Les chocolats Marcolini à nouveau 100 % belges

Avec l’aide de trois hommes d’affaires belges, déjà actionnaires minoritaires de sa société, le chocolatier bruxellois reprend en main son destin. Ensemble, ils viennent de racheter la participation de Nestlé, entré dans le capital en 2007. Pourquoi maintenant ? Explications.

Pierre Marcolini démarre 2012 avec le sourire. Et pour cause : sa société, Les Chocolats de l’Iris, dont le nom deviendra prochainement Les Chocolats Marcolini, est à nouveau 100 % dans les mains d’actionnaires belges. Avec Olivier Coune (son actuel CEO), François Schwennicke (actionnaire de la maroquinerie Delvaux) et Laurent Levaux (CEO d’Aviapartner), le chocolatier bruxellois vient, en effet, de racheter la participation du groupe Nestlé. Le géant suisse de l’alimentation était entré dans le capital de la PME bruxelloise en 2007, à hauteur de 4,5 % avant de monter, voici un an, à 29 %.

Retour en arrière. En 2007, Pierre Marcolini est à la recherche de fonds pour pérenniser sa PME car ses actionnaires minoritaires – Jean-Marie Delwart, ex-Floridienne (23,5 %), Florinvest, une branche de Floridienne (3,4 %), et la Société Régionale d’Investissement de Bruxelles (près de 20 %) – sont sortis du capital de sa société, en empochant une belle plus-value. A la même époque, le groupe suisse cherche un chocolatier haut de gamme afin de développer une gamme de carrés premium pour sa marque de café de luxe Nespresso.

“Nestlé nous a proposé de nous donner les moyens dont nous avions besoins et, dès lors, de nous apporter une sérénité financière en échange de la création d’une gamme de chocolats Nespresso”, explique Pierre Marcolini. Ainsi naît la collaboration entre la multinationale helvète et le maître-chocolatier de la place du Sablon. Une collaboration qui a permis aux Chocolats Marcolini, en pertes depuis 2008, d’éviter le dépôt de bilan.

Un partenariat “donnant-donnant”

Au total, Nestlé a injecté une bonne dizaine de millions d’euros dans la société. “Nestlé nous a aidés à passer la crise de 2008, confirme Pierre Marcolini. La multinationale nous a apporté son expérience globale dans les domaines du marketing, des ventes et de la production, plus particulièrement en matière de qualité. Tout cela en respectant notre identité.”

Une identité grâce à laquelle Pierre Marcolini entend faire la différence en Belgique et surtout à l’international. “Je propose un chocolat artisanal issu de mon propre chocolat de couverture que je prépare à base de fèves de cacao, souligne-t-il. Nous ne sommes qu’une petite quinzaine de chocolatiers à opérer de la sorte en Europe. Tous les autres utilisent les barres de couverture de Barry Callebaut. Aujourd’hui le label Belgian chocolates ne suffit plus. Il faut jouer sur l’authenticité et le style.”

En revanche, ajoute-t-il, “quand nous nous avons commencé à nous développer à l’international, nous nous sommes rendus compte que disposer d’une marque 100 % belge constituait un plus.” Or, le lien actionnarial avec Nestlé, multinationale de biens de grande consommation, était de nature à semer la confusion. D’où la décision de Marcolini de reprendre le contrôle total de son “bébé” à présent que les chocolats Nespresso (sur lesquels sa signature n’apparaît pas pour éviter toute confusion d’image) sont lancés et rencontrent un grand succès. L’homme a donc en quelque sorte rempli sa part du contrat.

Olivier Coune, François Schwennicke et Laurent Levaux

Pour l’aider dans cette opération, Pierre Marcolini a pu compter sur trois de ses proches, les “trois mousquetaires” comme il a baptisés : Olivier Coune, le CEO depuis la fin 2009, François Schwennicke et Laurent Levaux. Les trois hommes étaient déjà actionnaires minoritaires de la société depuis une dizaine d’années. Voilà à présent qu’ils montent en puissance dans le capital. Avec Pierre Marcolini, ils sont désormais les quatre seuls actionnaires des Chocolats Marcolini. “Nous allons bientôt procéder à une augmentation de capital pour assurer le développement de la marque à l’international”, affirme son fondateur.

Si cette reprise en main 100 % belge peut se faire aujourd’hui, c’est aussi parce que la santé financière de l’entreprise s’est améliorée. Un redressement que l’on doit à Olivier Coune. Proche de Pierre Marcolini, ce dernier est un manager aguerri à la gestion de grandes entreprises mais aussi de PME (Garage Francorchamps, Atenor, Dynaco, etc.). “Grâce à Olivier, j’ai pu me concentrer sur ce que je sais le mieux faire : la création. Il a apporté du réalisme à mes projets de développement”, commente le maître-chocolatier qui reconnaît avoir fait preuve d’une certaine boulimie dans le passé.

Sous la houlette de ce nouveau patron qui agit dans l’ombre, poursuit-il, la structure de fonctionnement a été professionnalisée, les coûts ont été réduits et les marges améliorées. D’après Pierre Marcolini, la société a vu son chiffre d’affaires progresser à 12 millions d’euros au terme de l’exercice clos le 30 juin 2011 (Ndlr, 7,4 millions d’euros, un an plus tôt) et dégagé un bénéfice d’exploitation (Ebitda) positif (lire Trends-Tendances du 27 octobre 2011). “On devrait atteindre l’équilibre financier cette année”.

Il reste consultant pour Nestlé

Les deux parties ont décidé de ne pas dévoiler les détails financiers de l’accord mais d’après Pierre Marcolini, Nestlé n’était “pas vendeur”. “Lors du dernier conseil d’administration, début novembre, nous leur avons soumis une proposition. Nous voulons reprendre notre destin en main car nous pensons qu’il y a une place pour de la haute chocolaterie comme la nôtre à l’international. Si on est rigoureux, si on améliore encore la qualité et si on se développe à l’international de façon mesurée, on peut devenir un fleuron belge.”

Cette transaction ne signe toutefois pas la fin de la collaboration entre Nestlé et Marcolini. “Notre partenariat était un accord gagnant-gagnant pour tous et nous sommes très reconnaissants envers Pierre Marcolini pour sa contribution à Nestlé, commente Marcelo Melchior, directeur chez Nestlé et responsable de la Confiserie. Pierre Marcolini restera impliqué dans des projets spéciaux au Centre d’excellence du chocolat de Nestlé.” “Cette deuxième phase dans la collaboration entre Pierre Marcolini et Nestlé, qui sera désormais uniquement commerciale et technique, se fait au bon moment, relève Laurent Levaux, “impressionné par le professionnalisme, le sérieux et la recherche d’un juste équilibre” démontrés par Nestlé lors des négociations.

Epaulé par ses nouveaux partenaires, Pierre Marcolini compte multiplier les opérations promotionnelles avec des groupes de luxe comme il le fait actuellement dans les boutiques belges Louis Vuitton. Il projette aussi d’ouvrir de nouveaux points de vente en Asie. Après le Japon, cap à présent sur la Chine : une première boutique vient de s’ouvrir à Taipei. Marcolini, qui emploie quelque 110 personnes en Belgique, compte actuellement 25 boutiques dans le monde, dont huit en Belgique.

Sandrine Vandendooren

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