font face à une fuite massive de capitaux suite au resserrement de la politique monétaire de la Banque centrale américaine. Pas question évidemment de tirer à boulets rouges sur cette dernière. Mais répondant à une demande formelle des BRICS, les gouverneurs des banques centrales du G20 se sont engagés sur le fait que “les changements futurs de politiques monétaires continueront d’être calibrés avec précaution”. Pas ou plus de virage brutal donc. Le CV du successeur du président de la Banque centrale américaine Ben Bernanke devra faire montre d’au moins une compétence : la circonspection.

CAMILLE VAN VYVE – Rédactrice en chef adjointe

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