Pourquoi Twitter est encore loin de rivaliser avec Facebook

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Twitter, ou “TWTR” en dialecte boursier, a réussi une entrée fracassante au New York Stock Exchange. Si la firme a joué sur la prudence et la discrétion, elle devra faire face à un défi de taille: rentabiliser son réseau.

La cloche a sonné à Wall Street ! Twitter n’a pas failli pour ce qui représentait l’introduction boursière la plus attendue dans le monde de l’Internet depuis Facebook en mai 2012. Dès la mise en cotation au New York Stock Exchange, le titre a démarré à 46 dollars, soit une hausse de 76% par rapport au prix d’introduction. Le site de microbbloging a misé sur la plus grande prudence dans la préparation de l’opération. Il fallait en effet éviter à tout prix la dégringolade subie par Facebook deux jours après sa cotation au Nasdaq. À l’époque, le premier réseau social du monde avait payé la surévaluation du titre et les doutes persistants quant à sa capacité à monétiser son audience mobile. Les signaux sont au vert pour cette première journée de cotation, puisque les chaînes CNBC et Bloomberg annoncent une ouverture en forte hausse. Reste que les garanties apportées par Twitter pour l’avenir ne sont pas vraiment plus convaincantes, au contraire.

Twitter a joué la prudence…

Twitter aura attendu moins de deux mois après l’officialisation de son introduction, pour se lancer dans l’arène boursière. Bien loin de la surmédiatisation de “l’IPO” de Facebook, le site de microblogging a fait preuve de prudence, profitant du Job Acts, une procédure d’introduction facilitée pour les firmes réalisant un chiffre d’affaires annuel inférieur à un milliard de dollars. Concrètement, le dispositif permet de jouir de la plus grande confidentialité aussi longtemps que possible. De quoi se prémunir en principe contre la spéculation.

Barack Obama avait lancé cette procédure pour accélérer l’entrée en bourse de sociétés de taille moyenne, afin que celles-ci puissent accroître leur capital. Avec à la clé de nouvelles embauches potentielles. Au départ, Twitter avait opté pour une fourchette introductive relativement basse, avec un prix par action compris entre 17 et 20 dollars. La firme avait ainsi préféré éviter de refroidir les ardeurs des investisseurs, quitte à rogner quelque peu sur la levée de fonds.

… Avant de revoir ses prétentions à la hausse

Finalement, Twitter s’est autorisé une plus grande prise de risques. Car c’est finalement au prix d’introduction de 26 dollars que les 70 millions de titres seront vendus aux premiers investisseurs, pour une levée de 1,82 milliard de dollars. C’est bien moins que le cash obtenu par Facebook il y a un an et demi (17 milliards de dollars). Mais cette levée équivaut peu ou prou à celle réalisée par Google en 2004 au Nasdaq, de 1,9 milliard de dollars.
Twitter pourrait même faire mieux s’il décidait de débloquer l’option de surallocation de 10,5 millions de nouvelles actions en cas de très forte demande. Cette hausse du prix d’introduction devait valoriser Twitter à 14 milliards de dollars, soit 12,4 fois son chiffre d’affaires annuel anticipé par les analystes pour l’année 2014. Mais avec son lancement en fanfare, voilà que la firme se retrouve valorisée à près de 25 milliards de dollars. À titre de comparaison, la valorisation mirifique de Facebook, de 104 milliards de dollars, représentait 11,3 fois ses ventes annuelles, contre 12,4 fois pour Google.

Twitter doit prouver qu’il peut devenir rentable

Lors de son entrée en bourse, Facebook devait faire face à un défi de taille : rentabiliser une audience mobile grandissante dont il ne tirait pas le moindre dollar. Le réseau social a mis un an pour atteindre son objectif, ce qui a permis à l’action de s’envoler et de dépasser enfin sa valeur d’introduction. Désormais, il tire la moitié de ses revenus du mobile, grâce aux formats publicitaires déployés sur le format. Twitter, de son côté, n’a pas ce problème.

Avant tout pensé pour l’usage mobile, le service en tire d’ores et déjà 65% de ses revenus. Mais elle doit faire face à une problématique bien plus délicate : atteindre la profitabilité. Jamais, en sept ans d’existence, Twitter n’a réussi à dégager de bénéfices.
Le trimestre dernier, la firme accusait encore une perte nette de 64,6 millions de dollars, pour un chiffre d’affaires de 168,6 millions de dollars. Le site de micro-blogging n’a d’ailleurs pas caché ses craintes à la SEC (Security of Exchange Commission), le gendarme de la bourse américaine. “Nous pourrions ne pas être capables de devenir ou de rester rentables”, affirmait ainsi la société dans son document introductif.

Des interrogations sur son audience

Twitter ne jouit pas d’une base d’utilisateurs aussi conséquente que celle de Facebook. Avec 237,2 millions d’utilisateurs actifs mensuels, la firme ne peut rivaliser avec le service de Mark Zuckerberg et ses 1,19 milliard d’inscrits. Lors de son introduction en bourse, il en comptait déjà plus de 845 millions. Une tendance qui rend d’autant plus délicate la monétisation du service. “Notre performance financière est et restera déterminée de manière importante par notre capacité à accroître le nombre d’utilisateurs et leur niveau d’engagement sur notre plateforme, de même que le nombre de publicités”, relève-t-il.

En d’autres termes, Twitter doit s’assurer que ses membres publient plus de contenus, de meilleure qualité, pour pouvoir convaincre les annonceurs d’investir sur le réseau. Sur ce point, LinkedIn pourrait servir d’exemple. Car s’il n’atteindra jamais la popularité d’un Facebook, le service peut compter sur la solidité de son modèle économique. Mais encore, son caractère professionnel lui confère un atout de taille pour attirer les annonceurs.

Twitter pourrait avoir ses chances, tant il est devenu une véritable plateforme marketing, permettant aux marques d’intéragir directement avec leurs clients. Un potentiel sur lequel il faudra à coup sûr s’appuyer pour espérer accroître la monétisation de son service. En amont de son arrivée au New York Stock Exchange, Twitter avait racheté en septembre MoPub, une société spécialiste des bannières publicitaires ciblées en temps réel. L’opération, estimée à 350 millions d’euros, doit lui permettre de mieux monétiser son service.

Par Ludwig Gallet

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