Qui est Mary Barra, patronne de General Motors et farouche adversaire de Trump ?

Mary Barra © REUTERS

Jusqu’en 2007, General Motors était le plus grand constructeur automobile du monde, opérant dans plus de 200 pays. La crise financière aux États-Unis a toutefois entraîné une implosion des ventes de voitures, avec des conséquences dramatiques pour les Big Three américains (Chrysler, Ford et GM).

Dix ans plus tard, GM redevient une entreprise financièrement saine, grâce à la politique vigoureuse de Mary Barra, la première femme à la tête d’une société automobile américaine. Et l’une des plus grands adversaires du président Donald Trump.

Fondée par William Durant, General Motors Company, fêtera ses 110 ans le 16 septembre prochain. Dès le premier jour, Durant n’a qu’un objectif en tête: devenir le plus grand producteur automobile du monde. Grâce au soutien bienveillant du monde bancaire américain, il accumule les rachats.

Ses successeurs poursuivent sa politique d’expansion souvent audacieuse et traversent l’Atlantique. En 1923, GM construit une première usine à Copenhague, ouvre une succursale à Anvers en 1925 et, en 1929, acquiert 80% des parts d’Opel. Il achète les 20% restants en 1931. En peu de temps, General Motors Company devient le plus grand constructeur automobile du monde.

Made in USA se vend comme des petits pains

La Seconde Guerre mondiale a encore renforcé la position des marques automobiles américaines. Pendant les années de guerre, le groupe fournit du matériel roulant aux troupes alliées sur les champs de bataille européens. À la fin de la guerre, l’US Air Force rase les usines automobiles allemandes. Les libérateurs américains sont accueillis comme des héros, le plan Marshall permet une reprise du commerce et le Made in the USA se vend comme des petits pains en Europe.

Detroit devient la capitale du monde automobile international. Buick, Cadillac, Chevrolet, Ford, Oldsmobile, Pontiac & Co n’arrivent pas suivre la demande de l’Europe et à partir des années 50, les voitures de luxe américaines colorent les rues des métropoles européennes.

Dans les années qui suivent, une bataille héroïque entre GM, Ford et Chrysler se développe aux États-Unis pour le leadership dans le monde automobile international, une bataille caractérisée par une nouvelle vague d’alliances et d’acquisitions en dehors des États-Unis. En fin de compte, GM remporte la bataille de prestige.

Alors que les marques automobiles américaines se focalisent principalement sur les ventes en volume, leurs concurrents européens se concentrent de plus en plus sur la qualité et la mise en oeuvre de technologies innovantes. Les marques japonaises ont choisi une troisième voie et ont mis l’accent sur des processus de production efficaces, qui se sont traduits par des produits standardisés et peu coûteux qui ont perturbé les relations de pouvoir traditionnelles tant en Europe qu’aux États-Unis.

Depuis les années 1980, les ventes de voitures américaines en Europe ont rapidement baissé, ce qui a incité les patrons satisfaits de Detroit à acheter encore plus de marques européennes – pensons à Saab par GM ou Land Rover et à Jaguar et Volvo par Ford. À la fin des années 1990, GM conclut une alliance avec la SAIC chinoise.

Le revirement espéré ne se produit pas : les patrons de Detroit n’ont pas mesuré leurs gains à leur juste valeur et ont mis le management aux mains de personnages de seconde zone dont les sièges principaux préféraient se débarrasser.

La crise financière de 2007 provoque une implosion de la vente de voitures

Lorsque la crise financière frappe les États-Unis en 2007 et que The Big Three fait faillite, les acquisitions européennes sont vendues à la hâte et pour une bouchée de pain. C’est également le sort qui semblait destiné à Opel, mais au tout dernier moment, GM souffle la vente de sa filiale allemande au fabricant de pièces canadien-autrichien Magna, et cela malgré un endettement qui avait atteint 300 milliards de dollars.

Pour le gouvernement américain, cette énorme dette a été le signal de laisser mourir GM d’une mort douce et afin de redémarrer le groupe. Le président américain Barack Obama donne carte blanche à Dan Akerson pour revitaliser GM. Après seulement quatre années de succès, il estime que le temps est venu de passer le flambeau à Mary Barra (1961).

Cette fille d’immigrants finlandais a passé toute sa carrière chez GM et y a franchi toutes les étapes. Elle a décroché son diplôme d’ingénieur en électricité au collège technique du constructeur automobile.

Sa nomination fait l’effet d’une bombe, mais entre-temps la femme énergique et flegmatique a convaincu tout le monde de ses qualités de leadership et de son ingéniosité stratégique. Depuis sa nomination, les bénéfices de l’entreprise ont grimpé trimestre après trimestre et même de 44% au dernier trimestre.

Malgré tout, les investisseurs restent prudents et le cours de l’action connaît de nombreux hauts et bas. En cause, le cap en dents de scie du président américain Trump. Les droits d’importation sur l’aluminium et l’acier rendent les voitures américaines plus chères, de même que les voitures que GM fabrique au Mexique et au Canada pour le marché américain. Au total, il s’agit d’un million de voitures par an.

Aussi Mary Barra est-elle l’une des plus grandes adversaires du président américain. Ce dernier l’accuse un manque total de compétence, de vision et de leadership alors que ce sont là les qualités qui ont fait d’elle l’une des meilleures gérantes de l’histoire de GM.

Lorsqu’elle a pris ses fonctions en 2014, elle a annoncé qu’elle voulait faire évoluer GM de constructeur automobile à fournisseur de solutions de mobilité. Cette idée a d’abord suscité le mécontentement de la part syndicats, mais en entre-temps, les esprits se sont apaisés.

Selon Mary Barra, GM doit devenir le leader de l’électromobilité et de la conduite autonome. Les marques Pontiac et Saturne ne correspondaient pas à cette image et ont été retirées. La filiale allemande Opel a été vendue au groupe français PSA pour la même raison au début de l’année dernière. Elle a investi le produit de la vente dans des startups prometteuses telles que l’application de taxi Lyft et le développeur de logiciels Cruise Automation.

D’après l’agence de recherche américaine Navigant, GM, avec Waymo (Google), est le plus avancé dans le développement de voitures autonomes à propulsion alternative. Au plus tard l’année prochaine GM commencera des projets pilotes dans une ou plusieurs villes – dans une zone définie. Une fois de plus, il s’avérera que Mary Barra est une femme de parole.

La semaine dernière elle a nommé Dhivya Suryadevara, 39 ans, d’origine indienne, au poste de CFO de GM, faisant d’elle le premier directeur financier féminin du groupe.

Le tweet attendu de Donald Trump sur ‘Les femmes au pouvoir’ n’a pas été publié. Le président a probablement d’autres chats à fouetter.

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