Une loi sur le harcèlement moral plus dissuasive

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La ministre de l’Emploi, Monica De Coninck désire instaurer de nouvelles mesures contre le harcèlement au travail. Les personnes qui seront déclarées coupables de ce type de harcèlement se verront condamnées à payer 6 mois de salaire brut à leur victime.

La principale modification que Monica De Coninck désire instaurer à la législation actuelle sur le harcèlement moral devrait avoir un effet plus dissuasif. La ministre propose que la personne reconnue coupable de harcèlement moral y aille de sa poche en dédommageant sa victime de 6 mois de salaire brut alors que la loi actuelle laisse la décision au juge quant aux dédommagements des victimes, qui peut aller d’un euro symbolique à des montants élevés.

Autre changement majeur : à l’avenir, la victime ne devra pas prouver qu’elle a subi un dommage, mais simplement “démontrer les faits de harcèlement”. “Prouver un dommage est parfois difficile, car généralement, les personnes qui harcèlent un collaborateur le font sournoisement, sans laisser de traces, entre quatre murs et sans témoins“, explique Ivan Ficher, avocat spécialisé en droit du travail.

La ministre de l’Emploi entend aussi étendre le champ d’application de la loi actuelle, qui ne concernera plus seulement les faits de harcèlement moral, sexuel et de violence au travail, mais aussi l’ensemble des problèmes psychosociaux du monde du travail, comme le stress, les tensions relationnelles graves, les conflits personnels, la mauvaise ambiance au travail, le burn-out et même le suicide. “Cette mesure va rendre certains dossiers ardus, car il est très subjectif d’évaluer “une mauvaise ambiance” dans une entreprise ou un département donné”, commente Ivan Ficher.

La réforme a également comme objectif de préciser ce que l’on entend par “harcèlement au travail”, car si certaines situations ne peuvent pas être considérées comme telles, une série de petits évènements mis bout à bout peuvent bien l’être. Les entreprises, de leur côté, seront tenues de mettre en place une politique de prévention générale.

Une baisse des plaintes ne veut pas nécessairement dire une baisse du harcèlement

Dans ce contexte, la direction générale du bien-être au travail vient de publier des chiffres en baisse. En 2011, 590 plaintes pour faits de harcèlement ont été déposées contre 627 l’année précédente. 528 des 590 plaintes concernaient un harcèlement moral. Ces chiffres doivent quand même être relativisés, car en période de crise, certains employés sous pression n’osent parfois pas révéler leur mal-être de peur de se voir licencier. Au contraire, le mal-être au travail semble prendre de plus en plus de l’importance sans que des collaborateurs décident d’en parler à un médiateur interne ou à une personne de confiance externe, craignant d’ éventuelles représailles. D’autres plaintes, comme le révèle Le Soir peuvent aussi être traitées par les tribunaux et les services internes des entreprises et ne passent donc pas par le service de contrôle du bien-être.

“Le véritable défi est d’adapter les pratiques à la culture de l’entreprise”

La Fédération des entreprises de Belgique abonde, pour sa part, dans le sens de la ministre en misant avant tout sur la prévention. La FEB dit cependant ne pas comprendre comment cette dernière va atteindre son objectif avec cette proposition de loi qui accroît le nombre d’analyses et de procédures et rejette d’avance toute la responsabilité sur l’employeur.

“L’histoire nous enseigne que, dans le domaine du bien-être au travail, on n’enregistre aucun résultat en instaurant des lois et procédures sans cesse plus nombreuses. Le cadre légal et les procédures correspondantes existent. Le véritable défi est d’adapter les principes à la pratique des entreprises. Je constate malheureusement qu’un large fossé se creuse entre la politique menée et ce qui est souhaitable pour les travailleurs et les entreprises”, a déclaré Kris De Meester, premier conseiller au département social de la FEB, par voie de communiqué.

La ministre de l’Emploi Monica De Coninck déposera les projets sur la table du conseil des ministres ce vendredi. Après discussions avec les partenaires sociaux, “la législation entrera en vigueur dans les semaines qui suivent”, précise-t-on à son cabinet.

Ca.L

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