Take Eat Easy à nouveau attaqué en France par d’ex-coursiers

© François Corbiau

Les Prud’hommes de Paris ont débattu mercredi de la réalité du statut d’indépendant de quatre livreurs à vélo de l’ancienne enseigne belge de livraison de repas Take Eat Easy (TEE), liquidée en août 2016.

L’audience de deux heures s’est attardée sur l’existence ou non d’un contrat de prestation de service liant les deux parties et sur un éventuel lien de subordination.

Les ex-coursiers ont accepté en ligne les conditions générales imposées par Take Eat Easy, un “consentement” qui vaut contrat de prestation, a plaidé l’avocat du mandataire judiciaire.

Ils n’ont selon lui aucune raison de réclamer a posteriori un contrat de travail car ils bénéficiaient d’une “liberté totale de travailler ou non” pour la plateforme et étaient libres de déterminer leur “emploi du temps”.

“J’ai l’impression que c’est le monde des Bisounours que vous avez décrit”, a ironisé Me Kévin Mention, avocat des ex-livreurs, qui a rebondi sur le lapsus de la greffière ayant évoqué l’entreprise “Take Eat Ecstasy”. “Il n’y a pas de contrat signé” sur papier et seulement “un seul” des quatre livreurs avait le statut d’autoentrepreneur, pourtant obligatoire pour travailler avec TEE, a-t-il rappelé.

A Rennes, TEE a ainsi “continué à faire travailler en toute connaissance de cause” deux soeurs Colombiennes, privées de ce statut, faute de permis de travail, en payant leur salaire à un coursier qui ensuite “leur reversait l’argent”, a-t-il assuré.

A un troisième, coursier à Paris pendant neuf mois, il n’a pas versé un seul centime, ce dernier ayant refusé de s’inscrire comme autoentrepreneur. C’était à lui “de fournir son numéro de Siret” et comme il ne l’a jamais fait, “il n’y a pas eu de prestation réglée”, a assumé l’avocat du mandataire judiciaire.

Le quatrième dossier concerne un livreur de Nice, chargé par TEE de diverses tâches allant du management d’équipe à la formation, en passant par le marketing, a résumé son défenseur, sans être contredit.

En tant que “manageur”, il “travaillait plus de 80 heures par semaine”, avait “une carte de visite au nom de Take Eat Easy” et recevait du courrier en tant que représentant de l’entreprise à Nice, a dit Me Mention. “Pour un indépendant, on va loin”, a-t-il ironisé, réclamant le paiement d’indemnités de licenciement et de congés dûs à un salarié, titulaire d’un contrat de travail.

Le conseil de prud’hommes de Paris, qui a déjà examiné début mai les recours de neuf anciens livreurs de TEE, fera connaître sa décision le 27 octobre.

Fondée à Bruxelles en septembre 2013 après être passée par l’incubateur Nest’Up, Take Eat Easy, la start-up spécialisée dans la livraison de repas à domicile à vélo, faisait office de pépite dans le genre. En 2015, elle a réussi à lever 16 millions d’euros en deux opérations, auprès de l’incubateur allemand Rocket Internet, mais aussi des fonds d’investissement britanniques DN Capital et Piton Capital, ainsi que du fonds Eight Roads Ventures (filiale européenne du géant Fidelity). De quoi financer son expansion notamment dans d’autres villes belges que la capitale.

Elle s’est en effet d’abord attaquée au marché international, avec la France, le Royaume-Uni et l’Espagne, avant de se lancer à Anvers, Liège et Gand en 2016. Elle couvrait 20 villes, au total. Take Eat Easy a grandi de 10 à 160 personnes.

En mai 2016, Take Eat Easy se vantait de compter plus de 250 restaurants partenaires dans la capitale belge et de livrer entre 500 et 1.000 commandes par jour en fonction des saisons.

Take Eat Easy fait cependant face à une concurrence sérieuse, principalement de Deliveroo, une start-up britannique débarquée il y a un peu moins d’un an en Belgique.

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