Les plans d’Ethias pour l’après-crise

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Le renflouement d’Ethias par les pouvoirs publics lui impose une cure d’amaigrissement, prescrite par la Commission européenne. L’assureur cherche à compenser ce recul en s’attaquant au marché des PME et en confortant sa position de numéro trois dans les produit “non vie”.

Par Robert van Apeldoorn en collaboration avec Canal Z

Le nouvel Ethias apparaît progressivement aux yeux de ses clients. L’assureur historique des fonctionnaires et des pouvoirs publics perd du poids à vue d’oeil, avant même d’avoir achevé l’exécution des mesures imposées par la Commission européenne, par l’arrêt des conditions généreuses pour le compte First.

Pour accepter le sauvetage du groupe par les pouvoirs publics, sous la forme d’une augmentation de capital de 1,5 milliard d’euros, partagées entre l’Etat fédéral, les Régions wallonne et flamande, Ethias est priée de se faire plus petite. “Nous devons réduire notre bilan de 35% d’ici la fin 2013” rappelle Bernard Thiry, directeur général depuis octobre 2008.

Le groupe a ainsi arrêté la vente de nouveaux contrats pour son compte First, un produit d’épargne sous la forme d’assurance vie, qui avait bénéficié d’un taux très favorable. “Nous avions distribué trop généreusement la rentabilité aux assurés” déplore Bernard Thiry, qui reconnaît avoir lui aussi profité du taux de 6,5%. Les titulaires du compte peuvent encore faire des versements, mais le taux garanti est de 2,5%. Il a aussi revendu sa nouvelle activité bancaire à Optima. “Tout a été négocié, il ne manque plus que l’accord de la CBFA. La décision pourrait intervenir avant la fin de l’année” continue le patron d’Ethias.

Garder 14% du marché dans le marché non vie Il reste encore à revendre l’activité d’assurance vie pour les particuliers, une société de réassurance basée au Luxembourg, et une filiale fournissant des assurances au monde du courtage indépendant, Nateus. A quoi s’ajoute aussi le sort de la participation détenue dans Dexia, qui pourrait générer de nouvelles pertes sous forme de moins-values.

Ce sont là les ultimes mesures pour liquider le passé. Le futur, lui, est sur la table du conseil d’administration, qui a examiné le 9 novembre dernier la stratégie au-delà du plan Horizon 2011, qui avait été lancé début 2009, pour redresser le groupe. Ce dernier prévoyait une révision de la gestion des risques, une inévitable baisse des frais généraux, notamment sous la forme de 130 départs en prépension. Maintenant Ethias songe à se relancer sur la base qui lui reste, les assurances non vie (auto, incendie,…). “Nous avons 14% du marché (13,3% selon Assuralia, ndlr). Notre objectif est de ne pas diminuer, et même de grimper par tous les moyens” annonce Bernard Thiry.

Ethias est le quatrième assureur du marché, et le troisième sur le seul marché de la non vie, derrière AG Insurance et Axa. Pour développer cette position, il a déjà pris des mesures pour augmenter ses affaires avec la clientèle historique des services publics, en créant une filiale Ethias Service. “Il nous permet de proposer la gestion de fonds de pension aux collectivités publiques” indique Bernard Thiry. Auparavant, Ethias était limitée dans la tâche, car elle ne pouvait remplir cette mission qu’à travers l’assurance.

L’assureur des fonctionnaires vise les PME Le dernier axe de développement discuté au conseil d’administration porte sur l’exploration de nouveaux marchés. “Nous avons décidé de nous développer vers les entreprises, en particulier les PME. Cela ne se fera pas du jour au lendemain, car il faut développer des produits adaptés, et aussi élargir la distribution par courtage, qui est le canal pour toucher ce marché, mais c’est notre objectif” dit Bernard Thiry. Ce sera ainsi la seconde vague d’extension pour Ethias. Le groupe qui touchait exclusivement les services et agents publics s’était étendu à l’ensemble des particuliers depuis les années 90′. Il mise maintenant sur les entreprises. “Pour les entreprises, en particulier les PME, notre part de marché se situe à 4%, contre 14% pour tout le marché non-vie. Il y a un écart que l’on peut voir comme un potentiel de croissance pour l’entreprise.”

Cette politique s’accompagne d’un peaufinage du réseau de vente directe, qui est la base du système de distribution d’Ethias. “Nous allons ouvrir de nouveaux bureaux, en relocaliser d’autres, revoir notre approche directe, par l’Internet et les centres d’appel, afin de favoriser le cross selling.”

Après 2013, les contraintes disparaissent Ensuite il faudra examiner l’évolution du groupe après 2013. Les restrictions imposées par la Commission européenne ne seront plus d’applications. Les compteurs seront remis à zéro. “Je n’aime pas trop cette expression, qui laisse entendre que nous n’aurions pas tiré les leçons du passé” continue Bernard Thiry. Mais, c’est vrai, le groupe pourrait refaire de l’assurance vie individuelle, par exemple. “Nous pourrions revenir dans ce marché, que nous n’allons du reste pas abandonner. Nous revendrons nos activités, comme nous devons le faire, mais continueront à vendre des produits à nos clients, en concluant des accords de distribution avec d’autres assureurs.” Quand au retour à la production maison, après 2013, “ce choix devra être fait par le conseil d’administration en 2012 ou 2013.”

Après 2013, la structure ne devrait pas subir de changement. Le groupe s’affirme pourtant d’esprit mutualiste, mais il ne l’est plus guère depuis l’arrivée des actionnaires publics à hauteur de 75% et trois actions. Il s’affirme “d’inspiration mutualiste”, un euphémisme pour évoquer la part minoritaire de l’actionnariat mutualiste, à travers Ethias Droit Commun, association d’assurances mutuelles, qui possède 25% (moins trois actions) d’Ethias s.a., la société issue de la restructuration lancée fin 2008 pour redresser le groupe.

Pas de retour vers une logique de mutuelle “Nous sommes une entreprise strictement privée, avec des actionnaires publics” précise Bernard Thiry. “Le message que je reçois de mes actionnaires est un message de stabilité. Aucun d’entre eux ne nous a demandé de préparer une sortie du capital.” Le retour à plus de mutualisme n’est donc pas à l’ordre du jour. “Enfin, c’est aux actionnaires de se positionner là-dessus.”

En attendant, Ethias est un véritable compte First des belles années pour les actionnaires publics (Etat fédéral, Région Wallonne, Région flamande), qui doivent recevoir un dividende garanti de 10% l’an, “vraisemblablement à partir de 2012/1013”, selon une formule cumulable. “Si on ne verse pas de dividende une année, il faut payer 20% l’année suivante, ou 30% la troisième année si on ne verse rien pendant deux ans.” C’est le prix à payer pour la renaissance d’Ethias. En compensation, l’actionnariat mutuel, lui, ne reçoit rien jusqu’en 2013. Le dividende garanti coûtera 150 millions d’euros par an. “Historiquement, l’entreprise a toujours réalisé ce type de résultat” assure Bernard Thiry. Elle est revenue aux bénéfices en 2009, avec 37 millions d’euros, et continue à progresser cette année, avec 40 millions d’euros pour le premier semestre.

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