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Et si l’immigration était la solution ?

Drôle de titre alors que l’on vous vend en Une de cette semaine l’expatriation de nos valeureux cadres belges. Pas tellement, finalement. Car la circulation des talents est un enjeu majeur, tant pour les économies émergentes que pour les économies occidentales. “The world’s most valuable resource is talent”, écrivait The Economist dans sa dernière édition. Rien que ça.

Et visiblement, certains pays – pas forcément ceux auxquels on s’attend – profitent d’un formidable avantage du fait de parvenir à les importer chez eux. C’est le cas du Chili notamment, qui, grâce à son programme “Start-Up Chile”, attire moult entrepreneurs étrangers dans sa “Chilecon Valley”. Certains y aboutissent après avoir été refoulés par les Etats-Unis, dont la politique d’immigration est devenue de plus en plus stricte : 65.000 visas sont délivrés chaque année à des travailleurs étrangers qualifiés ; c’est 100.000 de moins qu’en 1999 ! Pourtant, 40 % des fondateurs des entreprises du Fortune 500 sont des immigrés ou issus de l’immigration. Alors qu’ils ne constituent que 23 % du peuple américain.

Moralité : pour doper son économie, mieux vaut ouvrir ses frontières que les fermer. Si les autres le font et pas vous, la fuite des talents sera inévitable. Et impossible à compenser. D’où la nécessité de mettre en place des politiques d’immigration qui tiennent compte du marché de l’emploi, des besoins en main d’oeuvre à combler et des secteurs à redynamiser.

Des idées qui ne sont pas vraiment à l’ordre du jour du parti grand vainqueur des élections communales – et dont les ambitions dépassent largement lesdites communes. “A cause d’une législation laxiste, l’obtention de la nationalité belge est devenue un jeu d’enfant. La régularisation intempestive d’étrangers en séjour illégal est catastrophique pour la communauté, essentiellement dans les grandes villes, et crée un effet d’aspiration”, peut-on lire sur le site Internet de la N-VA. L’impôt, les étrangers : deux vers dans le fruit de l’Etat belge, voués à pourrir le système et à nous appauvrir. En voilà une image et un message faciles à faire passer. Mais quelle myopie ! A force de se regarder le nombril, certains passent à côté d’exemples pourtant édifiants : outre le Chili, le Canada, l’Australie et Singapour sont autant d’économies ouvertes qui se font fort d’accueillir – avec des procédures aussi rapides et simples que possible – des cerveaux étrangers désireux de venir y étudier, travailler, monter des entreprises, créer de l’emploi et de la valeur ajoutée. Pour la prospérité de leurs gouvernement et concitoyens.

Plutôt que de tirer à boulets rouges sur des politiques de solidarité jugées excessives, ayons l’humilité et le bon sens d’en reconnaître les effets positifs et, surtout, mettons tout en oeuvre pour que ne subsistent que ceux-là. C’est ça, l’intelligence politique. Ou la politique tout court.


CAMILLE VAN VYVE, rédactrice en chef adjointe

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