Trio de luxe à Elounda

En un quart de siècle, la famille Kokotos a bâti un complexe mariant calme et bonne chère, avec vue imprenable sur la baie de Mirabello.

Véritable usine à touristes sur sa côte nord, entre Héraklion et le golfe de Melia en particulier, la Crète est restée assez sauvage sur sa côte sud. Entre les deux : la baie de Mirabello, touristique mais aérée. C’est sur cette région que l’hôtellerie haut de gamme a jeté son dévolu, autour de la petite ville d’Elounda. La famille Kokotos y a donné le ton dès 1981, en bâtissant l’Elounda Mare, intégré sept ans plus tard à la chaîne Relais & Châteaux. Architecte, Spyros Kokotos travaillait cette fois pour lui-même, après avoir signé plusieurs autres hôtels dans la région. Son épouse Eliana, dont la maîtrise du français force l’admiration, dirige aujourd’hui le complexe.

Au bâtiment assez classique du départ, joliment décoré et flanqué d’une charmante piscine, se sont joint une quarantaine de bungalows mitoyens et villas comportant plusieurs suites. Leur diversité architecturale forme un village des plus charmants, abondamment arboré et fleuri, qui s’étire près de la mer. Tant en laissant le bord de l’eau libre à la promenade ou au farniente. Ou encore à la baignade, sur une petite plage de sable. L’équipement des bungalows est irrégulier, mais tous offrent une piscine privée (d’eau de mer) sur la terrasse. Du haut de gamme, le complexe hôtelier est passé au luxe. Ces maisonnettes se louent, en juillet, de 800 euros par jour pour 2 personnes à 1.950 euros pour 6 personnes.

Péninsule privilégiée

Pour la famille Kokotos, ce n’était là qu’un début. Quand, 10 ans plus tard, un terrain de sept hectares est à vendre un peu plus loin, elle saute sur l’occasion. Ainsi apparaît l’hôtel Porto Elounda, inutilement flanqué du qualificatif de luxe resort, un grand bâtiment aux étages décalés, dont les chambres du rez se partagent une piscine par groupes de 5 ou 6 unités. On y admire le surprenant plafond de la réception, composé d’une multitude de… moules à pain en bois. La collection de tissus anciens, qui décorait déjà les couloirs du Mare, se prolonge ici.

Le troisième élément du complexe se situe plus bas, en bordure de mer. Ouvert en 2001, l’Elounda Peninsula décline le luxe en plusieurs formules. Au pied de l’hôtel, qui propose exclusivement des suites, les villas pieds dans l’eau sont dotées d’une piscine chauffée, intérieure ou extérieure, ou encore les deux. Espaces largement comptés, salles de bain multiples, chambre pour la nounou… Cet ensemble, parmi les plus luxueux de la Méditerranée, vise une clientèle aussi internationale qu’exigeante, prête à débourser jusqu’à 3.300 euros par jour pour loger quatre personnes en juillet. Et 5.000 euros en août… Ou encore de 1 à 4 millions d’euros pour les grandes villas proposées à la vente de l’autre côté de la plage du Peninsula.

L’importance du site permet une intéressante gamme de services allant de plusieurs boutiques à la location d’un yacht (et même deux !), en passant par les courts de tennis et le golf 9 trous. Sans oublier le grandiose spa Six Senses accolé à l’hôtel Porto. Saunas et hammams n’y sont pas tous accessibles en direct mais, outre la diversité des soins proposés, on y est séduit par la piscine en plein air chauffée, avec vue plongeante sur la baie. Les restaurants méritent une mention spéciale. Car si le Deck ou encore le Yacht Club sortent plus qu’honorablement leur épingle du jeu, les Old Mill et Calypso valent carrément le voyage. Le premier, ouvert sur le jardin du Mare, propose une cuisine méditerranéenne raffinée, qui surprend par son inventivité. On y apprécie aussi l’animation musicale assurée par un pianiste au talent confirmé. Le second, logé dans le Peninsula, séduit d’emblée par son cadre et sa décoration raffinée. Superbes plancher et plafond ! L’assiette n’est pas en reste, le chef mettant volontiers en valeur les produits de base avec des touches de sophistication. Ou comment un aimable poisson grillé sort de l’ordinaire avec sa garniture couronnée d’un sorbet d’oursins.

Il y a 25 siècles…

Le calme et l’espace offerts par le complexe ne sauraient réfréner les envies de découvrir la région. En piquant une tête au village voisin d’Elounda, d’où l’on peut accéder à la presqu’île de Kolokitha par un isthme étrange qui longe des marais salants (abandonnés en 1972) avant de déboucher sur un pont au-delà duquel on découvre d’anciens moulins et une petite chapelle. De l’autre côté de la lagune se trouve l’île de Spinalonga, un site fréquemment desservi par bateau. Vénitienne, puis musulmane, la forteresse qui l’occupe presque toute entière est devenue léproserie au début du 20e siècle et ne quitta ce statut qu’en 1957.

Les amateurs de nature se baladeront dans la campagne voisine du Lassithi. Réellement préservée dans sa partie Nord, car située à l’écart des grands axes, cette région assez sauvage recèle une flore et une faune nettement plus riches que la moyenne crétoise, avec la rare fauvette mélanocéphale, ou encore la sauge Phlomis lanata, présentée comme endémique. Le promeneur attentif remarquera également que le dictame, plante cousine de l’origan, se plaît sur ces terrains secs. On le consomme ici abondamment en infusion, au point que l’on trouve des sachets prêts à l’emploi dans le commerce, sous le nom diktam.

Ces campagnes recèlent de nombreux trésors historiques, tels que chapelles et ruines antiques. Un site d’exception s’impose dans le sud du Lassithi : Lato, une ville dorique perchée sur un petit amphithéâtre naturel offrant une vue lointaine sur la mer. Elle fut fondée au 8e siècle avant notre ère et connut son heure de gloire entre les 4e et 2e siècles. Il en subsiste de nombreux vestiges, dont un puits, ainsi que les soubassements d’un petit temple. Un endroit perdu dans la montagne, que ses habitants finirent par abandonner pour descendre sur la côte.

A quoi ressemble un village crétois ? Pour le savoir, cap sur Kritsa, à 4 km seulement de Lato. Calme le soir, le bourg est, durant la journée, pris d’assaut par ces touristes à l’attention desquels ont fleuri d’innombrables boutiques vendant artisanat et huile d’olive. Les maisons anciennes disparaissent sous un amoncellement de nappes, draps et autres linges brodés. Kritsa est surtout une alternative shopping à la ville voisine d’Agios Nikolaos, la plus importante de la région, où des navires de croisière font régulièrement escale. A défaut de s’y éterniser, on y fait un crochet par le lac Voulismeni, relié à la mer. Site surprenant en plein centre-ville, où une haute colline arborée fait face au quai regroupant cafés et restaurants. Le plus étonnant est invisible : ce modeste plan d’eau plonge à plus de 60 mètres de profondeur ! Retour à l’Elounda Mare en soirée, pour un dîner qu’on s’en voudrait de rater, mais aussi pour le soleil couchant qui teinte progressivement les montagnes occupant l’autre côté de la baie. Car tous les bungalows, chambres et villas ont vue sur mer…

Guy Legrand

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