Tesla: euphorie boursière, offensive syndicale et pertes en hausse

Elon Musk © Reuters

Tesla a doublé son chiffre d’affaires au 2e trimestre, mais continue d’enregistrer de grosses pertes. Et alors qu’il lance sur le marché sa nouvelle voiture, la ‘Model 3’, le constructeur automobile doit faire face à une offensive syndicale à cause des cadences de travail qui s’annoncent infernales.

Tesla a en effet annoncé mercredi une perte de 336,4 millions de dollars, soit 43 millions de plus qu’un an auparavant et 6 millions de plus qu’au 1er trimestre, rapporte l’agence de presse ATS. Le chiffre d’affaires a toutefois plus que doublé sur un an à 2,789 milliards de dollars.

La perte plus importante qu’attendue par les analystes financiers n’empêchait pas le titre de bondir à Wall Street dans les échanges d’après-clôture, gagnant 6,08% à 345,70 dollars vers 23h15 (HB). Depuis le début de l’année, l’action Tesla a gagné plus de 50%, ce qui en a fait le premier constructeur automobile américain par capitalisation boursière.

Tesla a indiqué avoir produit 47.077 voitures sur les six premiers mois de l’année, dans la fourchette basse de ce qu’il prévoyait à la fin du 1er trimestre (de 47.000 à 50.000 voitures).

Offensive syndicale

Face à l’accélération des cadences de travail pour produire le nouveau “Model 3”, Tesla est désormais la cible d’une offensive du syndicat du secteur UAW, qui veut ouvrir une section dans son usine de Fremont (Californie).

Tesla a présenté la semaine dernière ce dernier modèle de voiture de milieu de gamme qui doit lui permettre de décupler sa production dans les prochaines années et de devenir un “grand” constructeur. Fabriqué à Fremont, le Model 3 s’ajoute aux deux autres modèles déjà produits par Tesla, le “S” et le “X”.

“Bienvenue dans l’enfer de la production car c’est là où nous serons dans les six prochains mois”, a ironisé le patron de Tesla, le charismatique Elon Musk, en présentant le Model 3 dont Tesla veut produire 10.000 exemplaires par semaine dès l’an prochain.

Mais Tesla veut aussi calmer les craintes de certains des quelque 6.000 employés de l’usine, exposées dans une lettre envoyée au Conseil d’administration de l’entreprise. Ils y demandent notamment plus de clarté sur leur paie et les promotions ainsi que la promesse qu’ils ne feront pas l’objet de mesures de représailles s’ils tentent de former une section syndicale.

“Nous en avons assez de souffrir de blessures après blessures alors qu’elles pourraient être évitées”, affirme Michael Catura, un ouvrier de Tesla signataire de la lettre. “Cela nuit au moral, ralentit la production; c’est aussi traumatisant et place la victime dans une situation financière difficile. Nous voulons savoir ce que l’entreprise prévoit pour répondre au problème et s’il y a des progrès”, ajoute-t-il.

Le salaire d’embauche à Fremont est de 18 dollars (15 euros) de l’heure, bien inférieur à la moyenne des autres ouvriers du secteur (25,58 dollars) et au salaire moyen dans le Comté d’Alameda où se trouve l’usine (28,10 dollars). Du coup, louer un appartement peut nécessiter jusqu’à 70% de la paie d’un ouvrier de l’usine.

“Nombre d’entre nous ont travaillé pendant des années avec la vague promesse d’une augmentation mais il n’y en a jamais eu”, affirme Richard Ortiz, qui travaille à l’atelier de peinture. “Nous avons soulevé cette question plusieurs fois et jamais obtenu de réponse”, ajoute-t-il.

Musk au créneau

Plusieurs ouvriers essaient en conséquence de créer une section syndicale au sein de l’usine et le président du syndicat UAW (United Auto Workers), Dennis Williams, a déclaré le mois dernier que l’organisation était prête à organiser un vote chez Tesla pour y parvenir. En attendant, elle a ouvert un bureau près de l’usine et engagé deux personnes pour recruter des adhérents.

Elon Musk a répondu à cette offensive syndicale par compte twitter interposé et par courriels aux employés, accusant les tentatives de l’UAW de recruter à Fremont d’être fallacieuses. Il a aussi rejeté les accusations selon lesquelles les conditions de travail seraient dangereuses.

Interrogé par l’AFP, Tesla a renvoyé vers un blog précédemment publié affirmant que les conditions de travail s’améliorent dans l’usine de Fremont, sans faire d’autres commentaires.

L’usine de Fremont, qui était co-exploitée avant son rachat par Tesla par les géants de l’automobile General Motors et Toyota, a pour objectif de produire 100.000 voitures dès la fin de cette année puis 500.000 en 2018 et un million en 2020. Elle a produit quelque 84.000 véhicules en 2016.

Tesla n’est pas le seul constructeur qui se retrouve être la cible de l’UAW. Le syndicat veut aussi s’ouvrir les portes de l’usine du japonais Nissan à Canton dans le Mississippi (sud). Un vote doit s’y tenir jeudi et vendredi pour savoir si l’UAW aura assez de soutien pour y ouvrir une section, une possibilité à laquelle la direction de l’usine a tout fait pour s’opposer.

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