Liege Airport : le miracle coûte-t-il trop cher ?

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Alors que la police judiciaire enquête sur des malversations financières, la success story de l’aéroport de Liège coûte-t-elle trop cher ?

Avril 2010. Les cotillons et les slides sont de sortie à l’aéroport de Liège. En présence du ministre André Antoine, les dirigeants affichent fièrement le bilan de 20 années d’exercice. Un an plus tard, c’est au tour de la police judiciaire de s’inviter à la fête. En cause : des soupçons de malversations et de manipulation de marchés publics sur le tarmac liégeois.

Alors que l’enquête judiciaire suit son cours, doit-on jeter l’aéroport avec l’eau des indélicats ? Si l’exercice 2010 de Liege Airport est en passe d’être clôturé, les premières données donnent le sourire aux gestionnaires : 639.434 tonnes de fret ont été transportées l’an dernier, soit une augmentation de 32,6 % par rapport à 2009.

En revanche, le nombre de passagers ne cesse de régresser, à raison de 50.000 passagers par an depuis 2008. L’an dernier, ce trafic s’est ainsi tassé sous la barre des 300.000 passagers. Un seuil critique qui ne permet pas d’amortir l’aérogare, ni de couvrir les frais de fonctionnement de ce bâtiment conçu pour… un million de voyageurs par an.

Sans subsides, point de dividendes

Si Liège est aujourd’hui le premier aéroport belge pour le transport de fret, le “miracle de Bierset” cache une lourde facture : près d’un milliard d’euros d’investissements. Presque un plan Marshall à lui tout seul. “Un montant qui se décline pour une bonne moitié dans le développement de l’infrastructure et, pour l’autre, dans un programme de rachat ou d’isolation acoustique des maisons des riverains”, précise Christian Delcourt, porte-parole de l’aéroport.

Cette injection massive de fonds wallons et européens a permis de créer 2.778 emplois directs, répartis dans 76 sociétés. La SA de l’aéroport compte 148,2 équivalents temps plein. Un nombre finalement peu élevé au regard d’une statistique souvent usitée dans le secteur qui veut que chaque “tranche” de 100.000 tonnes de marchandises génère 1.000 emplois. Bien sûr, l’activité générée sur le site induit des emplois indirects. Ceux-ci sont estimés à 6.667 personnes. Cependant, d’aucuns se demandent si ce ne sont pas là les emplois les plus coûteux de Wallonie…

Si l’investissement est élevé, la rentabilité, elle, l’est moins. D’autant qu’au regard des derniers chiffres publiés (exercice 2009), on note que l’aéroport est loin d’être autonome financièrement. Les subsides d’exploitation et montants compensatoires obtenus des pouvoirs publics se sont élevés à 26 millions d’euros alors que le chiffre d’affaires n’a généré que 18,2 millions d’euros !

Or, loin d’apprendre à vivre sans ces subsides régionaux, l’aéroport en reçoit davantage chaque année. Et pour cause : sans ces aides, point de dividendes possibles… Car, sur le résultat après impôts (395.224 euros) et à côté de la dotation obligatoire à la réserve légale (19.761 euros), tout le bénéfice après impôts file en effet vers les actionnaires (SLF Participations, Sowaer et les Aéroports de Paris).

Valéry Halloy

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