Viande de cheval: “Findus a bien réagi, mais on attend une traçabilité complète”

© Reuters

La société Findus, à l’origine du scandale des lasagnes à base de cheval, porte plainte ce lundi contre X par sa filiale française. Comment Findus gère-t-elle la crise? L’avis d’Alain Pajot, dirigeant du cabinet crises-experts.

La fraude consistant à faire passer de la viande de cheval pour de la viande de boeuf dans des lasagnes surgelées de la marque Findus est devenue un scandale européen. Partie de Grande-Bretagne, elle s’est étendue à d’autres pays comme la France, la Suède, les Pays-Bas, à d’autres produits Findus, comme la moussaka ou le hachis Parmentier, et à d’autres marques…

Cette affaire révèle une faille dans la traçabilité des produits. Comigel, PME basée à Metz, a fabriqué des produits surgelés censés être au boeuf, mais contenant de la viande de cheval pour le compte de plusieurs enseignes, soit sous marque Findus, soit sous marque de distributeurs. Findus a d’abord accusé le fournisseur de la viande de ses lasagnes, la société française Spanghero, d’avoir livré de la viande de cheval roumaine portant la mention “boeuf” et l’estampille vétérinaire française. Puis elle a annoncé qu’elle allait porter plainte contre Comigel et ses fournisseurs pour fraude et non-respect des dispositions contractuelles. Enfin sa filiale française a effectivement porté plainte contre X ce lundi. Reste à savoir si cela suffira à éviter une réaction de rejet de la part consommateurs. L’avis d’Alain Pajot, dirigeant du cabinet crises-experts.

Comment Findus peut se remettre d’un tel scandale ?

Il faut réagir et vite. Prendre la parole est rassurant pour les consommateurs pour recréer de la confiance et de la sécurité plutôt que de faire une bataille de communiqués de presse. Et c’est ce que Findus a fait. Ils portent plainte aujourd’hui donc il y aura une réponse judiciaire qui déterminera si Findus était au courant ou non. Si Findus va jusqu’au bout, c’est qu’ils sont sûrs de leur bonne foi. C’est une bonne communication de crise, s’ils sont honnêtes. Mais si on découvre demain qu’ils étaient au courant, leur gestion de crise serait une catastrophe surtout dans le cas d’un mensonge en termes de sécurité alimentaire. S’ils ont menti, ça pourrait être très dur pour eux comme dans l’affaire Buffalo Grill. La perte de part de marché peut être importante. À ce jour, Findus a bien réagi au scandale, mais ce n’est pas parfait parce qu’on attend une traçabilité complète. Mais si la justice révèle qu’il y a bien eu fraude, il ne faudra pas seulement l’affirmer, mais aussi le démontrer. Cela passe par une plus grande transparence sur leurs circuits d’approvisionnement de manière concrète pour les médias et pour les associations de consommateurs. Aujourd’hui, on laisse des traces partout avec les mails, les bordereaux de commandes, les disques durs… donc ça ne sera pas compliqué.

Pensez-vous que les ventes de Findus vont être impactées?

Oui, très certainement. Il y a trois types de consommateurs. Le premier est très inquiet donc il va réagir de manière radicale et se détourner pendant une longue période des produits concernés. Le deuxième va stopper sa consommation de manière provisoire. Et le dernier, consommateur de lasagnes surgelées et attaché à la marque Findus, va continuer d’acheter ces produits, car à ce jour, même si le boeuf a été remplacé par du cheval, il n’y a pas de problème sanitaire. À cet égard, la gestion du risque faite par Findus et la grande distribution est positive. Ils ont retiré rapidement des rayons, de façon large, les produits alimentaires suspects. Ils n’ont pas seulement enlevé les lasagnes, mais aussi les cannellonis, les pâtes à la bolognaise et autres plats surgelés du même type. Cela permet d’éviter le feuilleton dramatique où lundi on apprend que ce sont les lasagnes qui sont suspectées, mardi que ce sont les cannellonis et ainsi de suite. Ça va leur coûter cher, très cher même, mais la réputation est essentielle. D’où l’intérêt d’être très réactif dès le début. Findus vit un moment difficile, mais s’ils continuent à bien gérer l’affaire, ils s’en sortiront. Le vrai enjeu dans l’affaire Findus est de savoir s’il y a eu tromperie ou non.

Finalement, peut-on vraiment savoir ce qu’il y a dans notre assiette ?

Non, on ne peut pas savoir à 100% ce qu’on mange. Dans le cas Findus, il s’agit de plats cuisinés surgelés, donc de recettes complexes. On ne sait pas tout, surtout avec la multitude d’intermédiaires en cause. La taille de l’étiquette sur la boîte de lasagnes prendrait trop de place! Je ne crois pas qu’un jour on puisse avoir une information complète à 100% sur les sources d’approvisionnement parce que la traçabilité fluctue et les recettes évoluent. Ne pas savoir complètement n’est pas grave si le consommateur est assuré que les contrôles qualité, sanitaire et de provenance ont été réalisés pour garantir la qualité des produits consommés.

Par Audrey Avesque

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content