Pour en finir avec les déchets au bureau: 10 conseils

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Après la Flandre et Bruxelles, c’est au tour de la Wallonie d’imposer depuis septembre le tri des déchets au sein des entreprises situées sur son territoire. Pour Bea Johnson, le tri n’est cependant pas la solution ultime. Au “recycling”, elle préfère le “precycling”. Soit la pratique qui consiste à réduire les déchets en amont, afin d’éviter leur traitement en aval.

Se servir un café à la machine. Y ajouter un morceau de sucre. Boire le café. Jeter le gobelet à la poubelle. Ce geste anodin constitue une énorme perte de ressources, que ce soit sous la forme des matières premières ou de l’énergie nécessaire à la fabrication dudit gobelet.

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Prenons la Belgique et ses 4,5 millions de travailleurs. Admettons que chacun d’eux boit en moyenne deux cafés par jour. Et que l’énergie nécessaire à la fabrication d’un gobelet en plastique est de 0.0288 mégajoule. Les Belges jettent alors pour 259.200 mégajoules d’énergie à la poubelle par jour, soit l’équivalent de plus de huit années de chauffage produit par un radiateur de 1.000 watts. Sans parler de l’énergie nécessaire au transport, à la collecte et au traitement du plastique. Alors qu’un bon vieux mug aurait très bien pu faire l’affaire.

“Encore faut-il que la machine à café soit adaptée au mug en question et qu’un évier, même petit, soit mis à la disposition des employés pour ensuite rincer leur tasse”, précise Bea Johnson, la porte-parole franco-américaine du mouvement zéro déchet, selon lequel “le meilleur déchet est celui qui n’existe pas”. Et pour éradiquer la poubelle de son foyer et réduire ses déchets annuels à un petit litre par an, celle que le New York Times qualifie de waste-free priestess (ou prêtresse sans déchets) applique la recette miracle des cinq “R” : Refuser, Réduire, Réutiliser, Recycler et Composter (rot, en anglais). “Et seulement dans cet ordre-là”, précise-t-elle.

Un employé bruxellois produit en moyenne par an :

Plus de 165 kg de déchets de papier, dont près de 80 % sont collectés sélectivement. Il reste donc environ 25 kg de papier (hors emballages) dans les déchets tout venant. Plus de 80 % des feuilles A4 sont imprimées sur une seule face.

79 kg de déchets tout venant. Ces déchets sont essentiellement composés de déchets organiques et de papier carton. Ces deux fractions représentent chacune environ un tiers des déchets non triés.

8 à 10 kg de déchets PMC.

Soit plus de 252 kg au total par employé.

Source : Bruxelles environnement (données 2008)

La méthode a fait ses preuves : des géants comme Google et Adobe font désormais appel à elle pour sensibiliser leurs employés au “zéro déchet”. Réduire ses déchets en entreprise demande une réflexion globale. Côté patron, on peut décider notamment de passer à la signature de contrats électroniques plutôt que de s’entêter à opter pour une version papier, grâce à des applications telles que DocHub, CudaSign et Docusign. On peut aussi installer un compost au sein de l’entreprise ou encore décider de faire réparer le matériel électronique usagé plutôt que de le remplacer systématiquement sans autre forme de procès. Côté employés, Bea Johnson prône surtout la sensibilisation. “Il faut travailler en amont. Si les gens adoptent un mode de vie ‘zéro déchet’ à la maison, ils n’en apporteront pas au bureau. Le simple fait de leur montrer l’impact environnemental des bouteilles en plastique motive les gens à amener leurs propres contenants — tasses ou gourdes.” Et l’application de ce changement d’habitude éliminerait d’emblée 12 kg de déchets domestiques par an par personne. Soit 2,7 % des 439 kg de déchets produits par Belge sur une année. “Je leur explique aussi comment emballer leur déjeuner dans des essuies de cuisine plutôt que dans du papier aluminium par exemple”, ajoute BeaJohnson.

Cinq pour cent du CA

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Car la cantine aussi doit être repensée. “En moyenne, près de 300 g de déchets sont produits pour chaque repas servi dans les restaurants d’entreprise, affirme un rapport de Bruxelles Environnement qui précise que ces déchets sont composés essentiellement de gaspillages alimentaires.”

Et le document de préciser qu’un employé produit en moyenne 79 kg de déchets non recyclés par an, soit 27.138 tonnes à l’échelle de la région. “Environ 20 % des déchets à Bruxelles proviennent des bureaux”, précise le Guide du bureau écoresponsable développé par 21 Solutions, bureau de conseil en démarches environnementales pour les entreprises.

Et le problème n’est pas seulement d’ordre écologique. “Le coût total des déchets en entreprises représente 4 à 5 % du chiffre d’affaires des entreprises, précise Marcel Van Meesche, directeur de 21 Solutions. Leur bonne gestion représente donc une opportunité d’amélioration de l’efficacité de l’entreprise. Et si le papier représente la majorité des déchets de bureaux (voir le graphique “Composition des déchets dans les bureaux avec cantine”), chaque autre flux de déchets est une nouvelle possibilité d’amélioration. Le conseil de Marcel Van Meesche aux entreprises ? “Levez la tête de votre ordinateur et ouvrez vos poubelles.” En élaborant un état des lieux précis de vos déchets, vous pourrez analyser ce qui peut être réduit, réutilisé ou recyclé.Il sera ensuite plus facile de mettre en place des objectifs chiffrés et un plan d’action.

Engouement

“Peu d’entreprises connaissent le coût de leurs déchets”, rappelle Laurie Verheyen, conseillère Economie circulaire au Brussels Waste Network, l’organisme visant l’amélioration de la prévention et de la gestion des déchets dans les entreprises bruxelloises. “C’est en effet un calcul compliqué, qui dépasse le seul coût de la collecte”, ajoute- t-elle. Il comprend le coût de production, soit l’achat de la matière et sa transformation éventuelle ; le coût de gestion interne, soit la manutention et le stockage de ses déchets ; et enfin le coût de gestion externe, soit la collecte. Mais Laurie Verheyen remarque un réel engouement pour la problématique : “de contrainte, la législation relative aux déchets est devenue opportunité pour améliorer le business”.

Un engouement que reflète aussi le boom des entreprises labélisées Entreprises écodynamiques par Bruxelles Environnement, passées d’une vingtaine à près de 200 en 15 ans.

Pour Jacques De Messemacker, fondateur de JDM Services, actif dans la collecte et le recyclage de déchets industriels (à ne pas confondre avec les déchets ménagers) en Wallonie, le calcul entre destruction et recyclage est simple : “la destruction de déchets revient à environ 120 euros la tonne. Alors qu’en recyclant ces déchets, on arrive à un coût zéro”. Mais il faut évaluer cette décision au cas par cas. “Il faut tenir compte de la valeur des déchets, de la quantité transportée, de la distance entre l’entreprise et la décharge. Ce sera plus difficile pour une PME se débarrassant de 100 kg de carton d’arriver à un bilan positif que pour une grosse entreprise qui vend cinq tonnes de plastique recyclable.Et pourtant, à chaque fois qu’il est plus intéressant de recycler il faut le faire. Même à coût égal il faut le faire : car l’environnement nous concerne tous.”Et Jacques De Messemacker de rappeler la législation européenne en matière de traitement des déchets, connue sous le nom d’échelle de Lastink. Celle-ci préconise dans cet ordre précis la prévention, la réutilisation, le recyclage puis la valorisation en tant que combustible. Vient enfin en dernier recours la mise en décharge.

Les conseils de “Madame zéro déchet”

Bea Johnson a réussi le pari fou de réduire ses déchets ménagers à moins d’un litre par an. Elle livre ses astuces pour réduire vos déchets au bureau…

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1. Refusez les bics gratuits et autres cadeaux d’entreprise – ce qui aidera à endiguer ce phénomène insensé.

2. Utilisez des stylos rechargeables, des porte-mines, des ardoises et des tableaux blancs. Offrez votre ancien matériel de bureau (papier, crayons, etc.) à la section artistique de votre école de quartier.

3. Partez en guerre contre le courrier indésirable, abandonnez vos agenda et répertoire papier. Enregistrez-vous afin de recevoir vos factures et autres déclarations en version électronique.

4. Réutilisez les feuilles imprimées d’un seul côté pour imprimer des documents qui doivent impérativement l’être. Vous pouvez également les relier à l’aide d’un trombone pour en faire un carnet de notes. Réutilisez les enveloppes du courrier qui vous est envoyé et, si vous achetez du papier neuf, préférez celui fait à partir de matériaux recyclés et enveloppés dans du papier.

5. Débarrassez-vous de votre poubelle. Efforcez-vous d’utiliser un compost et les bacs à recyclage exclusivement.

6. Exigez un emballage à partir de papier recyclé lors de vos courses en ligne, ainsi que du ruban adhésif en papier. Imprimez le timbre et l’adresse directement sur l’enveloppe, à l’aide d’un tampon à cet effet.

7. Utilisez des trombones (disponibles à l’achat en vrac) plutôt que des agrafes. Il existe également des agrafeuses sans agrafes.

8. Allez à la bibliothèque pour vos magazines business et vos livres de documentation. Offrez vos propres livres à votre bibliothèque pour en faire profiter tout le monde.

9. Utilisez des clés USB ou des disques dur externes plutôt que des CD.

10. Enfin, vous pouvez équiper votre bureau de prises de type “smart strip”, recharger vos cartouches d’encre, apprendre à fabriquer du papier à partir de papier utilisé, apporter les emballages qu’on vous envoie à votre centre d’expédition pour qu’ils le réutilisent.

Bea Johnson donnera une conférence ce 30 novembre à 19h à Namur et ce 1er décembre à 20h à Bruxelles. Infos sur le site zerowastehome.com

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