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‘Les entreprises belges ratent le train de l’e-commerce’

Les entreprises belges n’exploitent pas encore suffisamment les possibilités qu’offre l’e-commerce, notamment dans le secteur B2B. L’évolution numérique a pourtant ouvert de nombreuses portes aux initiatives innovatrices. Hélas, les entreprises belges attendent encore trop souvent que le gouvernement élimine toutes les entraves.

Par Frederik Debrabander, Senior Manager chez Accenture, et Steve Muylle, Professeur Stratégie numérique à la Vlerick Business School

Certes, le gouvernement doit prendre certaines mesures, mais il est grand temps que les entreprises développent elles-mêmes de nouvelles opportunités si elles ne veulent pas rater le train de l’e-commerce.

Quelque 21,4 millions d’achats réalisés en ligne ; certes, les derniers chiffres de Becommerce mettent à nouveau en évidence l’engouement des Belges pour le shopping en ligne. Mais lorsque l’on s’intéresse à l’endroit où ceux-ci réalisent leurs achats, il s’agit trois fois sur quatre d’une entreprise étrangère : Bol.com, Coolblue, Amazon ou tout autre site étranger célèbre. Nous, les Belges, nous ne sommes pas très chauvins, mais plusieurs d’entre nous ne trouvent pas cela normal. Les camionnettes de livraison s’alignent, façon de parler, de l’autre côté de la frontière, prêtes à nous livrer les articles commandés. Et l’économie belge passe littéralement à côté des revenus générés par ces achats.

Ce sont surtout les entreprises B2B qui en Belgique ratent une belle opportunité. Nous osons sans problème commander nos livres ou appareils électroniques en ligne, mais lorsqu’il s’agit de se présenter chez un fournisseur en tant qu’entreprise, tout semble différent. Or, ce que les entreprises B2B oublient souvent, c’est qu’après leurs heures, leurs clients potentiels sont également de simples consommateurs. Leurs attentes en tant que telles ne diffèrent pas de leurs attentes lorsqu’ils placent une commande au nom de leur entreprise. Mais à ce niveau-là, la Belgique en est encore à ses balbutiements : les transactions B2B en Belgique s’effectuent encore trop souvent au moyen de bons de commande classiques.

Pourtant, la Belgique s’en sort plutôt bien en termes de connectivité, d’utilisation d’internet et d’intégration des technologies numériques. C’est ce qu’indique en tout cas l’indice officiel relatif à l’économie et à la société numériques, élaboré par la Commission européenne. Nous sommes donc clairement prêts pour l’e-commerce. Pourquoi est-ce que, dès lors, rien ne se passe ? Tout d’abord parce qu’au niveau légal, il y a encore du pain sur la planche, diront les chefs d’entreprise, dont notamment Fernand Huts, CEO de Katoen Natie qui plaide pour que les choses changent. Effectivement, il faut que le gouvernement facilite le travail logistique et supprime les entraves existantes, mais les entreprises doivent également prendre leurs responsabilités. Et pour l’instant, elles ne le font pas assez : chaque entreprise a un rôle à jouer dans la numérisation de sa petite activité au sein de la chaîne.

Si vous vous contentez de sauter dans le train, vous ne serez jamais qu’une petite pièce dans la grande machine à sous

Nombreux sont les chefs d’entreprise qui reviennent de la Silicon Valley en disant que ce voyage les a convaincus de la nécessité de l’e-commerce et de la numérisation pour éviter la faillite au cours des cinq prochaines années. Mais concrètement, quelle est étape suivante ? Souvent, c’est là que tout s’arrête. Il y a pourtant une étape facile à franchir tant que l’on respecte ces deux règles d’or : Penser gros, agir petit et se développer/arrêter rapidement. Commencer petit et vite arrêter si ça ne va pas. Et au contraire, vite se développer si ça fonctionne bien.

Comment procéder concrètement en tant qu’entreprise B2B ? En considérant l’e-commerce dans une perspective plus large qui ne se limite pas à la seule création d’une boutique en ligne. Il est possible par exemple d’utiliser les technologies numériques pour consulter les questions que posent les consommateurs aux clients. Prenons l’exemple des médias sociaux qui permettent tout simplement de suivre les attentes des clients. Il est également possible de les utiliser pour expliquer aux consommateurs ce que l’entreprise fournit à ses clients et quels produits consommateurs sont utilisés par ceux-ci. Solvay est un exemple en la matière, avec des sites destinés aux consommateurs, notamment pour présenter les microfibres qui permettent de réguler la température corporelle et qu’ils vendent aux fabricants de vêtements.

Les technologies numériques permettent aussi d’élaborer de nouvelles stratégies et d’offrir un service personnalisable. Les capteurs intelligents placés dans les distributeurs de café professionnels, par exemple, fournissent de précieuses informations pour lesquelles les gérants de cafés veulent bien payer ou peuvent être à l’origine d’une application qui permet aux consommateurs de commander leur café préféré. Les possibilités sont infinies, mais les entreprises doivent oser se lancer.

Est-ce typiquement belge d’attendre que les concurrents étrangers concrétisent leurs idées innovatrices ? En étant les premiers, ce sont eux qui auront la plus grande part du gâteau. Et si, en tant qu’entreprise belge, vous vous contentez de sauter dans le train, vous ne serez jamais qu’une petite pièce dans la grande machine à sous d’une grande entreprise étrangère prospère. Il est grand temps que les entreprises belges se réservent la part du lion dans leur secteur.

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